Le Monde secret des Emojis
3.5
Le Monde secret des Emojis

Long-métrage d'animation de Tony Leondis (2017)

Dès son annonce, dès ses premières images, dès sa bande-annonce, tout le monde, tout le monde à craché son venin sur ce qui était la nouvelle production animée de Sony Pictures Animation. Et la principale raison se résumait à l'existence même du film. Un film basé sur les smileys de nos téléphones. Commençant directement avec un pied dans la tombe, The Emoji Movie devenait donc un pari risqué, doublé d'un concept dépassant l'absurde...


Et c'était un pari également pour moi. Le film sortira en octobre en France, et moi, petit Belge armé de mon interrogation et d'un ami tout aussi abasourdi par l'existence de ce film, alla attaquer la bête. Et c'est réellement un pari, de voir ce qu'est réellement The Emoji Movie. On crache tous dessus, on crachera encore dessus, mais il faudra le voir si on veut savoir de quoi on parle, et comprendre réellement en quoi ce long-métrage est devenu, dès son annonce, un objet de cinéma.


Le réalisateur d'Igor signe donc ici une comédie d'animation, où notre personnage principal, absolument dénué d'identité, va mener la quête classique de la recherche d'identité, au départ en voulant s'inscrire dans le moule que sa société applique à la lettre, pour peut-être (et je dis bien bien "peut-être" !) au final, se découvrir lui-même.


The Emoji Movie, ou Le Monde Secret des Emojis, est un film affreux. On le savait, on le sait tous. Mais après le combat qu'a été le visionnage, je certifie de mon oeil de rescapé ; C'est un film affreux. Et ce pour plusieurs raisons.


Le Monde Secret des Emojis est terriblement mal écrit. L'écriture est mollassonne, je reviendrais sur l'originalité abyssale du métrage un peu plus loin. C'est mauvais, tout simplement. La quête du héros, le parcours, les personnages absolument vides... Aucun personnage n'est attachants, et à aucun moment l'histoire est entraînante, prenante, ou intéressante. On n'en a juste rein à faire de ce qui se déroule devant nos yeux. Ajoutez la bonne idée d'un questionnement de mariage entre Papa et Maman Bof est on se retrouve, encore, à se demander comment ont-ils pû, penser que cela, fonctionnerait. Que cela plairait. Surtout aux enfants. C'est cela qui les fait rêver ? Le questionnement d'une vie de couple de deux smileys insupportables ?
Visuellement, ce n'est même pas vraiment joli, tant les visuels, les décors, la direction artistique est fade. Le film veut jouer avec des objets culturels, mais ne va pas plus loin que le simple concept de base. Les trolls d'Internet sont des trolls, le Spam est une lettre. Sur le papier c'est mignon. Dans la réalité c'est d'un manque d'imagination.


Le Monde Niais des Emojis est une comédie d'animation donc, mais à l'humour très, très limité. Je ne veux pas jouer la carte de la méchanceté gratuite, en répétant sur chaque point que c'est "nul". Mais je vais devoir être obligé de me répéter, avec comme mot le terme "vide". La comédie est ici totalement vide. Le 4/5 des gags est déjà-vu, et l'humour est au ras des pâquerettes. Il fonce d'ailleurs carrément dedans lors de touches comiques qui nous rend presque honteux de voir cela se dérouler devant nous. La totalité des gags autour du personnage de Papa Caca est honteuse. Vraiment. Déjà, écrire un personnage d'excrément, s'appelant Papa Caca, et y affubler des lignes de dialogues de ce niveau là est une honte. Comment, comment, rien que cet élément là à pu passer durant le stade d'écriture, de production, d'animation, et d’interprétation (inutile de rappeler que ce personnage est incarné en VO par Patrick Stewart). Et d'autres trouvailles humoristiques navrantes sont aussi honteuses, tant elles sont d'un vide incroyable. Inutile de lister, regardez le film.
Les gags fonctionnant à base de références à la culture populaire sont aussi désespérantes. Et je vais donc pouvoir passer à un autre point, très important ;


Le Monde Triste des Emojis est un film concept donc. Et on pense tout le long du film, à trois grandes inspirations du long-métrage ; Les Mondes de Ralph, La Grande Aventure Lego, et Vice-Versa. Dès que les images du film se sont montrées, on y a tous penser. Le film se veut de la même trempe, du même paris, du même concept. Sauf que.
Les Mondes de Ralph fonctionne parce qu'il crée et va au delà de son simple postulat de base. Il s'amuse de références, mais n'oublie pas de construire un univers et des personnages inspirés. Il prend place d'ailleurs dans un univers immense, les jeux vidéo. Un art, et un art riche.
La Grande Aventure Lego fonctionne parce qu'il s'affranchit de ce qu'il est à la base ; un film avec des Lego. Mais pas nécessairement un film sur les Lego. C'est un film sur l’imagination, et la créativité. Nourri ici par un objet culturel, multi-générationnel et riche qu'est le jouet. Le film permet d'ailleurs, à travers l'imagination, de toucher à plusieurs thèmes, comme le partage, la transmission...
Vice-Versa fonctionne parce que là aussi, il tire totalement profit d'un concept qui pouvait sembler étrange, Et si les émotions avaient des émotions. Le film là aussi, crée et joue avec les images pour réaliser des choses variées et différentes. Les sentiments sont quelque chose de riche, d'extrêmement riche, et là aussi, permettent au film de toucher beaucoup de choses.
The Emoji Movie ne fonctionne pas parce que c'est un film Emoji.
Les Emojis (ou Smileys, peu importe franchement) ne sont pas un art, ne sont pas un symbole de créativité, ne sont pas riches. Le film tente d'ailleurs de faire passer cela pour quelque chose de fort ; au début du film, un personnage compare les émoticônes et les hiéroglyphes (soyons sérieux), en en parlant positivement en disant qu'aujourd'hui, la vie va trop vite. Et vous voulez-faire rêver les enfants.
Le film est un mauvais décalque car s'il copie sur la surface, il n'y a pas le même background derrière. Et il copie non seulement le déroulé (quête identitaire) mais aussi certaines scènes rappelant méchamment ses maîtres, comme un moment évoquant, sans le génie et la force, le chef d'oeuvre qu'est Vice-Versa.
En citant La Grande Aventure Lego, on peut parler aussi d'un autre échec de The Emoji Movie dans sa tentative de plaire avec des références à la culture populaire. Si dans La Grande Aventure Lego elles sont inventives (parfois un peu trop "subtiles" pour un jeune public), elles ne servent pas de pilier d'histoire, pouvant laisser le spectateur aveugle du gag, mais toujours dans la liberté de suivre l'histoire. Dans The Emoji Movie, l'apparition d'un Oiseau Twitter paraîtra sûrement étrange à un enfant, qui verra seulement un gros oiseau bleu. En plus d'être un Deus Ex Machina des plus ridicules.
D'ailleurs dans ses tentatives de jouer avec la culture populaire, notons un oeil maladroit sur Youtube, où les personnes éloignées de ce média (je pense à un public moins porté sur Internet) verra donc un site de vidéos débiles.


Le Monde Débile des Emojis est, pour finir avec les divers points, une oeuvre nauséabonde pour les enfants. Car le film veut les faire rêver avec des smileys. Avec des téléphones. Leur promettre une vie qui va trop vite, une vie la tête abaissée sur leur portable. La vie ?
Le message derrière est mignon. Soit qui tu veux. Mais un joli message peut sauver, voir juste faire passer un mauvais film ? Non. Ce message, on peut le voir dans plein d'autres bons films. Et surtout, dans les détails, le message est saccagé. Je ne spoilerais pas ce triste objet, mais un retournement de situation, additionné à ce que fait le sujet de ce twist crache totalement sur le message.
C'est une oeuvre à la limite de l'odieux parce qu'elle s'adresse aux enfants. C'est un film d'un vide abyssal, d'une inventivité porté disparue, aux gags fatiguant quand ils ne sont pas simplement honteux, à l'écriture triste, et aux lignes de dialogues qui donne réellement envie de s'indigner devant un tel ramassis exécrable (une ligne de dialogue, vers la fin du film, est absolument insultante, en plus d'être totalement abrutie).
Dès le début, on le savait. Et le résultat est réellement honteux. C'est un film triste, nul, ridicule, idiot, pénible... Et destiné à un public familial. C'est donc ça la vie, c'est donc ça, que des parents iront voir avec leurs enfants ; un défilé de placement de produits honteux, à la gloire de l'objet qu'est le téléphone, ne fonctionnant même pas tant il se rate sur certaines choses abordées.


Faites rêver vos enfants avec ça... Dites leur que la vie est rapide et qu'elle se résume à envoyer des messages, simplifiés en ce "nouveau hiéroglyphe". A l'heure où la communication est au plus mal, le cinéma d'animation familial, qui bat de l'aile depuis un moment, se conjugue avec.

MadeAWasp
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le 16 août 2017

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