Le Passager nº 4
5.4
Le Passager nº 4

Film de Joe Penna (2021)

Voir le film

La désintégration de Zoe, dont la vie se disperse lentement dans l’irruption solaire par des traînées lumineuses qui semblent la vider de sa substance, permet à Stowaway d’accéder à la poésie pure d’une existence sacrifiée pour autrui, en l’occurrence pour un étranger qui commence par apparaître tel un alien, comprenons un « autre » embarqué malgré lui dans le vaisseau spatial. Joe Penna accorde une place importante aux flottements et aux temps morts, laissant en suspens l’intrigue pour mieux déjouer les conventions du huis clos et y substituer une humanité vibrante d’authenticité. C’est ce qui faisait déjà la force de son précédent long métrage, Arctic (2018) ; c’est ce qui fait ici la puissance et la beauté d’un film dont nous ressortons bouleversés, encore pris de vertige devant la mission de récupération de l’oxygène.


Rarement nous aurons été à ce point exposés au vide, rarement nous aurons aussi douloureusement éprouvé cette expérience du vide. Il suffit qu’un astronaute lâche prise quelques instants, et nous voilà proches du malaise ; qu’il se rapproche trop du bord, et la tête nous tourne. Le cinéaste atteste une maîtrise remarquable de l’espace et du mouvement des corps dans celui-ci : sa caméra suit ses personnages et leurs situations avec fluidité et virtualité ; elle semble elle-même en gravité, tributaire d’aucune structure d’appui. Comme elle, nous flottons dans un espace clos, incapables d’anticiper les réactions qui refusent le manichéisme ou le survival dans lequel la violence mute en divertissement. Dans Stowaway, il n’y a que l’homme confronté au vide, d’abord séparé par une fine cloison, enfin en prises directes avec lui. De ce combat primaire, Penna tire une métaphore de l’existence et des conséquences de nos choix, irrémédiables ; aussi se raccorde-t-il à une forme d’existentialisme, l’individu ne valant que par ses actions et par sa propension à en assumer les retombées.


Un immense film, modeste et intimiste, qui laisse après visionnage une empreinte indélébile. La confirmation d’un grand cinéaste en devenir.

Fêtons_le_cinéma
9

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films de 2021

Créée

le 4 mai 2021

Critique lue 479 fois

4 j'aime

4 commentaires

Critique lue 479 fois

4
4

D'autres avis sur Le Passager nº 4

Le Passager nº 4
Moizi
2

Anna objectif daube

Un passager clandestin est découvert au sein d'un vaisseau spatial en direction de la planète Mars. L'équipage se trouve trop loin de la Terre pour faire demi-tour et il n'y a pas assez de ressources...

le 25 avr. 2021

20 j'aime

17

Le Passager nº 4
Grandnico
4

Critique de Le Passager nº 4 par Grandnico

Bonne nouvelle pour les astronautes qui ne sont plus obligé de s'équiper, maintenant on peut décoller en fusée dans une simple soute et survivre comme ce passager. Ensuite les meilleurs cerveaux sur...

le 22 avr. 2021

15 j'aime

Le Passager nº 4
Fatpooper
4

La bulle

J'avoue ne pas avoir saisi l'intérêt de ce film. Je pensais que c'était sur l'émigration clandestine mais en fait non, le type est là par accident et est très vite accepté. Sur le sacrifice ? Ben...

le 4 juin 2021

9 j'aime

Du même critique

Sex Education
Fêtons_le_cinéma
3

L'Ecole Netflix

Il est une scène dans le sixième épisode où Maeve retrouve le pull de son ami Otis et le respire tendrement ; nous, spectateurs, savons qu’il s’agit du pull d’Otis prêté quelques minutes plus tôt ;...

le 19 janv. 2019

86 j'aime

17

Ça - Chapitre 2
Fêtons_le_cinéma
5

Résoudre la peur (ô malheur !)

Ça : Chapitre 2 se heurte à trois écueils qui l’empêchent d’atteindre la puissance traumatique espérée. Le premier dommage réside dans le refus de voir ses protagonistes principaux grandir, au point...

le 11 sept. 2019

77 j'aime

14