i(ch)Robot.

Metropolis était pour moi une curiosité. Je connaissais l'animé éponyme de Rintaro (très sympathique, soit dit en passant) et je savais que la version de Fritz Lang avait inspiré l'industrie cinématographique et particulièrement Blade Runner. J'ai donc franchi le cap de la version restaurée de 2h30 pour me faire une idée. Et je n'ai pas regretté.

Hormis Chaplin et Kurosawa, je ne suis familier ni du cinéma muet, ni du cinéma en noir en blanc. Donc là j'ai pris une grosse dose de ces éléments et j'en resors bluffé. En fait, ce qui m'a profondément interpellé c'est, pour l'époque, la qualité des décors et de la mise en scène. Le film date tout de même de 1927 et quand je vois le travail abattu ça me laisse vraiment admiratif. Plus d'une fois je me suis demandé par quel procédé Fritz Lang avait crée l'illusion d'une telle foule...eh bien la réponse est toute simple : il a employé 36 000 volontaires. Rien que ça.

Les décors, dont certains ont inspiré le Blade Runner de R. Scott, sont également à saluer. De forts jolies maquettes qui créent l'illusion d'une ville futuriste crédible. C'est d'autant plus bluffant de savoir qu'une scène de 10 secondes en plan large de la ville, où véhicules volants et automobiles circulent, a nécessité 8 jours de travail; des miniatures étant bougées millimètre par millimètre pour créer l'illusion du mouvement. Un soucis du détail qui laisse songeur quand on pense aux films contemporains bien creux alors qu'ils sont bourrés d'effets spéciaux. Car Metropolis, avec des moyens archaïques, réussit encore aujourd'hui à tenir le spectateur en haleine.

Sur fond d'état totalitaire et de lutte des classes, le réalisateur allemand intègre une composante SF franchement bien foutue à travers un robot qui, plus tard, rappellera surement à certains un droïde protocolaire baptisé C3PO...Le robot se fond admirablement dans l'univers futuriste et s'intègre parfaitement au propos. Et puis ça apporte aussi une touche d'originalité à une thématique qui aurait pu être un petit peu fadasse sans. Je dis bien "un petit peu" car le film réserve, rétrospectivement, pas mal de bonnes surprises.

Déjà du point de vue de la réalisation, c'est très propre et très soigné. Les plans sont nombreux, les cadrages multiples et l'action parfaitement lisible. Les acteurs m'ont paru bons. Après, n'étant pas un fin connaisseur du cinéma muet, il m'est difficile de donner un jugement dessus. Disons qu'ils surjouent pour renforcer et surligner un coté expressif en osmose totale avec l'ambiance sonore. A ce propos, dans la version restaurée c'est l'orchestre symphonique de Berlin qui officie et c'est une petite merveille auditive qui nous est proposée. Un chouia répétitif pris dans son intégralité mais indéniablement un vecteur de mouvement et de dynamisme lors du déroulement du film. Une composante majeure de l'oeuvre qui tend à la rendre si prenante.

Car on ne s’ennuie pas. En tout cas moi je ne me suis pas ennuyé. J'ai pris beaucoup de plaisir à suivre l'intrigue, à admirer les beaux décors, l'architecture avant-gardiste, à apprécier la partition sonore et à frissonner d'effroi devant la vision prémonitoire de Lang et de sa femme vis-à-vis des atrocités que commettraient plus tard les nazis. Bref, je ne pouvais pas espérer mieux que Metropolis pour m'initier au long métrage muet en noir et blanc. Une franche réussite qui se doit d'être visionnée. Ne serait-ce que pour réaliser tout le travail abattu à l'époque pour obtenir ce résultat. Chapeau !