Le daron le plus néerlandais du cinéma français voit sa prestigieuse fin de carrière suivre sa lancée avec cette très intrigante adaptation biographique de l'abbesse Benedetta Carlini (Virginie Efira).


Sa truculente scène d'introduction nous prévient ipso facto ; Benedetta ne choisit pas son angle, et nous balance en pleine tronche une succession de plaisanteries douteuses ayant pour principal sujet


les besoins corporels.


Avec son montage dynamique rappelant la farouche ouverture « reportage » de l'indémodable Starship Troopers, l'authentique récit jadis réhabilité par Judith C. Brown voit la pluralité de son bagage émotionnel faire peau neuve par un cinéaste n'ayant plus rien à prouver en matière de crudité et de propos acerbes.


Le visage angélique de Virginie Efira dans la peau de Benedetta (Virginie Efira) se marie à merveille tout le long à celui de Daphné Pataki, austère Bartolomea, liés par une passion mystique autant qu'envahissante. Une relation inattendue dès lors qu'on en découvre la genèse puisqu'elle progresse continuellement en dépit de l'impassibilité de la communauté relatée.


Une position de choix sublimée par la séquence didactique dans laquelle Benedetta apprend à Bartolomea à compter - et Bartolomea à manier la plume à Benedetta.


Melting pot de la filmographie de Verhoeven à ne pas mettre entre toutes les mains, évoquant autant la manipulation féminine que son émancipation en passant par le carcan que soulève le puritanisme religieux, le film prend soin de taire sa classification pour donner sens à ses ambigüités intrinsèques. Un savant mélange que certains trouveront grandguignolesque, qui dans un sens n'a d'égale que ce que fait Verhoeven en moyenne depuis Total Recall.


En outre toute la seconde partie du métrage est portée par le climax psychologique, souvent hystérique et nullement faiblie, tout en baignant dans une ambiance globale renvoyant à la nervosité du Jeanne d'Arc de Besson - exemple qui fâche et pourtant si évident - et la sensualité confuse des Liaisons dangereuses de Stephen Frears, et traitée bien entendu avec des bribes de Basic Instinct. Et, bien entendu, portée par la solide interprétation de Charlotte Rampling et le déboulement de Lambert Wilson en nonce étonnant dans sa froideur.


Un O.V.N.I. d'une modernité démesurée et à l'ambigüité saisissante qui arrive, avec parcimonie, à disséquer un univers en pleine détresse avec une belle dose de jouissance, et dont je serai prêt à parier la longévité.

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le 27 juil. 2021

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