Ridley Scott y laisse Napo

On n’est pas assuré, à la fin du film, de comprendre ce qui fît de Napoléon un si grand stratège et on doute de la rigueur historique de l’ensemble. En attendant, on a vu un divertissement imparfait mais de bon aloi.

Fresque spectaculaire, Napoléon s'attache à l'ascension et à la chute de l'Empereur Napoléon Bonaparte. Le film retrace la conquête acharnée du pouvoir par Bonaparte à travers le prisme de ses rapports passionnels et tourmentés avec Joséphine, le grand amour de sa vie.

Au moment d’écrire leurs papiers sur le film, la critique française a révisé son histoire de France. « Un Waterloo » a-t-on pu lire ici ou « une bérézina » a-t-on pu lire là. Les jeux de mots faciles ont couru. Sans être un Austerlitz, le film n’est pas aussi raté que la presse a voulu le dire. Tout d’abord, c’est un film qui a une belle ampleur et qui, malgré ces 2h38, n’ennuie pas une seule seconde. Car l’ensemble est bien rythmé et va assez vite.

Si l’ensemble va vite, c’est que Ridley Scott a su sélectionner les bons (et attendus) jalons (la bataille de Toulon qui le fit briller pour la première fois, le coup d’état, le sacre, Austerlitz, la campagne de Russie etc..). Pour lier le tout, plutôt que de choisir le paysage politique français, Scott préfère l’aspect intime. C’est-à-dire la relation entre Napoléon et Joséphine de Beauharnais. C’est un peu dommage, car cela nous prive d’un peu de contexte historique. En même temps, Joséphine est un personnage intéressant. Mariée une fois avant Napoléon, elle fût isolée et répudiée pour ne pas avoir été capable d’enfanter un héritier pour l’empereur.

Certains historiens se sont empressés de lister les erreurs historiques. Napoléon a-t-il assisté à la décapitation de Marie-Antoinette comme on le voit dans le film ? Non, d’après les experts. Mais est-ce vraiment important ? Le cinéma doit-il resituer à la lettre l’Histoire ou donner l’idée de ce qu’était une période ? Je pencherais plutôt pour la seconde idée. Peu importe qu’il ait assisté à l’exécution de Marie-Antoinette ou pas. Cette scène est importante pour comprendre le chaos politique qui régnait en France à l’époque.

N'oublions pas qu’il s’agit de l’histoire de France revisitée par Hollywood, laquelle a toujours pris beaucoup de liberté avec dans ces films historiques. Peut-être que la seule erreur vraiment problématique est d’avoir confié le rôle à Joaquin Phoenix. L’acteur américain, aussi talentueux soit-il et il est, a 49 ans et ne peut pas être Napoléon qui en avait 30 quand il est devenu premier consul. L’acteur a été pris pour les retombées commerciales, parce qu’il ressemble physiquement très très très vaguement à l’idée qu’on se fait de Napoléon. Ce qui a fait la renommée de Napoléon, c’est qu’il a eu cette série de grandes victoires, très jeune.

En fait, pour apprécier le film, il faut passer outre la véracité historique absolue. Il faut y aller en s’attendant à voir un pur divertissement, une ample fresque historique comme Hollywood en a beaucoup fait à une certaine époque (‘Lawrence d'Arabie’ de David Lean, ‘Reds’ de Warren Beatty). Car Ridley Scott est loin d’être un manchot. Les scènes de bataille sont assez époustouflantes, très graphiques.