Depuis sa présentation au Festival de Cannes cette année, tout a été écrit ou presque sur « Much loved », de l’incroyable aplomb de son sujet, des quelques images qui ont suffi a provoqué un tollé au Maroc, mais surtout, surtout de l’extraordinaire attachement ressenti pour ces jeunes femmes. « Much loved », c’est tout cela.


L’objectif au vitriol de Ayouch tape fort sur l’hypocrisie d’un système où la prostitution semble faire dans ce pays une « exception culturelle » pour certains. Il dénonce tout à la fois, les européens friands de tourisme sexuel. Ce n’est pas à proprement parlé une incrimination généralisée, juste des faits décrits, un autre aspect d’une réalité bien ancrée au Maroc (et pas que…). Certaines scènes sont crues de violence verbale ou physique. Et il faut un certain courage de la part du réalisateur pour évoquer en plus de la prostitution, l’homosexualité, la pédophilie, le conservatisme. Le tout en filigrane mais bien pointé tout de même.


De cette toile de fond, « Much loved » se construit autour de Soukaina, Noha, Randa et Hilma, quatre caractères, quatre manières d’appréhender la vie, le sexe. Unies dans leur « métier », elles le sont surtout dans la vie. Elles recomposent un noyau familial, où elles laissent libre court à leur insouciance, leurs railleries, leur exaspération, leurs souffrances. Elles se soutiennent mutuellement et peuvent exprimer cette douleur permanente, sous l’apparente futilité, que tous rejettent. Ce portrait de groupe avec dames, tout en sensibilité, frappe fort !


Nabil Ayouch est tout aussi imprégné de son film, que de ses actrices (toutes formidables). Et même si parfois certaines scènes « entre elles » sont un peu redondantes et trop étirées, on ne peut lui reprocher la générosité de son film qui réussit à capter l’âme de chacune. On ne les suit que quelques jours, Ayouch nous donne pourtant l’impression de les connaître depuis longtemps. Il créé la connivence avec le spectateur.


« Much loved » marque les consciences, quel qu’en soit le niveau. Par sa sincérité, sa simplicité cette histoire de femmes devrait rencontrer un large public. C’est tout le mal qu’on lui souhaite.

Fritz_Langueur
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le 23 sept. 2015

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