Il y a toujours une marge assez édifiante entre l'aura porté sur une saga cinématographique adorée étant enfant et plus encore, dévorée jusqu'à plus soif, et le manque d'attrait à l'égard d'une nouvelle production dont on connaît par avance la valeur pour une simple question quasi-biologique. Pour ainsi dire, c'est sans illusions que je suis allé voir le dernier (et cette fois-ci, pour de bon) Indiana Jones; en une de ces perdurantes dernières journées de pluie estivale, le moment ou jamais de livrer un dernier au revoir à quelques lieux communs. Et si l'assiette ne fait aucun mal à la rétine, elle peine à relever le peu de goût porté par le spectacle inégal que nous offert ce Cadran de la Destinée.


Dès les premières secondes, il y a de quoi s'attendre au pire. Le feu de l'action déboule très maladroitement et cet horrible logotype digne de Movie Maker donne l'impression que le générique a été conçu à l'arrache (sérieusement, quid du très joli ornant l'affiche et la bande-annonce ?). Heureusement, l'espoir renaît de ses cendres au moment de la découverte de Ford au visage trafiqué numériquement, ce qui passe crème et donne à réfléchir au dernier Terminator qui faisant à peine l'effort de réexploiter correctement les archives tirées du film initial. Mads Mikkelsen, changeant par ailleurs très peu entre les deux unités temporelles que proposent l'introduction et la suite du film, évoque beaucoup Ronald Lacey, dit Arnold Toht, l'un des deux principaux antagonistes des Aventuriers de l'Arche perdue et sera la force-vive de l'intrigue. Avec cette poursuite à demi-teinte dans, puis sur le train, on pense bien-sûr à La Dernière Croisade, à défaut d'être bestial.


Puis, se développe une histoire qu'on peine à comprendre, traînant en longueurs traduites par un blabla omniprésent, et dont on saurait à peine expliquer la place. James Mangold est plutôt accoutumé aux productions au spectacle modéré, ayant touché au polar, au biopic, au western, au film de super-héros et au film de course automobile avec sa pâte singulière et, démarche plus que respectable, sans avoir recours à l'avalanche de gros effets propres aux grosses machines hollywoodiennes. Sauf que bon, ce n'est pas ce que le public attend d'un Indiana Jones. À titre comparatif, Le Royaume du crâne de cristal était scénaristiquement assez bête, mais plus efficace dans sa narration et dans sa durée. Ce nouvel opus se prend bien trop au sérieux et nous, public fidèle, nous consolerons seulement à travers les quelques touches d'humour qui, à défaut d'être vertigineuses comme auraient pu l'être quelques séquences filmées en hauteur, sont plutôt bien épicées. De même, les énigmes faisant la verve des précédents volets, sont complètement absentes.


La magie s'éteint à petit feu, de surcroît par l'usage flagrant de CGI enlaidissant l'esthétique, et c'est un manque de moyens évident trahit par la permanence des séquences nocturnes, rendant le fil des événements difficile à suivre et pénible.


Outre Mads, les nouveaux personnages constituent tout ce qu'il a de plus classique dans le blockbuster contemporain, à savoir qu'ils se contentent d'être à leur place sans qu'on puisse espérer que ça aille au-delà du minimum syndical. Helena, filleule d'Indiana, est fort sympathique, Phoebe Waller-Bridge dégage quelque chose et a pour mérite d'être sobrement abordée d'un point de vue caractériel (rien à voir avec Willie et Elsa donc). Néanmoins, il est regrettable que ses ambitions n'aillent pas plus loin qu'au travers des profits qui sont à sa disposition (Marion était beaucoup plus intéressante en cela). Dommage, le personnage d'Antonio Banderas n'apporte rien, en plus d'être devenu sacrément laid, et la séquence sur son bateau ne ravive nullement la flamme. Et puis, il y a ce gamin, lui non plus ne sert à rien, il est tout le temps là, et n'est même pas un bon comic relief. Tout manque de vie, jusqu'à la BO de John Williams qui met tristement point d'orgue à sa carrière.


Moins de dialogues laborieux et un scénario plus élaboré pour retenir l'attention aurait rendu l'ensemble plus divertissant, en attendant ce Cadran de la destinée est un exercice nostalgique, beaucoup trop, préférant multiplier les références au passé plutôt que de livrer un spectacle neuf et en toute pertinence. On en retrouve ces lieux communs plaisant, mais sans la verve qu'elle a originellement.


Au passage, dans la scène d'ouverture, cela ne choque que moi que malgré les rafales de vent et le fait qu'il se retrouve la tête en bas, Indy ne perde même pas son chapeau ?

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le 27 juil. 2023

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