Imposer un compendium pour “accoucher” d’un film d’action, Marvel a su le faire. Torpiller Sony, Universal voire Warner Bros. sur le terrain du film d’aventure pour enfant, Marvel l’a effectué. S’adjuger un poids tel qu’il permet de dicter l’agenda des sorties cinéma, Marvel l’a effectué sans sourciller. Jouer sur l’attente, l’enthousiasme (téléguidé et abreuvé certes) d’une galaxie de personnages, Marvel l’a parachevé. A un point tel, qu’aujourd’hui ce ne sont plus les dates de sortie qui sont "commentées" mais bien les hésitations de tel réalisateur à produire plutôt qu’à diriger telle suite, le manque de considération de tel réalisateur face à la pression inhérente à cette suite qui se doit d’être cruciale. Le tout bien sûr en ne perdant pas de vue que la réunion de tous ces personnages se doit d’être la plus mémorable et la plus lucrative. Au milieu de cette linéature, The Guardians of the Galaxy apparaissait comme atypique : insolent, décalé, "vulgaire" (au sens où il s’adresse à un auditoire plutôt jeune), ce film constituait un contre-pied parfait à l’univers que voulait mettre en avant Marvel.
A ce titre, on pouvait s’interroger sur ce qu’on pouvait attendre de cette suite. Si le risque était "assumé" lors du 1er volume, les premières rumeurs autour d’un troisième volume (avant même l’exploitation du deuxième volume) auguraient du risque "calculé". On pouvait croire que quelque soit la teneur de cette mouture, "au pire il y aura un 3". Puis, vient ce réflexe quasi-automatique au moment d’évoquer les films Marvel. Soit ce cheminement de pensée consistant à classer, échelonner les films selon des critères allant du "le moins Marvel quoi, tu vois ? Presque le plus sombre en fait" à "très clairement la suite de trop. Vivement que ça reboote !". Ce doigté qu’a ce studio à jongler entre satiété, manque voire surabondance pourrait se jauger à l’exploitation des films. Aux fameuses lettres attribuées en sortie ciné par les spectateurs US. Mais aussi à la popularité des personnages dans les cours de récré.
The Guardians of the Galaxy volume 2 peut être considéré comme un ovni : incarné par un acteur moins connu que ses comparses (l’excellent Chris Pratt de Parks & Recreation), cassant volontairement les codes du film de super-héros Made in Marvel (soit une bande de hors-la-loi vouée aux galères mais désignée pour sauvegarder l’univers) et surfant volontairement sur les souvenirs/références d’une génération (quitte à susciter curiosité et/ou exclusion), The Guardians of the Galaxy volume 2 ne se contente pas de re-venir. Là où The Avengers fait la part belle à une association forcée voire de fortune, The Guardians of the Galaxy 2 cimente l’esprit d’équipe par l’opposition. L’opposition de style, de caractères, des objectifs…mais qui, in fine, va converger vers un intérêt commun et supérieur. Et si le volume 1 démontrait la difficulté de la vie collective, le volume 2 s’attarde un peu plus sur le processus aboutissant à une convergence et à ce sentiment d’appartenance à un groupe.
En mêlant volontairement, amitié, relationnel, amour et liens familiaux, James Gunn met en exergue combien ce lien est tout sauf sibyllin. Loin d’idéaliser ou de moquer l’absurdité d’une union, le film aborde les difficultés à bâtir un entourage, à accepter le rôle (social) dévolu à chacun, l’utilité du dialogue quelque soit la tonalité employée. Par-delà les non-dits, les punchlines, la gouaille de l’autre, les excoriations des uns et des autres, James Gunn interroge sur l’épaisseur donnée et que l’on donne à un lien.
Point de farandole de bons sentiments ici. L’insolence, les quolibets, l’ego et l’entêtement de chacun éprouvera cette sensation d’appartenir à une famille. Cette thérapie par le trash, la vanne a ses vertus mais le film n’oublie pas d’y instiller des rappels "moraux" inhérents à l’univers Marvel (égoïsme et ses conséquences, l’accomplissement d’actes et ses conséquences, les limites de l’émulation et/ou de la rivalité).
Il y a dans cette suite une jubilation à vanter l’esprit de groupe. James Gunn n’en fait pas la promotion niaise ou idéalisée. En abordant cette thématique par les problèmes qu’elle génère, James Gunn en ressort la moelle, une de ses valeurs cardinales : la solidité et la véracité d’un groupe proviennent de la connaissance de chacun de ses membres et surtout de l’acceptation de ses membres tels qu’ils sont.
Avec ses ingrédients estampillés Marvel (débauche d’effets spéciaux, BO largement empruntée, caméo et scènes de post-crédit en sus), The Guardians of the Galaxy volume 2 confirme son caractère à part par rapport à ses acolytes : outrancier, irrévérencieux, insolent, le tout "emballé" dans un esprit un peu cartoonesque et à l’humour potache. Calculé ou pas, le risque pris à pérenniser cette franchise est à l’image de l’acteur qui l’incarne : pas forcément celui que l’on pensait, surprenant, explosif et carrément rentable.