Sérieusement ? C'est ça le chef-d’œuvre ?

Non, ce n'est pas le chef-d’œuvre de Shinkai. Je n'ai pas encore parcouru toute la filmographie du bonhomme que j'en ai déjà suffisamment vu pour vous assurer que non, ce film n'est pas son chef-d’œuvre.
Critiquons avec méthode, puisque selon Descartes, ça marche.
L'animation en premier lieu... je dois faire partie des rares ayant été déçus (je le répéterai tout au long de la critique : la presse m'a menti !). On m'a vendu un film aux qualités d'animation rarissimes, presque jamais vues et jamais égalées. Qu'est-ce que ça vaut, en tant que tel ? Eh bien... les décors sont magnifiques. Vraiment. Et même les détails (des dessins faits main, par exemple) sont sublimes. Les lumières sont bien pensées, les mouvements de caméra sont excellentissimes, et j'en passe des meilleures. Pour ce qui est des personnages, en revanche... ILS SONT MOCHES. Pour être honnête, c'est tout juste passable quand on les voit de près. Mais dès qu'ils sont de loin, le manque de détails et le manque d'expressivité est inacceptable pour un film d'animation de ce standard. L'animation des personnages est d'une qualité que les studios Ghibli n'ont jamais atteinte, par exemple, tant elle est médiocre.
La musique, par contre, est très bien. Vraiment. La bande-son est efficace, et les quelques thèmes chantés incrustés çà et là sont intéressants. Je n'ai pas l'oreille musicale assez fine pour étayer davantage ma critique, mais globalement, ça marche.
De même, les personnages sont bons. Le duo principal est même très bon. Ils sont intéressants, amusants, touchants et ont même certains moments très forts. Les personnages secondaires, s'ils n'ont pas le mérite d'être intéressants, sont au moins bien définis et participent activement à l'intrigue.
L'histoire est coupée en trois tiers. Le premier est très bon. Le concept que je ne vous spoilerai pas est bien pensé et arrive à ne pas tomber dans le slice of life classique. Mais c'est un concept qui ne tient pas un film pendant 107 minutes. Alors le film nous surprend avec un coup de théâtre à la fin de cet excellent premier tiers. Ce coup de théâtre est très bien fait, et nous invite à regarder un deuxième acte qui me plaît peut-être un peu moins, mais qui est très bon en lui-même. Mais le dernier acte suffit à faire baisser nettement les qualités scénaristiques du film qui s'en sortait très bien jusque-là. Ce dernier tiers est incompréhensible, et mal écrit. Sérieux.

J'ai été avec des amis au cinéma et aucun d'entre nous n'a compris. C'est quand même dire ! Par ailleurs, Shinkai lui-même a avoué qu'il avait manqué de budget pour faire le film qu'il s'était imaginé. Cela peut expliquer de tels défauts.

En bref, je ne suis pas tout à fait convaincu par ce film. Son animation est loin d'être aussi bonne qu'on le dit (sinon les décors absolument sublimes) et son histoire, si elle est très bien pendant la plus grande partie du film, finit par devenir incompréhensible et peut-être incohérente. Je dirais que ce film est correct, mais je ne dirais même pas que ce film est bon. C'est un film qui rentrera dans l'Histoire, mais au même titre qu'Autant en emporte le vent : rien de plus qu'un long-métrage dont on se souviendra pour des qualités qu'il n'a pas (même si Kimi no na wa est à mille fois meilleur que Gone With the Wind, puisque lui est capable de camper des personnages attachants et une histoire d'amour intéressante).
Ce film, lors de sa sortie, est arrivé premier aux box-office au Japon. Le deuxième est A Silent Voice, un film dont j'ai rédigé une critique pour ceux que ça peut intéresser et qui, lui, est véritablement un chef-d’œuvre (sans pour autant dire que c'est le "nouveau Miyazaki" ; pas que ce soit moins bon, mais si on fait semblant de s'y intéresser, Miyazaki a une esthétique plus proche de Disney que de ses contemporains japonais).
Quant à Shinkai, il a fait quelques travaux intéressants : The Garden of Words, ou Silent Voices of a Distant Star sont bien meilleurs. J'ai une préférence pour le dernier même s'il est visuellement du niveau de Gakuen Handsome... C'est peu dire.