Une déchéance de l'humanité plus que des codes masculins

Pleine de bonne volonté, je me décidais à voir ce film, vendu comme un questionnement à la portée auteuriste de la masculinité toxique.

Cette bande-annonce fut pleine de promesses, un climat angoissant jouant sur l'infériorité (ici en nombre) de la femme. Les références métaphoriques à la cohabitation entre homme et femme à l'échelle religieuse, posées avec par parcimonie et intelligence font de cette première impression du film un excellent moment.

Mais alors qu'en est-il du film en soit ? En réalité je ne peux qu'être mitigée, la première moitié du film est plaisante et foncièrement intéressante. Harper campée par Jessie Buckley (qui se veut être l'un des points fort de ce film) nous apparaît torturée, mais dans une sincère démarche de rédemption. On y voit aussi son rapport à l'homme déjà bouleversé par son histoire qui en réalité continuera de la hanté durant tout le film. C'est en fait la constance de cette souffrance qui arrive à donner au film cette unité.

Mais alors voilà, la moitié du film passé, il ne sait pas se renouveler, l'ambiance perverse n'évolue que très peu, cela finit par nous apparaître comme une lassante succession de rencontre montrant de manière presque trop brute les différentes parcelles de la toxicité.

Certains personnages manquent en effet de mesure, ils sont quasiment tous le reflet d'un défault, mais manque de profondeur, ils ne sont que l'illustration presque manichéenne de ce qu'Alex Garland reproche à la société patriarcale.

Malgré cette apparente simplicité de certains personnages sauvée par la complexité de harper, que l'on a l'impression de voir transformer la culpabilité difficile de son deuil en anxiété et en rejet. On se retrouvera face à une scène de fin aux allures de symbolisme bien abstrait, mais que je trouve inutilement violente et métaphorique. Cette apparente renaissance du mal par lui-même, se concluant sur son mari, laisse entendre que l'apothéose de sa vision horrifique de l'homme serait son mari (#spoiler# un homme abusif et violent) annulant totalement le travail, que je trouve certes superficiel, effectué sur les différents personnages (dont j'ai parlé précédemment).

Nous ne pouvons pas non plus oublier la scène de fin simpliste, nous montrant harper, arborant un sourire et tachée de sang. Elle aurait ici finalement tué (métaphoriquement) le souvenir et la culpabilité lié au suicide de son mari et se retrouverais finalement réconcilier avec elle-même et avec les hommes.

Est-ce réellement un moyen de conclure sur tout ce questionnement lié au rapport homme-femme ? Peut-on réellement mettre en avant l'idée que la toxicité masculine admet son origine dans une culpabilité féminine et donc sa solution dans une œuvre de rédemption ?

Je ne pense pas. Ce film a donc pour moi le goût d'un mets inachevé, bon de prime abord, mais à qui il manque certainement quelque chose.

Db_Jade
4
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le 25 nov. 2022

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Db_Jade

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