Le retour de Catherine Breillat ne pouvait que se faire dans le souffre, elle qui a fait des sujets clivants le cœur de son œuvre. L’été dernier se décline ainsi comme une variation sur le Fatale de Louis Malle, à la différence que c’est désormais l’épouse qui joue à croquer le jeune fils de son mari : les temps changent, figurez-vous.
Nous voilà donc dans une jolie maison cossue, où madame (Léa Drucker, l’une des meilleures comédiennes actuelles, lorsqu’on la dirige avec pertinence et qu’on lui écrit des lignes de dialogue dignes de ce nom) va craquer pour l’ado de 17 ans qui, dans l’insolence propre à son âge, va osciller entre victime inconsciente et mante religieuse.
Rien ne va dans cette étude de mœurs qui s’amuse plus qu’elle n’analyse, en jouant à aligner des situations prétendument provocatrices, mais dénuées de toute capacité à instiller le malaise. La faute à une écriture mécanique, qui aligne des répliques involontairement comiques : « Tu n’y vas pas de main morte » assène ainsi l’adolescent à la belle-mère avant de lui réponde « chiche » lorsque les propositions deviennent plus intéressantes, belle-mère qui se défend bien en termes de formules contemporaines (« cambrioler sa propre maison, jolie mentalité, bravo ! ou encore « tu n’avais pas à bavasser »), tandis que sa sœur a « les nerfs en pelote ». Le portrait de cette femme, qui gère sans gérer, distille quelques secrets bien gardés d’une première fois traumatique, relève lui aussi d’une forfanterie, consistant à loger dans les silences et les mystères le manque patent d’écriture et d’approfondissement.
Jardin d’été, grands verres de vin blanc, ado torse nu opposé à la « peau parcheminée » de la vieillesse, soirées estivales et petites engueulades, regards qui en disent long et quickie dans la remise… L’été dernier est une petite valse bourgeoise sans âme, où les étreintes sont filmées à la naturaliste pour bien nous signifier le surplomb « qui ne juge pas » d’une cinéaste obsédée à l’idée de dominer son sujet et déstabiliser son audience. En un sens, l’œuvre qui en résulte est le récit de son échec, qui pourrait donner lieu à des analyses plus pertinentes, et d’une acuité bien plus cruelle.