Koud'kokoro pour l'boulot - Films

Mini papiers sensés donner envie, faire la promo, vendre le truc quoi, et donc sans recherche d'originalité, analyse prise de tète ou obligation de slalomer entre ce qui a déjà été dit, redit et écrit mille fois... Et puis de l'auto-recyclage à la James Horner aussi, hein, tant qu'à faire...

Liste de

58 films

créee il y a presque 4 ans · modifiée il y a 4 mois

90's
7.4

90's (2018)

Mid90s

1 h 24 min. Sortie : 24 avril 2019 (France). Comédie dramatique

Film de Jonah Hill

Toshiro a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Un couloir, un plan fixe qui dure… puis un corps d’enfant propulsé contre le mur à vitesse grand V. Et paf ! Ainsi commence le premier essai de Jonah Hill derrière la caméra… et l’adolescence pour son attachant petit héros. Coup d’essai, coup d’éclat ! Et superbement accompagné par le piano et autres bourdonnantes nappes sonores de Trent Reznor et Atticus Ross.

Récit d’apprentissage mélancolico-burlesque, précis de culture jackass encapsulé dans une jolie bulle de souvenirs d’été délavés, 90’s, c’est du cinéma estampillé Sundance, mais sans les manières ! Moins d’1h30 au compteur, des plans qui ne s’agitent pas mais travaillent la durée, nous laissant prendre le pouls d'un environnement urbain mis sur pause. Et puis des claquements de violence brute, comme autant de paliers sur le chemin menant un razmoquette de la solitude à l’amitié.

Gus Van Sant entre autres avait certes déjà balisé le terrain, mais qu’importe. Le milieu du skateboard reste un superbe terrain de jeux cinématographique - et une belle excuse pour filmer ces gadins qui font grandir.

Un grand petit film !

02/2020

Portrait de la jeune fille en feu
7.4

Portrait de la jeune fille en feu (2019)

1 h 59 min. Sortie : 18 septembre 2019. Drame, Historique, Romance

Film de Céline Sciamma

Toshiro a mis 8/10.

Annotation :

Prix du scénario au dernier Festival de Cannes et César de la meilleure photographie, Portrait de la jeune fille en feu est à n’en pas douter l’un des films qui aura marqué l’année 2019 !

Réflexion sur l’Art en tant que fabrique du désir, et sur le regard au féminin en tant qu’agent de subversion, le film de Céline Sciamma (Tomboy, Bande de filles) est une proposition rare. Un coin enfoncé dans le paysage ronronnant du film en costume à la française. Un film en forme de contrechamp au fameux « male gaze » dominant encore une industrie en cours de mutation.

Mais c’est aussi - pour ceux que la forme intéresse autant que le fond - comme un tableau de maître auquel on aurait donné vie. Sorte de double lumineux et insaisissable du portrait de Dorian Gray… Nouvelle preuve s’il en est que le cinéma, en tant que fusion de tous les arts, a encore un rôle à jouer dans la transformation de notre vision du monde !

03/2020

Réveil dans la terreur
7.6

Réveil dans la terreur (1971)

Wake in Fright

1 h 54 min. Sortie : 21 juillet 1971. Drame, Thriller

Film de Ted Kotcheff

Toshiro a mis 9/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

L’un des deux films, avec le Walkabout de Nicolas Roeg, qui fit découvrir le cinéma australien au reste du monde.

Relecture moderne d’Ulysse chez Circé, film façon gueule de bois vers l’infernal et au-delà, Wake in Fright, c’est une proposition de cinéma radicalement autre. L’adaptation du bestseller d’un journaliste connaissant très bien son sujet, soit la vie des oubliés de l’Outback australien. Mais aussi un tournage in situ, avec les trognes du cru, dans une sorte d’approche « gonzo » du 7e art, où la fiction et son sujet, le tournage et les beuveries, auraient fusionné…

Un OVNI méchamment drôle en somme, mais pas seulement ! Tant derrière le cauchemar à ciel ouvert, le film d’horreur existentielle, se révèle la part obscure tapie en chaque animal humain.

03/2020

La Tortue rouge
7.2

La Tortue rouge (2016)

1 h 20 min. Sortie : 29 juin 2016. Aventure, Animation

Long-métrage d'animation de Michael Dudok de Wit

Toshiro a mis 8/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

Un film d’animation inspiré du zen, pour peut-être, qui sait, vous aidez à le rester en cette période particulière…

Conçu à l’origine par feu Isao Takahata, ce petit bijou fait main à ceci d’unique qu’il reste à ce jour le seul film des Studios Ghibli réalisé par un non-japonais. À savoir le néerlandais Michael Dudok de Wit, déjà remarqué pour ses courts-métrages et notamment Le Moine et le poisson.

Un film unique, de fait, parce qu’à travers les sensibilités respectives de ses deux papas, ce sont deux grandes traditions artistiques et spirituelles qui dialoguent, entre orient et occident. En résulte un robinsonnade aux airs conte philosophique zen. Métrage où d’une scène à l’autre, ligne claire et aplats peuvent se voir balayés par une fureur proprement kamikaze (« vents divins » dans la langue de Son Goku). Soit l’impermanence des choses dans l’éternel cycle de Mère Nature. Mais aussi l’effet d’une animation rimant avec abstraction, et d’une poétique fondée sur l’harmonie du vide et du plein.

Bref, vous n’en croirez peut-être pas vos yeux, mais voici le cousin art & essai de Pacific Rim ! À (re)découvrir dans la position du lotus… ou pas.

03/2020

La Grande Ville
8

La Grande Ville (1963)

Mahanagar

2 h 11 min. Sortie : 27 septembre 1963 (Inde). Drame

Film de Satyajit Ray

Toshiro a mis 8/10.

Annotation :

Loin des comédies musicales de Bollywood, un film pour découvrir un autre visage du cinéma indien….

Des couleurs, des danses et un sens du « bling-bling » à faire pâlir n’importe quel Baz Luhrmann : pour beaucoup d’yeux occidentaux, le cinéma indien, c’est ça, et pas grand-chose de plus ! Et pourtant, à contre-courant de Bollywood, quelque part dans le Bengal des années 50-60, il était une fois Satyajit Ray, héraut d’un autre cinéma indien…

Mais assez de discrimination positive. Si on vous conseille ici de vous jeter sur la riche filmographie du Monsieur, c’est qu’il en vaut la peine ! Et dans cette optique, son dixième ouvrage, La Grande Ville, pourrait bien être la porte d’entrée idéale. Soit l’histoire, filmée dans un noir et blanc des plus maitrisés, d’une émancipation féminine par l’accès au travail. Occasion pour l’homme de lettres derrière la caméra de tisser le réseau de ses thématiques (rapports hommes/femmes, travail/culture, tradition/modernité) comme la toile des rapports socio-économiques dans une Calcutta en pleine mutation.

Et puis, si vous hésitez encore, dites-vous qu’il y a ici quelque chose d’à la fois documentaire (sur l’Inde de l’époque) et foncièrement pictural (un sens du cadre digne d'Akira Kurosawa).

05/2020

Les Étendues imaginaires
6.5

Les Étendues imaginaires (2018)

Huan tu

1 h 35 min. Sortie : 6 mars 2019 (France). Policier, Drame, Thriller

Film de Siew Hua Yeo

Toshiro a mis 7/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

Dans la lignée de Blackhat et Un Grand voyage et vers la nuit, un film pour partir loin, très loin, et se dé-confiner les méninges…

« Que signifie un territoire en expansion permanente pour l’identité d’une nation ? » Voilà la question qui aura guidé le jeune singapourien Yeo Siew Hua dans la confection de ce deuxième long métrage. Un néo-noir adoubé par Jia Zhang-Ke en personne, et semblant de fait naviguer entre le cinéma du maître chinois et ceux, plus sensoriels, de Bi Gan et Michael Mann.

C’est que, s’il part d’un sujet documentaire (l’extension artificielle de Singapour à grandes pelletées de sable venu des pays voisins, comme la main d’œuvre exploitée pour l’occasion) Les Étendues imaginaires à tôt fait de brouiller toutes les frontières, et nos repères avec. Réalités oniriques et charnelles, de silice et de pixels, diurne et fluorescente… : toutes dissolues par les insomnies de nos deux protagonistes. L’un ouvrier évaporé dans la nature en ne laissant que quelques miettes de data derrière lui ; l’autre enquêteur lancé sur sa piste jusqu’au trouble identitaire. Sans parler de cette gérante de cybercafé, sirène à la croisée de tous les chemins…

Un film difficile d’accès ? Plutôt une œuvre tout en spleen et atmosphère évanescente, autrement dit à ressentir d’abord et comprendre ensuite ! En tout cas un truc à voir, tant s’y révèle l’insularité de nos existences contemporaines pourtant si connectées.

04/2020

Le Cuirassé Potemkine
7.6

Le Cuirassé Potemkine (1925)

Bronenosets Potemkin

1 h 15 min. Sortie : 12 novembre 1926 (France). Muet, Drame, Historique

Film de Sergueï Eisenstein

Toshiro a mis 8/10.

Annotation :

(Co-écrit avec Rachel)

Janvier 1905. Dans le sillage de la « première » révolution russe, les marins du « Potemkine » s’agitent, râlent, s’organisent, jusqu’à ce que - KABOOOOM !!! - une véritable insurrection éclate dans le port d'Odessa…

Réalisé en 1925 sur commande du pouvoir soviétique en commémoration du 20e anniversaire de la révolution de 1905, ce grand classique du cinéma muet aurait pu ne restait qu’une banale œuvre de propagande, oubliée avec le temps. Mais c’était sans compter le réalisateur mis à la barre de ce Cuirassé !

Théoricien du cinéma comme synthèse de tous les arts, le fait que Sergueï Eisenstein était une sorte de Léonard de Vinci moderne. Grand érudit et esprit plus libre qu’on ne le pense (au point que Staline aura fini par le museler…). Quant à ce film, son deuxième après La Grève, s’il a eu un tel impacte sur la pop culture, c’est que le cinéaste aura su y mettre en pratique, avec une puissance inégalée jusqu’à (au hasard) Mad Max : Fury Road, son concept de « montage des attractions ».

La scène exprimant le mieux cette idée étant sans doute celle, fameuse, des escaliers d’Odessa. Morceau de bravoure où, à la ligne des soldats tsaristes descendant mécaniquement l’escalier (expression d’un pouvoir aveugle), sont opposés les visages paniqués d’une foule dévalant les marches en tous sens. Le tout suspendu à la course folle d’un landau… Les attractions, ici ? Tout ce qui, chez le spectateur, suscite des « affects », et de ces affects une « émotion violente », et de cette émotion violente une « série d’idées ». Soit « ce mouvement [qui] va de l’image au sentiment, du sentiment à la thèse », résumait le cinéaste.

Gestes expressifs, compositions acérées, visages pathétiques, montage organique : rien donc ici qui ne soit au service d’autre chose que le film, et sa capacité à toucher votre intelligence sensible. Alors n’hésitez surtout pas à (re)découvrir ce film, camarades confinés ! Car plus que du terrorisme émotionnel, c’est une leçon de cinéma !

04/2020

Sunset
6.3

Sunset (2018)

Napszállta

2 h 21 min. Sortie : 20 mars 2019 (France). Drame

Film de László Nemes

Toshiro a mis 8/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

La mystérieuse quête d’une jeune femme dans le Budapest de 1913, et à travers elle le dévoilement d’un monde au bord de l’autodestruction…

L’idée à l’origine de ce deuxième long-métrage de László Nemes, après le remarqué Fils de Saul ? Mettre en image, à travers le prisme d’une femme « portant en elle le destin du XXe siècle », le juste-avant-la-catastrophe. Non pas 1914, quand le train est déjà lancé vers le grand suicide européen, mais 1913, et cette Mitteleuropa semblant danser au-dessus d’un volcan.

Voilà pour le fond de ce film brillant, bien que passé inaperçu à sa sortie. Brillant parce que ce fond, le cinéaste le traduit littéralement en fond de cadre et bruit de fond. Autrement dit un habile jeu sur la profondeur de champ (transformée par le flou en magma quasi abstrait) et les plans séquences (discrets mais dignes d’Alfonso Cuaron). Ni thèse lourdingue ni tunnels de dialogues ici donc, mais une plongée dans la tourmente de l’Histoire sur le mode de l’ici-et-maintenant, au plus près des perceptions d’Írisz. Jeune femme dont on suit les déambulations crépusculaires comme dans le labyrinthe de l’inconscient collectif européen.

Un personnage qui, avec sa drôle de lueur dans les yeux, fascine. Pourquoi ? Parce que, princesse se jetant dans la gueule du Loup ou agent du Chaos, László Nemes l’aura voulu ainsi : un mystère, ambigu, insondable, et finalement parfait reflet de ce on-ne-sait-quoi ayant déclenché l’Apocalypse du XXe siècle. La destruction comme cause du devenir ? Un écho du passé en tout cas, histoire, peut-être, de prendre un peu de recul sur notre situation actuelle…

04/2020

Why Don't You Play in Hell?
7.5

Why Don't You Play in Hell? (2013)

Jigoku de naze warui

2 h 06 min. Sortie : 28 septembre 2013 (Japon). Action, Comédie

Film de Sion Sono

Toshiro a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Un jeu de massacre hystérique et trop kawaii, supra-tarantinesque et violemment attachant, par l’extraterrestre à l’origine de Suicide Club et Love Exposure…

Connaissez-vous Sono Sion ? Non ? Alors sachez seulement ceci : ce japonais est un poète du chaos, foudroyé à un âge de l’on suppose décisif par la découverte d’Orange Mécanique, et n’ayant eu de cesse depuis lors de crier, que dis-je, mitrailler à longueur de pellicule enflammée, sa passion iconoclaste pour le « Dieu Cinéma ». Un fou furieux qu’on a envie de serrer très fort dans ses bras, tant ses films sont généreux, amoraux, bouleversants, épuisant, bref, d’une liberté inouïe !

Autant dire que si vous ne supportez pas les pubs squattant votre mémoire des jours durant, les geysers de sang so girly, montages cocaïnés et autres cosplays de Bruce Lee, fuyez, pauvres fous ! Car ce Why Don’t You Play in Hell ? est tout ça à la fois, et pire encore ! L’histoire d’une bande de siphonnés du caméscope - les Fuck Bombers ! - croisant la route d’une ex-enfant star à la dérive, dans un contexte de guerre des clans yakuzas, tous plus baka les uns que les autres bien sûr. Le tout culminant dans un tournage-massacre à l’intérieur même du film, parfaite mis en abîme du cinéma faussement guérilla et vraiment virtuose du cinéaste.

Un sens de la narration hallucinant, tout en ruptures de ton mais chacune retombant avec grâce sur ses pattes, des idées de mise en scène comme s’il en pleuvait, des trognes pas possibles, un romantisme d’adolescent écorché vif… [Soupir] Arrive un moment où les mots manquent… Alors voilà, si vous aimez Kill Bill et que vous sentez le besoin de décompresser en cette période anxiogène, décapsulez donc cette boîte de Pandore pour cinéphage compulsif. Plus frappée qu’une tequila, elle fait aussi très chaud au kokoro !

05/2020

Le Lac aux oies sauvages
6.6

Le Lac aux oies sauvages (2019)

Nanfang chezhan de juhuì

1 h 53 min. Sortie : 25 décembre 2019 (France). Thriller, Drame, Film noir

Film de Diao Yi'nan

Toshiro a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Un drôle de film noir aux airs de trivial pursuit dans les bas-fonds d’une Chine moite et hallucinée…

Ça commence à la manière d’un Wong Kar-wai : figés comme sur papier glace, tous les fétiches du noir sont là, étagés dans la composition, puis entamant une chorégraphie à trois : l’homme en fuite, la femme fatale et la caméra. Inspiré entre autres par Kiss me deadly et Entre le ciel et l’enfer, ce Lac aux oies sauvages partage avec ses illustres modèles cette façon de filmer la ville comme une pure entité cinématographique. Souricière pour ses personnages (flics et gangsters compris) et dédale d’images dont le seul plan d’organisation serait le montage - en soit une leçon !

Maniériste, le dernier né de Diao Yinan ? En tout cas très ludique et fichtrement intelligent dans sa façon de diriger notre regard. Oh, pas d’inquiétude, le réalisateur de Black Coal n’en oublie pas ses préoccupations sociales pour autant. Mais les marges du miracle économique chinois sont ici des enjeux audiovisuels avant tout, sans lourd discours ni leçon de morale. Et le spectateur libre de penser ce qu’il veut de toute cette violence : sociétale et économique bien sûr, mais aussi graphique et burlesque, façon l’arroseur arrosé.

La signature du cinéaste est d’ailleurs là, dressant au passage un pont entre les cinémas de Hong Kong et de Pékin, autant dire le feu et l’eau !

05/2020

American Honey
7.1

American Honey (2016)

2 h 43 min. Sortie : 8 février 2017 (France). Drame

Film de Andrea Arnold

Toshiro a mis 8/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

Quelque part entre Les Raisins de la colère, La Ballade sauvage et Spring Breakers, embarquez avec ce road movie sur les routes d’une Amérique où liberté rime décidément avec ambiguïté…

Acteurs pour la plupart non professionnels, caméra chahutée, montage cut, imagerie solaire : un peu plus et on dirait du Terrence Malick ! Sauf qu’en filmant la jeunesse américaine presque à même la peau, faisant corps avec sa transe, la britannique Andrea Arnold cherche moins le sacré que le pulsionnel. L’élan le plus brut et vital, comme en témoignait déjà son éprouvante et radicale adaptation des Hauts de Hurlevent !

Et puis, faire un road movie aux USA, c’est en soit un acte politique ! Une façon pour la cinéaste, après avoir sillonné son territoire de long en large, de prendre le pouls d’un pays ravagé par une première apocalypse silencieuse (2008 déjà !), tout en sondant les ambiguïtés de notre époque. Des poubelles du néolibéralisme à un pow-wow d’enfants indigo, American Honey dresse en effet le portrait d’une génération tout en paradoxe : apolitique et victime consentante du dogme de « l’emploi kleenex », certes. Mais aussi et en même temps, sans le savoir ou alors juste par la mémoire du corps et l’instinct grégaire, héritière des contre-cultures et utopies communautaires des 60’s…

Le tout loin, très loin de la thèse indigeste, puisque passant à travers le coming of age de la lumineuse Star, comme émergeait autrefois la conscience politique de Tom Joad… Bref, un film aussi grisant qu’intelligent !

05/2020

La Ligne rouge
7.7

La Ligne rouge (1998)

The Thin Red Line

2 h 50 min. Sortie : 24 février 1999 (France). Guerre, Drame

Film de Terrence Malick

Toshiro a mis 10/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Vous êtes-vous déjà demandé ce à quoi pourrait ressembler une relecture moderne et poétique de l’Iliade ?

Non ? Alors peut-être devriez-vous (re)découvrir La Ligne rouge. Non pas que ce chef d’œuvre signé Terrence Malick tienne vraiment de l’épopée - plutôt d’une forme de poésie d’entomologiste, embrassant tout d’un même geste panthéiste, du crocodile au brin d’herbe. Mais il est ici question d’une âme collective, dont chaque soldat-fourmi, se retrouvant seul face à l’impensable de la Mort et le mystère d’une Nature souveraine, serait l’une des facettes, « each like a coal drawn from the fire. »

Aucun récit belliciste donc, mais le prétexte de la terrible bataille de Guadalcanal. Prétexte à quoi ? À une méditation sur la place de l’Homme dans le Grand Tout universel, selon comme toujours chez l’auteur de The Tree of Life ce schéma de la Chute de l’Eden. Soit le point de vue le plus innocent posé sur tout ce qui lutte pour sa survie sous le Soleil. Pas d’avantage d’héroïsme de fait, mais une suite de regards perdus, du troufion de base au plus haut des gradés, du déserteur christique à l’humaniste déçu. Et puis, tout du long, ce flux de voix off s’écoulant sur ces images du paradis perdu comme un goutte-à-goutte de questions sans réponses…

Un film qui aurait pu être bien lourd de ces airs philosophes à l’arrivée. Sauf que, oh miracle, sons et images, prose et poésie, ambitions et humilité : tout se fond l’un dans l’autre. Et le spectateur, sauf à bailler d’ennui (c’est selon), de vivre la plus bouleversante des expériences synesthésiques !

06/2020

Ali
6.7

Ali (2001)

2 h 37 min. Sortie : 27 février 2002 (France). Biopic, Drame, Sport

Film de Michael Mann

Toshiro a mis 10/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Un petit bijou de film à redécouvrir pour penser la « question raciale » à travers celles du corps et du sport, pas plus innocents en la matière que les images…

Médias, universitaires, réseaux sociaux : la question identitaire est aujourd’hui partout. Or, dans la mémoire des Noirs américains, elle n’a pas attendue internet pour se poser ! Ce que révèle ce biopic de Mohammed Ali dès son prologue entrecroisant un concert de Sam Cooke avec l’entrainement de l’athlète. Génial montage musical où, entre chaque moulinet dans le punching-ball, Cassius Clay (de son nom d’esclave) se rappelle la prise de conscience de sa condition. Comme pour canaliser dans ses poings cette colère qu’au même moment Malcolm X sublime en discours au scalpel…

Un père peignant des Jésus blond aux yeux bleus, un cas de lynchage dans les journaux, l’écho d’une sirène de police lors d’un jogging… : en une poignée d’images-traumas, Michael Mann précipite ainsi une véritable contre-histoire des USA. Et à travers ce regard qui n’oublie rien, ce nom qui se réinvente et ce corps encaissant puis redistribuant tous les coups, c’est à la maturation de la conscience politique afro-américaine sur l’espace d’une décennie décisive (1964-1974) que l’on assiste. Une conscience tout sauf infaillible, mais allant toujours s’élargissant. Jusqu’à coïncider avec son image de « champion du peuple » et d’icône anti-impérialiste…

Projet ayant longtemps circulé à Hollywood avant de tomber dans les gracieuses paluches de Michael Mann, Ali aura aussi été l’occasion pour le cinéaste de travailler avec le génial chef opérateur Emmanuel Lubezki (Les Fils de l’homme, The Tree of Life…). De quoi mettre K.O., des étoiles dans les yeux et l’épiderme parcouru de frissons, le plus myope des spectateurs !

07/2020

Adoration
6.2

Adoration (2019)

1 h 38 min. Sortie : 22 janvier 2020 (France). Drame, Thriller

Film de Fabrice Du Welz

Toshiro a mis 7/10.

Annotation :

Sur le papier une sorte de relecture de La Nuit de Chasseur, à l’arrivée un film violemment à fleur de peau, comme filmée sous celle de son petit héros, et son amour fou, loin d’être un fleuve tranquille…

Grand admirateur de Massacre à la tronçonneuse et plus généralement de tout une veine bien extrême du cinéma d’horreur des 70’s, Fabrice Du Welz est le genre de réalisateur pour qui le cinéma n’a rien, mais alors vraiment rien, à voir avec la morale ! Par contre, et c’est un sacré grand écart, tout ce qui a trait au spirituel, à la recherche de la Grâce, le passionne. Lui qui explique par ailleurs « vomir » dans ses films tout ce qui « ne sort pas autrement », parce que tenant de l’indicible ou par simple pudeur…

Vous voilà donc prévenus, vous qui seriez intrigués par ce titre et cette jolie affiche toute mimi : Fabrice Du Welz, c’est un peu le Mel Gibson belge ! Et son dernier bébé, dans son épure romantique, sa rythmique émotionnelle bipolaire, ses fulgurances hypersensibles et ses images texturées, est un OVNI. Un météore traitant le sentiment amoureux comme un Absolu autant qu’une rencontre brutale avec l’Altérité. Soit l’histoire du petit Paul et sa collision avec Gloria. Lui dont on épouse radicalement le point de vue et l’innocence bouleversée. Elle qui apparait à travers ses yeux comme une entité, un mystère, aussi fascinante qu’ambiguë.

Aussi violent qu’un conte non expurgé de sa noirceur, voilà un film refusant tout discours au profit du pur ressenti. Une expérience douloureuse pour certains, fusionnelle et cathartique pour d’autres, en tout cas marquante !

07/2020

The Blade
7.4

The Blade (1995)

Dao

1 h 42 min. Sortie : 21 décembre 1995 (Hong Kong). Drame, Arts martiaux

Film de Tsui Hark

Toshiro a mis 9/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

Le film de sabre le plus brutal, extrême et jouissif de l’histoire du cinéma ?

Imaginez : entre deux baffes poliment adressées à la CIA, et après un « stage boucherie » avec Maximus en personne, Jason Bourne momentanément propulsé dans un film de sabre chinois. Terminator 36 ? Gladiator 2 : Elysium ? Detective Dead ? Non ! The Blade, ou la définition la plus cinématographiquement pure du chaos !

Blague à part, aucune star hollywoodienne ici, mais une sorte de Tazz pour protagoniste de cette relecture radicale de la légende du sabreur manchot. Amputé d’un bras, Ding On, orphelin élevé dans un fabrique d’armes à une époque bien moyenâgeuse, développe une improbable technique de combat. Laquelle fera de lui le premier de ces chevaliers errant parcourant le jiang hu (ou monde des arts martiaux). Autrement dit l’ancêtre de tous les virevoltants héros de la culture populaire chinoise, tigres et petits dragons inclus…

La radicalité de cet OVNI ? Dans sa mise en scène façon reportage de guerre, taillant en pièce tout confort visuel au profit de l’effet de réel le plus brut ! De quoi transformer ces corps poussés au bout de leurs limites en abstractions, forces centrifuges et flous de mouvement fusionnant avec les éléments et autres textures. Un peu comme dans Les Cendres du temps de Wong Kar-waï, mais la mélancolie en moins et la fureur en plus !

Ainsi Tsui Hark, roi fou de l’âge d’or du cinéma de Hong Kong (années 80-90), signait là en 1995 un chef d’œuvre de barbarie. Et d’autant plus culte qu’il est aujourd’hui bien difficile de mettre la main dessus…

07/2020

Nickelodeon
6.7

Nickelodeon (1976)

1 h 57 min. Sortie : 21 septembre 1977 (France). Comédie

Film de Peter Bogdanovich

Toshiro a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Il était une fois à Hollywoodland…

C’est une histoire aussi vieille que le cinématographe : la guerre entre les grandes compagnies, futurs studios, et les irréductibles indépendants, débrouillards et autres zinzins de la bobine. Histoire que les cinéphiles connaissent par cœur, mais dont on a somme toute fait peu de fictions, encore moins recréant les années 10, avec tous les ingrédients du cinéma d’alors (naïveté, intertitres et gags tarte à la crème).

Préhistoire muette et anarchique d’un art et d’une industrie qu’on n’appelait pas encore Hollywood, l’époque est un joyeux cirque, aux airs de ruée vers l’argent(ique). Soit le terrain de jeu idéal pour un mélancolique comme Peter Bogdanovich, ex-historien amoureux du cinéma passé derrière la caméra dans les années 70.

Un âge d’or renait alors, réarrangé par une cinéphilie volontiers anachronique, un peu comme dans le dernier Tarantino : sous le canotier de Buster Keaton, des dialogues nonsensiques à la Cary Grant et Katharine Hepburn ; derrière les lunettes d’Harold Lloyd, des techniques tout ce qu’il y a de plus moderne !

Et puis, surtout, zéro cynisme à l’horizon… mais l’innocence (presque) retrouvée des premières fois.

08/2020

Spy Game - Jeu d'espions
6.4

Spy Game - Jeu d'espions (2001)

Spy Game

2 h 06 min. Sortie : 9 janvier 2002 (France). Action, Policier, Thriller

Film de Tony Scott

Toshiro a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Quand Robert Redford adoubait Brad Pitt devant la caméra d’un Tony Scott héritier du cinéma de complot des 70’s…

On dit que, pour ce film, Brad Pitt aurait laissé filer le rôle de Jason Bourne… Vraie ou fausse, l’anecdote dit quelque chose de l’acteur : son goût pour les personnages dégageant une certaine aura de mélancolie, alimentée par le contraste entre cette gueule d’ange et ce style de jeu minéral, et sa fidélité à ses pairs de cinéma. Outre David Fincher son pygmalion donc : Ridley et Tony Scott pour lui avoir fait faire ses débuts, et Robert Redford pour l’avoir désigné comme son héritier.

Or d’héritage, il en est encore question ici ! Puisque Robert Redford y reprend d’une certaine manière ses célèbres rôles des Trois jours du Condor et des Hommes du président, comme pour passer le flambeau, 25-30 ans après, d’un cinéma hollywoodien engagé et critique des institutions américaines. Spy Game annonce en effet le cinéma dit « post-11 septembre »…. mais n’a pas non plus besoin de ça pour être un « must-see » !

Trouvant un joli point d’équilibre entre expérimentation, lyrisme et glamour hollywoodien, feu Tony Scott signait là un film d’espionnage à part, centré sur l’humain au cœur du système, le bug dans la machine. En prime : la magnifique partition d’Harry Gregson-Williams, entre inspirations orientales, effets électro, instrumentations plus classiques et voix de solistes à vous arracher le palpitant.

09/2020

Hulk
4.6

Hulk (2003)

2 h 18 min. Sortie : 2 juillet 2003 (France). Action, Science-fiction

Film de Ang Lee

Toshiro a mis 8/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

Le lointain cousin très vert et très en colère de Tigre et dragon ?

Il y a des films qui semblent être nés sous une mauvaise étoile. Coincé entre deux projets « à oscars » dans la carrière versatile de son auteur, c’est peu dire que le Hulk d’Ang Lee est une anomalie. Ang Lee, Monsieur Tigre et dragon, à la tête d’un film Marvel ? Mais quelle idée ? !! Et le film, à moitié expérimental par-dessus le marché, de n’avoir jamais vraiment trouvé son public…

Pourtant, s’il est une version du géant vert qui mérite la réhabilitation, c’est bien celle-ci ! Elle qui déchirait l’écran blanc en 2003, quand le genre super-héroïque n’était pas encore standardisé. Résultat : un véritable monstre de Frankenstein cinématographique, bouffant à tous les râteliers, des plus nobles (tragédie grecque, Jekyll et Hyde, La Belle et la Bête) aux plus bis (séries B des années 50, perles du cinéma de Hong Kong type Zu, les guerriers de la montagne magique), mais toujours avec des airs d’enfant sauvage… et magnifique. Sans parler de cette ambition : traduire par l’art du montage la chorégraphie des vignettes de comics !

09/2020

La Scandaleuse de Berlin
7

La Scandaleuse de Berlin (1948)

A Foreign Affair

1 h 56 min. Sortie : 22 avril 1949 (France). Comédie

Film de Billy Wilder

Toshiro a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Comment Hollywood a dénazifié Berlin (par Billy Wilder)

1948. En ruine et (presque) entièrement dénazifiée, Berlin tente vaille que vaille de se refaire une santé… Dans le secteur d’Oncle Sam, on a la solution : l’amour libre et la cigarette (dans l’ordre qu’il vous plait). Rien de tel en effet pour rééduquer une population aux bienfaits du capital…, pardon, de la démocratie ! Et formule magique dont la candide Jean Arthur, tout droit sortie de Mr. Smith au Sénat, va pourvoir vérifier les effets…

L’idéalisme américain à la Frank Capra, revu et corrigé par la grinçante plume de Billy Wilder, satiriste hors pair et ex-berlinois lui-même : la voilà, la vraie formule magique de cette si délicieuse et méconnue comédie ! Sans parler de ce doux parfum de scandale nommé Marlene Dietrich, reprenant presque 20 ans après son rôle de L’Ange bleu.

Programme tout sauf innocent pour l’époque donc, mais enroulée dans la plus belle des étoffes, puisque celle qui aura fait l’Âge d’or du cinéma hollywoodien. Soit tout le charme du classicisme marié à un certain un art de la contrebande (dixit Martin Scorsese).

10/2020

À la poursuite de demain
5.7

À la poursuite de demain (2015)

Tomorrowland

2 h 10 min. Sortie : 20 mai 2015 (France). Aventure, Science-fiction

Film de Brad Bird

Toshiro a mis 8/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

Il faut cultiver son lendemain

Tic-tac, tic-tac. C’est l’horloge de l’apocalypse. Quelle heure est-il ? Non de Zeus ! Minuit moins une. Et boom ! Rideau. La fête est finie…. Enfin sauf si on s’appelle Brad Bird, optimiste radical et immense raconteur d’histoires ayant déclaré la guerre au principe de réalité. Autant dire, à l’époque de tous les effondrements, un rebelle ! 

Résultat ici ? Un pur bonheur de cinéma, au rythme endiablé et gags tous azimuts. En fait l’œuvre d’un oiseau rare et monstre de perfectionnisme n’ayant pas volé sa place parmi les têtes d’ampoule de chez Pixar (Les Indestructibles ? Ratatouille ? c’est lui !). Mais aussi une fable qui aura su capter comme personne l’esprit de son temps… pour mieux lui dire ses quatre vérités.

Écrit à quatre mains avec Damon Lindelof (The Leftlovers, Watchmen, la série), À la poursuite de demain dresse en effet le portrait d’un imaginaire collectif - le nôtre - ayant virer à la mauvaise pub à force de bégayer le même futur cauchemardesque depuis près de 40 ans. Et ce jusqu’à le rendre acceptable, consommable, voire même désirable…

Interrogeant au passage les héritages d’Ayn Rand, Walt Disney ou encore John F. Kennedy, voilà donc un film qui, derrière ses faux airs de propagande disneyenne, pose en fait cette question tout sauf non-essentielle : que faisons-nous de nos utopies ?

11/2020

Prospect
6.1

Prospect (2018)

1 h 38 min. Sortie : 2 novembre 2018 (Canada). Science-fiction, Western

Film de Zeek Earl et Christopher Caldwell

Toshiro a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Dans l’espace, le précieux minerai ne cessent de briller…

On ne compte plus aujourd’hui les dérivés d’Alien. Vous savez, ces films d’horreur/SF avec une méchante bébête un rien lassante à force de reproduction en série... Et bien c’est au milieu de cette jungle-là, ni vu ni connu (puisque directement sur le marché de la vidéo), que débarque Prospect !

Enième progéniture, certes, mais avec l’idée qui change tout : évacuer le monstre du film original pour mieux creuser son contexte. Soit la conquête spatiale vue comme nouvelle ruée vers l’or, avec ses convois de minerais, prospecteurs et autres pionniers de l’ultime Frontière.

Retour au western donc, mais sous scaphandre, avec pour guide un Pedro Pasqual le visage comme toujours sous pression. Et puis surtout sa fille, ado dont le récit d’apprentissage rimera avec « débrouille-toi-toute-seule-sur-une-lune-à-l’atmosphère-toxique-comme-une-grande ! »

Bref. De la SF minimaliste comme on l’aime, avec de l’idée et une sérieuse plus-value sur la production !

11/2020

Faux-semblants
7.3

Faux-semblants (1988)

Dead Ringers

1 h 56 min. Sortie : 8 février 1989 (France). Drame, Épouvante-Horreur, Thriller

Film de David Cronenberg

Toshiro a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Et si l’on faisait passer le test de Rorschach à Ozymandias ?

1988. À peine sorti de l’expérience La Mouche, David Cronenberg trouve dans un étrange fait divers (l’histoire de jumeaux synchrones jusque dans le suicide) l’inspiration d’une nouvelle tragédie monstre. Et qui mieux que le trop rare Jeremy Irons pour incarner la chose avec ce qu’il faut de trouble, entre identité et altérité, mélo et horreur ?

C’est que, dans le double rôle des frères Mantle, les gynécos un rien barjo, l’acteur pratique la mutation à même le plan ! D’un côté Elliot le yuppie, pure surface cosmétique annonçant avec 30 ans d’avance Adrian Veidt (son personnage dans la série Watchmen) ; de l’autre Beverly l’introverti, pratiquant son art (de brute) littéralement in utero…

Un effet très spécial en somme, à travers lequel se devine une relation fusionnelle jusqu’à l’overdose : son équilibre initial dans la répartition (et l’échange !) des rôles ; son déséquilibre avec l’introduction d’un tiers féminin ; puis sa révolution, dans tous les sens du terme.

Bref, sur le billard de Tonton Berg, on n’a pas attendu A Dangerous Method pour jouer à Dr Freud et Mr Jung !

12/2020

Dead Man
7.5

Dead Man (1995)

2 h 01 min. Sortie : 3 janvier 1996 (France). Aventure, Drame, Fantastique

Film de Jim Jarmusch

Toshiro a mis 9/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Une ballade hallucinée en compagnie d’un mort qui s’ignore et de son truculent guide vers l’au-delà, ça vous dit ?

Voilà un road movie qui, entre sketchs absurdes et trip au peyotl, vous plongera dans une drôle de torpeur. Cela dit, à moins de succomber sous l’effet de son rythme… disons somnambule, le voyage vaut vraiment la peine d’être vécu !

Car Jim Jarmusch, pour son sixième long métrage, a quelques arguments massues à faire valoir. À commencer cet improbable duo : d’un côté l’ahurie William Blake, « stupid fucking white man » se découvrant poète après s’être fait troué la peau (Johnny Depp) ; de l’autre l’indien Nobody, guide spirituel pour le moins iconoclaste et réponse vivante à tous les clichés racistes (Gary Farmer).

Et puis, il y a ce superbe noir et blanc signé Robby Müller, cette BO portée la seule guitare électrique de Neil Young, ou encore toutes ces gueules de porte bonheur : Crispin Glover, Iggy Pop, Robert Mitchum, Lance Henriksen, John Hurt, Michael Wincott, Alfred Molina, etc.
Et pour finir, cette approche iconoclaste du western : véritable contre-histoire de l’Ouest singeant les  poncifs du genre pour mieux les réécrire sur un mode macabre et surréaliste.

Bref, une perle !

01/2021

Le Lion et le Vent
6.9

Le Lion et le Vent (1975)

The Wind and the Lion

1 h 59 min. Sortie : 17 décembre 1975 (France). Aventure

Film de John Milius

Toshiro a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Sean Connery en sympathique précurseur du terrorisme islamiste sous le regard enfantin d'un John Milius autoproclamé anarchiste zen !

Le laïus de L'inspecteur Harry et son gros 44 Magnum, le récit par Quint des naufragés de l'USS Indianapolis dans Les Dents de la mer, les scénarii à l'origine de Jeremiah Johnson et Apocalypse Now, la mue d'un chêne autrichien en Conan le Barbare... : autant de prodiges dus à un seul homme !

Qui ça ? John Milius, par Crom ! Scénariste star des 70's, mais aussi gros nounours amateur de surf et d'armes à feu, grand copain de Steven Spielberg et George Lucas, et lecteur avisé d'Homère, Kipling, Conrad ou encore Nietzsche. Un vrai personnage donc, avec lequel cette superbe édition du Lion et le Vent - et son passionnant livret ! - , vous permettra de faire plus ample connaissance.

Et il fallait bien ça pour sortir des oubliettes ce truculent film « à la Lawrence d'Arabie » ! Où la libre relecture d'un fait divers historique en aventure romanesque est prétexte à un duel à distance entre El-Raisuli le Magnifique et Theodore Roosevelt, pastiches modernes de Saladin et Richard Cœur de Lion ! Une œuvre picaresque au charme on ne peut plus désuet en somme, et ce déjà en 1975.

Mais comme disait Jacques Chirac, « être dans le vent, c'est un peu avoir un destin de feuille morte, non ? » Et puis, comment résister à l'accent écossais d'un chef berbère incarné par feu Sean Connery ? Ou à cette partition - à vous donner envie de couper des têtes au cimeterre ! - signée Jerry Goldsmith ?

02/2021

Onibaba, les tueuses
8

Onibaba, les tueuses (1964)

Onibaba

1 h 45 min. Sortie : 29 janvier 1966 (France). Drame, Épouvante-Horreur

Film de Kaneto Shindō

Toshiro a mis 9/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Lutte des classes, révolution sexuelle et démo(Nô)logie dans le Japon des 7 samouraïs, ou presque...

Au titre de Graal parmi les trésors les plus convoités de la cinéphilie, voici un sérieux candidat ! J’ai nommé Onibaba – les tueuses, relecture expressionniste et ô combien percutante d’une fameuse figure du folklore japonais, au croisement de la parabole bouddhiste et du théâtre Nô.

Soit l’histoire d’une gueuse et de sa bru survivant dans un torride marais en trucidant puis dépouillant du samouraï égaré ! Une affaire qui roule comme souffle le vent dans les roseaux… du moins jusqu’à l’intrusion d’un mâle et turgescent objet du désir... Un peu comme dans le monastère du Narcisse Noir, si vous voulez, mais les pudeurs de none en moins et un démon tout droit sorti de l’enfer en plus !

Le petit diable à la manœuvre derrière ce concentré de cinéma nippon typique 60’s ? Un certain Kaneto Shindō, cinéaste de la Nouvelle Vague locale dont le reste de la filmographie, à l’exception notable de L’île nue, demeure malheureusement quasi invisible en Occident. Là où ses sulfureux contemporains, Nagisa Ōshima, Shōhei Imamura ou encore Seijun Suzuki, ne sont plus à présenter.

Deux films à rattraper d’urgence donc ! Et pourquoi pas en double programme télescopant moyen-âge et après-guerre. Occasion d’apprécier l’éternel retour des crèves-la-faim dans l’Histoire comme du pulsionnel chez l’Homme – et la Femme, hein, pas de jaloux à ce niveau-là...

04/2021

Le Gang Kelly
6.2

Le Gang Kelly (2019)

True History of the Kelly Gang

2 h 04 min. Sortie : 5 décembre 2020 (France). Action, Biopic, Policier

Film de Justin Kurzel

Toshiro a mis 7/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

Ned was a Punk.

Quel rapport entre le mouvement punk, la théorie queer et Ned Kelly, le plus célèbre hors-la-loi australien ? Dans les faits, aucun. Sous le regard de Justin Kurzel, de retour au pays des kangourous après s'être laissé mettre en boîte par Ubisoft (le triste Assassin's Creed) : une certaine idée de la rébellion. Du moins avant de se voir transformée en figure pop... puis en marque de gâteaux... ou aimant à frigo...

De là cette « vraie histoire du gang Kelly [où] rien de ce que vous allez voir n'est vrai » - dixit le carton d'ouverture. Comprenez par là que tout l'objet de cette libre adaptation du roman de Peter Carey est de questionner l'identité paradoxale du rebelle élevé au rang d'icône. Comment ? Par une relecture à la première personne où le Jesse James ozzie se débat, non plus seulement avec l'ordre colonial britannique, mais aussi avec sa propre légende en marche, dans le même genre de relation toxique avec son image publique qu'avec mère et pairs.

Résultat : un post-western à la narration retorse et la forme instable, entre naturalisme cru et anachronismes assumés, impros explosives et esthétique « glam-grunge ». Un art du composite résumant tout le conflit intérieur de l'anti-héros : son destin d' « artiste » à la Bronson et sa quête de soi à la frontière de toutes les genres. Sans parler de ces nombreuses expérimentations visuelles - épileptiques et phobiques du sang s'abstenir ! Ou de ce casting de choix : George MacKay, Essie Davis, Russel Crowe, Thomasin McKenzie, Charlie Hunnam, Nicholas Hoult...

Soit tous les ingrédients réunis pour une nouvelle exploration du masculin et ses troubles par l'auteur des Crimes de Snowtown et Macbeth. Et puis, au passage, une nouvelle preuve après The Nightingale (Jennifer Kent), Le Roi (David Michôd) ou encore Relic (Nathalie Erika James) de l'excellente santé du cinéma des antipodes.

05/2021

Sorry to Bother You
6.7

Sorry to Bother You (2018)

1 h 51 min. Sortie : 30 janvier 2019 (France). Comédie, Fantastique, Science-fiction

Film de Boots Riley

Toshiro a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Quelque part entre Get Out, Network et Le Loup de Wall Street, une farce méchamment drôle sur la lutte des classes et l’économie du slogan à l’heure du personal branding et du capitalisme 2.0 !

C’est l’histoire de Cassius Green, Afro-Américain d’Oakland - patrie des Black Panthers - et en tant que tel parfait loser du rêve US. Or son nouveau bullshit job, téléprospecteur chez RegalView, consiste justement à vendre du rêve en jouant les spams vivants, puisqu’à chaque appel catapulté dans le salon même de ses cibles… La solution ? User de sa « voix de Blanc » : arme fatale sur la voie de la Win et début des ennuis pour l’antihéros sitôt bombardé… briseur de grève.

Dans la peau du vendu : l’excellent Lakeith Stanfield, sorte de nouveau Pierre Richard révélé dans toute sa nonchalance par Atlanta, la fameuse série de Donald Glover. À ses côtés, une ribambelle de personnages tous plus barrés les uns que les autres : Tessa Thompson en social justice warrior des galeries d’art pour hipsters (vous allez adorer sa garde robe) ; Armie Hammer en gourou de la Silicon Valley « à cheval » entre esclavagisme et transhumanisme ; ou encore Steven Yeun en piquet de grève rêvant de dé-zombifier les masses américaines – mais oubliant au passage la capacité de récupération du système.

Bref, de quoi nourrir une hilarante satire politique, volontiers surréaliste et tirant sur tout ce qui bouge. À commencer par le mythe du self-made man, l’Empire de la Com et la plateformisation du travail. Et si la morale de la fable est classique, le regard de Boots Riley, pour son premier film, est des plus acérés. En témoignent son sens de la vignette digne des meilleurs dessins de presse, ou cette façon de saturer le cadre de couches et de couches de sous-texte.

Une véritable curiosité en somme. Et d’autant plus que s’y exprime sans gants ni excuses un marxiste revendiqué - oui oui, à Hollywood ! Autant dire un greemlin récitant du Malcolm X en plein Disneyland...

06/2021

The Nightingale
7

The Nightingale (2018)

2 h 16 min. Sortie : 9 mars 2021 (France). Drame, Aventure, Thriller

Film de Jennifer Kent

Toshiro a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Attention : leçon d'histoire et de cinéma à ne pas mettre devant tous les yeux !

S'il fallait trianguler ce deuxième long-métrage de Jennifer Kent, on le situerait sans doute entre Utu, Requiem pour un massacre et Detroit. Du méchamment violent donc, mais tout sauf pour le plaisir de choquer pour choquer. C'est que, après avoir fait exploser la charge mentale d'une mère dépassée par son greemlin de fils (Mister Babadook), la cinéaste s'attaque ici à un autre sujet tabou : les racines génocidaires de l'Australie !

Prenant place dans la colonie pénitentiaire de Tasmanie en 1825 - autant dire l'enfer sur terre - , le film suit en effet le douloureux parcours d'une bagnarde irlandaise suite a son viol et au massacre de sa famille par des soldats britanniques. Un récit débordant bien vite les ornières du crapoteux « rape and revenge » : d'abord en faisant de la soif de vengeance de son anti-héroïne un abyme sans fond, jusqu'à la laisser complètement vidée, exsangue ; ensuite en la mettant face à son reflet de l'autre coté du miroir : un guide aborigène de prime abord méprisé, puis se révélant progressivement son seul allié.

L'occasion pour Jennifer Kent de filmer la mécanique de l'oppression comme déchirement des corps, fabrique du monstrueux et atomisation du collectif. Avant de finalement poser la seule question essentielle : celle de l'après... Le tout avec une certaine éthique du regard : soit en filmant la violence de la façon la plus frontale possible, certes, mais toujours à travers le regard des victimes, refusant ainsi au spectateur toute complaisance ou exutoire cathartique. Approche qui n'aura évidemment pas fait l'unanimité...

Primé en 2017 à la Mostra de Venise, mais aussi copieusement éreinté et privé de sortie en salle en France, le film n'est ainsi visible chez nous que depuis 2021, directement en VOD. Un bien triste sort au regard du courage et de l'intégrité de ses auteurs. Sans parler de puissance émotionnelle, picturale, ou du travail d'incarnation des acteurs, et notamment la prometteuse Aisling Franciosi.

07/2021

First Man - Le Premier Homme sur la Lune
7.1

First Man - Le Premier Homme sur la Lune (2018)

First Man

2 h 21 min. Sortie : 17 octobre 2018 (France). Biopic, Drame

Film de Damien Chazelle

Toshiro a mis 9/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

La La Moon...

Quand le jeune prodige à l'origine du phénomène La La Land se met en tète de décrocher la lune, ça donne quoi ? Un autre phénomène ? Peut-être pas. Mais un petit bijoux de cinéma sensitif et musical, ça oui !

C'est l'histoire de Neil Armstrong (Ryan Gosling), mais attention ! Pas n'importe quel Neil Armstrong, aussi documenté ce biopic soit-il. Un Neil Armstrong intime, peu à l'aise avec son image publique et qui, frappé par le deuil jusqu'à dangereusement flirter avec l'asociabilité, n'aura trouvé d'autre voie que celles des étoiles pour déclarer l'infinité de son amour à sa fille perdue...

Un crève-cœur magnifique, où introspection silencieuse rime avec fibrillations des morceaux de ferrailles s'arrachant non sans mal à l'attraction de la Terre-mère. Interviennent alors montage et musique, l'un servant de partition à l'autre, et leur fusion de stabilisateur à un climax sélénique constituant l'une des plus sublimes expériences audio-visuelles que nous ait offert le cinéma depuis belle lurette. Voui, voui, sublime !

La formation musicale de Damien Chazelle n'y est sans doute pas pour rien. Et son fidèle compositeur Justin Hurwitz, usant notamment de la harpe et du thérémine, de signer un monstre de bande originale à la fois épique et à fleur de peau ! C'est bien simple, après avoir vu/écouté ça, on croit nager dans la mer de la tranquillité.

08/2021

Ninotchka
7.7

Ninotchka (1939)

1 h 50 min. Sortie : 3 avril 1940 (France). Comédie romantique

Film de Ernst Lubitsch

Toshiro a mis 8/10.

Annotation :

Une soviet au royaume des mangeurs de grenouilles

Elle a des airs de terminatrice, pure produit de la bureaucratie soviétique élevée au lait de chèvre et à grand coups de Kapital (de Karl Marx) sur l'occiput ; lui est un vil hédoniste, né avec une cuillère en argent dans le bec et fusillant tout esprit de sérieux au bouchon de champagne – et pop, mdr ! La matriochka rouge révolution d'un coté, le col blanc cueillant les conquêtes d'un soir comme le jour de l'autre : ils étaient fait pour se rencontrer. Et pourquoi pas, quitte à faire valser les clichés d'opérette, dans un Paris de carte postale ?

C'est la lubitsch's touch, dit-on : cette infiltration d'une certaine ironie européenne, véritable agent double, dans la prude machine hollywoodienne des années 30. La recette ? Brouiller les identités et glisser du sous-entendu sexuel au quatre coins du cadre. Et puis, surtout, sourire de tout : d'un trio d'agent communistes se laissant séduire par Mammon le grand BlingBling, d'un « Heil Hitler ! » anticipant le Pacte germano-soviétique, d'un sang bleu en pleine déconfiture, des jeux d'argent et de séduction, ou encore de toutes ces portes qui s'ouvrent et se referment comme on jouerait à « pas-vu-pas-pris » avec les censures de tout poil. Billy Wilder, ici scénariste en apprentissage, s'en souviendra...

Le tout au service d'une délicieuse « comédie de remariage » des humanités à l'ombres les drapeaux au garde à vous. Véritable classique dont l'exploit, et non des moindres, aura consisté à fendre le masque de la vamp Greta Garbo. Ou comment pécher une étoile en la faisant littéralement éclater de rire ! Et comme un prélude au non moins délicieux To be or not to be...

09/2021

Toshiro

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