Le huis clos, c’est connu, est un bon générateur d’angoisse. Désireux de pousser à l’extrême les craintes et la claustrophobie du spectateur, Rodrigo Cortés imagine donc la situation la plus jusqu’au-boutiste en la matière : soit un homme enterré vivant dans un cercueil et ne disposant que d’un téléphone portable, d’une lampe torche et d’un briquet.
Rivé à son sort, le spectateur ne sortira jamais par les faveurs, par exemple, d’un montage alterné. Sur le même principe que Locke, il devra se contenter d’une unité de lieu et d’un seul personnage, un Ryan Reynolds qui fait ici un peu moins le malin que lorsqu’il est enfermé dans lycra de Deadpool.
L’intrigue, relativement limitée, suit les différentes tractations du routier, kidnappé sur une route d’Irak, pour tenter de s’en sortir. Avec la régularité d’une horloge suisse, le récit alterne entre les discussions et les événements susceptibles de tendre encore la situation : exigences des ravisseurs, vidéo de chantage sur le téléphone, serpent, fissures du bois suite à des bombardements…
Du point de vue de la mise en scène, l’ensemble est plutôt efficace, même si certaines embardées sont dispensables, notamment ces plans où la caméra quitte le cercueil pour enfoncer dans la terre le personnage tentant laborieusement l’hyperbole sur son confinement. Certaines séquences, comme celle du serpent occasionnent un joli travail de montage, ou un plan séquence circulaire qui semble matériellement impossible, la caméra tournant autour du corps pourtant collé aux parois. Le jeu sur les différentes lumières permet une certaine variation visuelle qui maintient l’intérêt, et le relai par le son (des voix au téléphone, mais aussi des bombardements ou de l’espérance d’une délivrance) est bien exploité.
Au-delà de son petit jeu sadique pour claustrophobes, Buried aborde aussi la question de la présence américaine en Irak : l’idée saugrenue d’aller bosser là-bas, et les réponses du ravisseur qui fait du chauffeur un américain, c’est-à-dire un soldat comme un autre, posent sans les résoudre des questions assez polémiques. L’inertie des services, le jeu avec les médias, la course à la communication et les différents intérêts qui déterminent le sort de l’otage sont disséminés avec une intelligence finalement assez redoutable. Elle trouvera son point d’orgue dans ce licenciement par téléphone par la compagnie qui l’emploie et qui trouve un moyen pour ne pas payer la prime d’assurance qu’elle lui devrait en cas de décès, touche de cynisme capitaliste qui vient tristement équilibrer la barbarie terroriste indigène.
Enfin, le dénouement particulièrement sadique vient parachever ce film amer. Un montage alterné sonore donne au spectateur ce qu’il attend évidemment, à savoir la libération du personnage. Mais c’est un leurre, car les secours cherchent ailleurs, qui plus est le cercueil d’un autre otage, mort, qu’on lui avait certifié avoir sauvé pour le rassurer sur ses chances. Ce twist assez audacieux laisse enfin s’installer ce qu’on redoutait, et contre lequel ont lutté le personnage comme le réalisateur : le silence et l’obscurité, grands vainqueurs de cette petite machine méchante.
(6.5/10)