Premier opus de la fameuse trilogie du dollar, "Pour une poignée de dollar" est le film séminal d'un nouveau genre cinématographique : le western spaghetti, initié par Sergio Leone, qui s'était auparavant spécialisé dans le péplum, et qui décide de délocaliser ses histoires de l'Antiquité vers le Far West.


Les codes du western traditionnel, sur le déclin, sont modernisés et évoluent radicalement : désormais les valeurs traditionnelles fondatrices de la nation américaine ne sont plus glorifiées, au profit de l'individualisme et de l'anarchie. Le western spaghetti fait ainsi la part belle à la violence la plus outrancière, aux pulsions sexuelles et à l'humour noir, qui se substituent le plus souvent aux mythes de l'Ouest et à la lutte du bien contre le mal.


Outre cette dimension originelle, "Per un pugno di dollari" (en VO) se distingue surtout par le charisme de son héros (incarné par Clint Eastwood), la bande originale lyrique d'Ennio Morricone et la mise en scène de Sergio Leone, qui multiplie les gros plans sur les mimiques faciales, et alterne quelques séquences mémorables (le massacre des Baxter sortant de la maison en feu) avec certains passages obligés (le duel final).


En revanche, le scénario se révèle malin (parallèle entre la guerre Mexique-Etats-Unis et la ville de San Miguel, qui personnifie le conflit localement) mais loin d'être inoubliable, et surtout peu vraisemblable.
Les évènements se goupillent en effet exactement comme "l'homme sans nom" les avait prévus, à l'instar de la séquence du cimetière, à l'issue improbable ; on peut aussi se demander pourquoi l'affrontement entre les deux clans durait depuis si longtemps, puisqu'il était visiblement si facile pour les uns de se débarrasser des autres...


Quoi qu'il en soit, on passe un bon moment devant ce premier western spaghetti de Sergio Leone, remake officieux d'un film de sabre de Kurosawa ("Yojimbo"), à vocation populaire et d'esprit généreux, qui s'appuie sur la présence mutique et ténébreuse du grand Clint, et sur la violence exacerbée de Gian Maria Volonté pour offrir un divertissement sympathique, précurseur des chefs d'œuvre à venir.

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le 30 mai 2016

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Val_Cancun

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