C'est en 1946 que le jeune Leone entre dans l'industrie cinématographique. Par la petite porte mais dans un grand film. Il devient assistant bénévole sur « Le voleur de bicyclette » de Vittorio De Sica. Il joue même un petit rôle dans le film, celui d'un prêtre muet. Une expérience qui, après les quelques apparitions qu'il aura fait pour son réalisateur de père, Vincenzo Leone, le convainc que sa place n'est pas devant la caméra.

Il fait son apprentissage comme assistant réalisateur sur plusieurs dizaines de films dont quelques grosses productions américaines tournées dans la botte à l'époque. Comme « Quo Vadis » ou « Ben Hur ».
C'est pendant cette période qu'il rencontre pléthore de ses futurs collaborateurs. Le scénariste Luciano Vincenzoni, le monteur Nino Baragli et surtout le directeur de la photographie Tonino Delli Colli, qui ne seront pas étrangers à la facture visuelle unique, au rythme contemplatif où même le temps n'a plus son mot à dire et à la charge émotionnelle de ses œuvres à venir.
Ennio Morricone et Sergio Leone étaient camarades de classe.
Il faut maintenant un navire pour cet équipage.

En 1964, traumatisé par le « Yojimbo » d'Akira Kurosawa, il en tourne sa version pour quelques poignées de Lires entre l'Espagne et l'Italie. Le film sortira au Japon sous le titre « Le retour de Yojimbo » suite au procès gagné par le réalisateur japonais à qui faut pas cherches des noises.

Un homme sans nom mais avec un poncho arrive dans un village déchiré par deux clans.

Histoire simple, prétexte à un conte brutal « Pour une poignée de dollars » sera un succès inespéré au box-office. Marqué par un style visuel suintant, s'attachant à des détails sordides en les filmant en gros plan et quelques panoramiques abracadabrantesques, Leone ne réinvente pas le western américain, il le prolonge.
Mais il invente Clint Eastwood.

Il transforme la grammaire filmique et nous fait contempler les derniers soubresauts d'un genre qu'il embellit d'un sens baroque de la réalité. Ses héros sont des crapules qui doivent plus à la Commedia dell'arte qu'à John Ford ou Anthony Mann.
Le héros Léonien sera un parasite qui profite de la situation. Poussiéreux, avare en paroles, il aime le pognon mais déteste l'injustice.
Il filmera les paysages propres au genre, mais ils seront désespérément vides ou il les mangera en collant la tronche d'un margoulin dégoulinant de sueur et de crasse mêlées au premier plan.

Artiste nostalgique, cinéphile maniériste, Sergio Leone redonne au genre une vitalité, un angle populaire tout en respectant le mythe. Mythe qui l'intéresse davantage, à l'instar de borgne Ford, que le « vrai » Ouest et son lot de tourments psychologiques qui phagocytent un genre moribond.

Le 30 avril 1989, à Rome, une crise cardiaque emporte Leone. Il regardait à la télévision le film de Robert Wise : « Je veux vivre! ».
DjeeVanCleef
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le 23 juil. 2014

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