Ce film, classique du cinéma novateur et unique de David Fincher ne peut que marquer celui qui le regarde. Critique violente et brute d'une société qui anesthésie l'individualité par la possession. Mais peut-on réellement se déposséder de soi-même en adhérant à cette société capitaliste ?
C'est à mes yeux le questionnement fondamental porté par Fight Club, lorsque la société échoue, pousse l'homme à se recentrer dans une masculinité plus brute et ne sait plus reconnaître ce qu'elle a enfanté.
En-dehors des qualités artistique évidentes de ce film, propre à Fincher, des plans milimétrés, mais qui nous apparaissent comme logique et ne crée donc pas une forme de prétention qui aurait pourtant pu être légitime. On ne peut de la même manière que reconnaître l'impact de cette BO en totale cohérence avec cette ambiance jouant entre altérité et intériorité, les Dust Brothers ont ici livré leur meilleure œuvre en permettant la sublimation de ce film.
Essayons maintenant de réfléchir sur les différentes réponses qu'il apporte.
On pourrait simplifier ce film à une remise en question de cette codification de la masculinité et cette incapacité de l'homme à camoufler sa violence. Mais je pense qu'on ne peut réduire la complexité de cette oeuvre à un sujet si réduit. En effet, j'y vois plus qu'une critique de la masculinité, une sorte de critique de la presque animalité de l'humain qui resurgit par différentes formes de perversions.
Pour moi, ce supplément de sens se traduit par la présence de Marla Singer, personnage complet et complexe, qui se retrouve être la majeure partie du film cette extrapolation de la perversion. Cette violation de l'intimité que représente la passion qu'elle partage avec le personnage d'Edward Norton représente le début de cette introspection des fêlures de l'humain. Peut-on réellement en vouloir à ses humains confortant une peine qu'ils ne comprennent pas encore dans la douleur d'autrui ? Je ne pense pas, en réalité cet attrait pour l'intimité et la douleur d'autrui est une composante importante de nos sociétés qui tentent de créer des semblants d'intimités.
Et enfin, un aspect important de ce film en dehors de la critique évidente du consumérisme qui instrumentalise les pulsions en créant de fausses passions, est pour moi la remise en question de son rapport à l'autre. En effet, c'est bien là tout le cœur du plot twist de ce film, comment faire quand l'autre que l'on admire autant que ce qu'on le rejette est en nous ? Comment faire lorsque l'horreur de l'altérité se révèle être le résultat d'une trop longue compression de ses pulsions ?
Pour moi, c'est là le cœur même du film, une critique de cet enfant rejeté de la société qu'est la violence intrinsèque de l'homme qui commet un matricide. Lorsque la violence camouflée de la société se retrouve à découvert, ses propres enfants, torturés d'incompréhension, ne savent plus qu'exprimer de la violence. Mais peut-on réellement leur en vouloir ?