La première réaction à avoir face à l’exotisme est celle de l’ouverture d’esprit. Quoi de plus riche que de se frotter au rythme étrange du cinéma asiatique, à l’hystérie du Japon contemporain, à la nonchalance africaine ou l’intensité russe ? Découvrir une autre culture suppose avant tout d’accepter de revoir sa propre grille de lecture : on n’analysera pas les rapports humains de la même manière chez Bergman, Tarkovski ou Fellini, de la même manière que leurs esthétiques respectives sont aussi à contextualiser dans une nation ou une époque pour déployer toutes leurs intentions.


Aborder ce film de Kim Ki-duk implique donc cette posture : une autre culture, une certaine spiritualité, un goût affirmé pour l’apologue justifient sans doute ce qui peut paraitre extrêmement simpliste.


Qu’on en juge : une maison au milieu d’un lac, une barque qui sépare de la civilisation, un enfant disciple d’un maitre qui corrige l’excès de ses passions, des saynètes mécaniques alternant entre expérience et leçons, le tout verni par une photographie qui nous donne le sentiment de tourner les pages d’un éphéméride édité par Géo Magazine.


Tout est joli, presque muet, et on pourrait un temps penser à L’île nue de Shindo si l’on avait oublié la cruauté existentielle autrement plus prenante de cet autre conte.
Le problème n’est pas l’ennui ou la gratuité de la contemplation, le passage des saisons occasionnant des poncifs toujours aussi seyants à mesure que l’enfant grandi, se trompe, et apprend ; c’est plutôt dans la linéarité, annoncée dès son titre comme cyclique, qui confirme rapidement qu’on va, en accumulant les évidences et le pessimisme bon marché sur la corruptibilité humaine, tourner en rond.


Le film n’est donc pas mauvais : la photo est très belle, le propos universel, même s’il semble tout droit sorti des livres de life achievement qui rassurent certains, pensant que les portes ouvertes, quand elles sont enfoncées à l’écrit, se parent soudainement d’une épaisseur philosophique sans pareille.


Alors voilà : on peut passer devant ce film comme dans la boutique de Nature et Découverte, cette petite alcôve se présentant comme un bol d’air au sein d’un centre commercial dédié à la consommation de masse : ça sent bon, la lumière est tamisée, les petites fontaines créent l’ambiance, mais ça reste destiné à vendre une ambiance fabriquée de toute pièce.

Sergent_Pepper

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