Quel autre cinéaste que Hong Sang-soo pourrait se permettre une conversation anodine de près de 30 minutes, entre deux sœurs, pour ouvrir son film. Il est vrai que le temps est une notion flottante chez le cinéaste même si cette fois, dans In front of your Face, il joue moins que d'habitude avec lui, se contentant, si l'on peut dire, d'enregistrer les faits et gestes d'une femme d'âge mûr, de retour en Corée, pendant 24 heures. Cela tombe bien parce que cette ancienne actrice, qui rencontre un réalisateur qui souhaite tourner son prochain film avec elle, vit désormais au jour le jour, cherchant les instants de grâce dans son quotidien. La raison de cette attitude est révélée au 2/3 du long-métrage après quelques indices semés auparavant. Les fidèles du cinéma de Hong ne seront pas surpris par le ton intimiste de In front of yout Face, pas plus que par la délicatesse du trait ou encore, sur un plan plus prosaïque, par la consommation excessive d'alcool. Plus simple et plus serein que ses œuvres précédentes, le film semble correspondre à une philosophie de la vie davantage apaisée, portée par la nécessité du carpe diem, en négligeant les erreurs du passé ou les souffrances du futur. Lee Hye-Young, nouveau visage dans le cinéma de Hong, est filmée avec tendresse et en captant ses infinies mélancolie et lumière. S'il est difficile de parler de film-somme pour le réalisateur, ou encore de d'inflexion dans sa carrière, le fait est que ce 26ème opus de Hong Sang-soo est l'un de ses plus touchants et de ses plus lisibles quoique, à vrai dire, tout ne pourrait bien être qu'un rêve.

Cinephile-doux
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Au fil(m) de 2022

Créée

le 24 déc. 2021

Critique lue 315 fois

5 j'aime

Cinéphile doux

Écrit par

Critique lue 315 fois

5

D'autres avis sur Juste sous vos yeux

Juste sous vos yeux
Contrechamp
8

La femme qui est revenue

Sorti d’un songe sans rêve, le nouveau long-métrage du prolifique Hong Sang-soo s’inaugure sur des paroles sibyllines : « toutes les choses devant mes yeux sont une bénédiction […] seul le moment...

le 21 sept. 2022

7 j'aime

Juste sous vos yeux
Virgule1
9

Conclure

En début d'année, en introduction pourrait-on dire, sortait Introduction de Hong Sang-soo : le film, qui était déjà en février le plus beau de l'année, annonçait parfaitement la suite de 2022, du...

le 20 nov. 2022

6 j'aime

2

Juste sous vos yeux
Cinephile-doux
7

Au jour le jour

Quel autre cinéaste que Hong Sang-soo pourrait se permettre une conversation anodine de près de 30 minutes, entre deux sœurs, pour ouvrir son film. Il est vrai que le temps est une notion flottante...

le 24 déc. 2021

5 j'aime

Du même critique

As Bestas
Cinephile-doux
9

La Galice jusqu'à l'hallali

Et sinon, il en pense quoi, l'office de tourisme galicien de As Bestas, dont l'action se déroule dans un petit village dépeuplé où ont choisi de s'installer un couple de Français qui se sont...

le 27 mai 2022

75 j'aime

4

France
Cinephile-doux
8

Triste et célèbre

Il est quand même drôle qu'un grand nombre des spectateurs de France ne retient du film que sa satire au vitriol (hum) des journalistes télé élevés au rang de stars et des errements des chaînes...

le 25 août 2021

73 j'aime

5

The Power of the Dog
Cinephile-doux
8

Du genre masculin

Enfin un nouveau film de Jane Campion, 12 ans après Bright Star ! La puissance et la subtilité de la réalisatrice néo-zélandaise ne se sont manifestement pas affadies avec Le pouvoir du chien, un...

le 25 sept. 2021

70 j'aime

13