Nostalgia manque cruellement d’émotions, énumère d’abord les poses sur un personnage en train de regarder haut perché sa ville d’enfance, de fumer dans le noir ou de déambuler dans les rues sans que rien n’advienne à l’écran, avant d’orchestrer une reconquête du territoire intime auquel nous n’avons accès que par pièces décousues. La tension entre l’extraordinaire du souvenir de Felice et la banalité de celui d’Oreste qui, sans scrupules et moyennant une liasse de billets de vingt euros, a délogé la mère du premier dans un rez-de-chaussée puant, conduit inévitablement à une désillusion sous la forme de chute tout à la fois brutale et prévisible qui advient à l’acmé de l’intégration sociale, amicale et religieuse. Naples n’apparaît hantée ni par le traumatisme ni par l’amitié trouble des adolescents : la caméra à l’épaule y vadrouille non sans une certaine maladresse d’exécution, et jamais ne s’égare dans un dédale aussitôt retrouvé aussitôt cartographié via un prospectus déplié sur le mur de la chambre d’hôtel. La citation de Pasolini placée en dédicace initiale s’étiole vite…
Dit autrement, le long métrage de Mario Martone manque de confusion des sentiments et d’incarnation, et cela malgré l’interprétation subtile de Pierfranscesco Favino. Quelques belles séquences se distinguent néanmoins, en particulier les retrouvailles entre mère et fils et celles, en miroir, des deux lascars d’autrefois dont l’ombre de l’un emportera l’autre pour un peu d’argent et une vieille photo.