Tarantinesque et dégénéré avec ses plans qui percent la rétine pour grignoter vos nerfs optiques, The Suicide Squad est certainement la comédie d'action la plus inspirée qu'il m'ait été donné de voir depuis des lustres, la plus gore aussi. Et pourtant, il ne prétend jamais être autre chose que de la série B qui tache comme un picrate laissé au soleil l'été, l'ivresse est d'autant plus belle qu'inattendue.


Sorti manu militari du carcan "Marvel disney" après le succès des Guardiens de la galaxie 2 pour une série de vieux tweets… Gunn a instantanément été repêché par "DC Warner" qui lui a donné carte blanche ou peu s'en faut. Si comme moi vous avez la sensation que choisir Marvel ou DC se limite depuis quelque temps à simplement sélectionner la couleur de son action man (rouge ou beige), The Suicide Squad vient heureusement apporter du sang neuf, beaucoup même : il en va d'une bourinnade inspirée d'un réalisateur débridée. Cette pellicule ne sacrifie rien ou presque aux codes du film de super héros tel qu'ils se conçoivent depuis 15 ans pour parler bien plus à l’amateur de Brain Dead qu’au fan de Superman. Moins référencé et plus maîtrisé qu’un Deadpool ou que les séries The Boys ou Invincible par exemple, le film aime son public et ça se sent, il est parfait pris isolément et même meilleur ainsi.


De l'accident industriel conduit par David Ayer en 2016, James Gunn n'a également rien repris si ce n'est quatre personnages qui ne feront jamais référence à leur indigne prédécesseur. Rare cas où une suite oblitère l'existence d'un numéro 1, mais avec une ascendance aussi cataclysmique, on lui pardonne, voire on l'encourage. Même Harley Quinn (Margot Robbie) devient enfin le personnage irrévérencieux et fascinant que l’on nous vendait en vain depuis deux films, c’est dire !


Partant de là, de zéro donc, James Gunn va piocher dans le film d'action américain des années 80 en apportant un souffle nouveau grâce à ses bonshommes en collants. S'il ressemble à quelqu'un, ce serait bien au premier Expandables (Stallone est d’ailleurs de la partie), hommage également à cette époque où Hollywood sortait les muscles pour soutenir l'ego d'une Amérique post-Vietnam. Le film évite ainsi l'écueil de nombreux Marvel : la comédie n'enlève rien aux enjeux car elle ne réside pas seulement dans des dialogues comiques (coucou Thor 3). The Suicide Squad affiche au contraire un humour noir féroce en toute circonstance (culminant dans la séquence avec les rebelles) à travers des personnages cyniques, graveleux, frappés chacun à leur manière, mais prenant au final les situations au 1er degré tout en demeurant assez fragiles : difficile de dire qui s'en sortira vivant - sauf pour celle qui a encore 2 ou 3 films en route.


Pour peu que l'on sache un minimum ce que l'on va voir, c’est à dire pas vraiment un Rhomer, on ne s'ennuie pas, on en prend plein les yeux dans une série de plans inventifs et généreux. On jubile de voir le scénario offrir de grandes pirouettes tout en retombant sur ses pattes (le running gag du héros obsédé par sa mère est tout simplement excellent).


Le réalisateur James Gunn pousse encore plus à fond le pari des Guardiens de la Galaxie qui était de réécrire une team méconnue du grand public sauce Troma, le sulfureux studio de Lloyd Kaufmann spécialisé dans la série B trash dans lequel Gunn a fait ses classes. Sauf que cette fois, il le fait avec la Warner qui prend le risque de ne pas sortir un film tout public, et le résultat n’en est que plus grandiose au sein du goulbi-goulba édulcoré (pour ne pas dire chiant) du blockbuster d’action moyen. On conseille, surtout si vous avez détesté le premier.

Cinématogrill
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 29 juil. 2021

Critique lue 346 fois

6 j'aime

1 commentaire

Cinématogrill

Écrit par

Critique lue 346 fois

6
1

D'autres avis sur The Suicide Squad

The Suicide Squad
Sergent_Pepper
6

Gore to the picture

Pour être la première puissance mondiale, il faut forcément être plus malin que les autres. Ça pique un peu de l’admettre, mais c’est un cercle vertueux - ou vicieux, selon le point de vue adopté :...

le 7 août 2021

71 j'aime

1

The Suicide Squad
Behind_the_Mask
8

Des n'oeil plein les étoiles... Ou l'inverse

C'est fou ce que l'ajout d'un seul mot dans un titre peut tout changer. Car en 2016, Suicide Squad, c'était le fond du panier du film de super. Tandis que, comme d'hab' quand il s'agit de mauvais...

le 28 juil. 2021

62 j'aime

9

The Suicide Squad
Ketchoup
10

Ratatouille, au rapport!

Yeah! Trop content! C'est vraiment fou l'expérience que l'on vit avec le cinéma à mesure que les années défilent. D'abord, avec Justice League, en 2017, j'étais abasourdi en sortant de la salle de...

le 28 juil. 2021

44 j'aime

19

Du même critique

Room
Cinématogrill
5

La fin de l’innocence

8,3/10 sur l’imdb, 86% sur métacritique, 94% sur rotten tomatoes, 5 nominations pour un oscar et 7,7/10 sur sens critique à l’heure où j’écris cet article : Room à première vue apparaît comme un...

le 11 mars 2016

56 j'aime

The Florida Project
Cinématogrill
5

Question ouverte au réalisateur : où est le scénario ?

Sean Baker est à la limite de l’artiste contemporain et du cinéaste. Ultra engagé, il s’est fait connaitre après le micro exploit de réaliser en 2015 Tangerine, entièrement tourné avec trois...

le 19 déc. 2017

37 j'aime

5

Thunder Road
Cinématogrill
5

Bonjour tristesse...

J’ai sérieusement conscience d’aller à contre-courant de la perception que semble avoir le monde entier de ce film plébiscité (à part une partie de la presse française spécialisée) mais...

le 13 sept. 2018

28 j'aime

5