Black Phone est l’adaptation d’une nouvelle de Joe Hill, fils de Stephen King, par Scott Derrickson. C’est un retour aux sources pour le réalisateur, qui retrouve Blumhouse et les acteurs Ethan Hawke et James Ransone après Sinister en 2012.


Au commencement…


Cela débute comme un teen-movie. Nous sommes en 1978 dans une banlieue du Colorado, une partie de baseball se déroule entre collégiens. Finney (Mason Thames) lance face à Bruce. Après deux strikes, il concède un home run sous le regard des jeunes filles qui sont sous le charme du batteur. On retrouve ce dernier sur son vélo, le sourire aux lèvres, sous une musique légère alors que les filles se retournent sur son passage, aussi souriante que lui, avant qu’il ne croise une fourgonnette noire…


A History of violence


Après une introduction où les visages juvéniles sont souriants, ils disparaissent rapidement face à l'omniprésence de la violence dans leur quotidien.


Dès le petit-déjeuner, Finney et sa sœur Gwen (Madeleine McGraw) subissent la violence psychologique de leur père. A leur arrivée au collège, une bagarre d’une insoutenable violence éclate devant l’établissement. Puis, Finney est harcelé par trois collégiens, avant que ne s’interpose le boss du collège. Celui-ci lui parle de Massacre à la tronçonneuse qu’il a vu au drive-in. C’est une succession de violences sous diverses formes que subissent les adolescents et plus particulièrement Finney.


Finney est un adolescent sensible. Une sensibilité perçue comme une fragilité par son père comme par les collégiens harceleurs. Au contraire, Gwen a un caractère bien trempé. Elle prend la défense de son frère, quitte à prendre des coups.


L'enfance, cette période dite d'insouciance, vole en éclats sous les coups des camarades de collège, sous le ceinturon du père ne supportant pas le moindre bruit, devant un écran de cinéma ou de télévision et dans le sous-sol de l'Attrapeur.


L’Attrapeur


Il les kidnappe en plein jour et rue, sans que personne ne s’en aperçoive, chacun étant reclus dans son intérieur, même quand des appels à l’aide déchire la nuit. On peut mourir tranquille dans les grandes avenues américaines. Tel Michael Myers, il arbore un masque. Il sévit aussi à la même période où sort au cinéma Halloween de John Carpenter. A la différence du célèbre boogeyman, il est aussi terrifiant que fragile. Comme le père de Finney, il attend que celui-ci se comporte comme un mauvais garçon pour user son ceinturon sur son corps d’adolescent qui ne semble pas le laisser indifférent.


Ethan Hawke est à contre-emploi. C’est un homme qui ne peut (sur)vivre sans son masque, dont le visage semble recouvert d’une pommade blanche lors de ses errances dans les ruelles pour trouver une proie. Il réside avec son chien Goliath et son frère Max (James Ransone) qui est assez con pour ne pas se rendre compte de la présence de Finney dans leur sous-sol, ainsi que des victimes précédentes. Il faut dire qu’entre deux lignes de coke dans l'exiguïté du salon, il est trop préoccupé par son enquête sur la disparition des victimes.


Le téléphone sonne toujours plus de deux fois


Dans le sous-sol de la peur, un téléphone noir (ce qui explique le titre) trône contre un des murs grisâtre. Le fil est coupé. Pourtant, il sonne et à travers lui, se met en place une connexion entre Finney et les précédentes victimes. Elles vont le guider afin qu’il ne subisse pas le même sort où pour se venger de L’Attrapeur, en lui donnant des astuces, sans que cela ne le mène à une éventuelle possibilité de quitter cet endroit glauque.


Ses actes ne semblent pas attirer l’attention de l’Attrapeur, que ce soit le fait d’arracher la grille de la fenêtre, de poser un tapis dans le couloir et encore moins d’avoir défoncé l’arrière du frigidaire. Ces incohérences m’ennuient, tant il semble en capacité de fuir, voire de tuer son kidnappeur. Mais, il faut s’accrocher durant près d’1h40.


Scott Derrickson réussit à me tenir (à peu près) en haleine, à travers Finney. C’est un personnage attachant dont le regard évolue au fil de ses conversations avec les fantômes errant à ses côtés. Tel un puzzle, chacune de ses vaines tentatives vont finir par se révéler utile pour lui permettre de venir à bout de l’Attrapeur lors d’un final aussi malin que jouissif.


La figure paternelle


Le père de Finney et Gwen, Terrence Blake (Jeremy Davies), est un homme violent, aussi bien physiquement que psychologiquement. Le deuil de sa femme ne peut excuser son comportement, ni son alcoolisme. C’est une figure paternelle déficiente, menaçant constamment ses enfants qui sont victimes de violences intra-familiales.


L’Attrapeur kidnappe des adolescents puis les enferme dans le sous-sol. Parfois, la porte reste entrouverte. Il les attend en haut des escaliers pour les punir avec son ceinturon, tel Terrence Blake. Ce sont deux hommes qui font preuve de violences à l’encontre des adolescents.es. L’Attrapeur est extrême dans son comportement, ce qui n’absout pas le père de ses péchés, comme le laisse à penser le dénouement. Le fait que l’un soit pire que l’autre, ne peut permettre à l’autre de devenir une personne acceptable.


Enfin bref…


Black Phone est dans la lignée des films précédents de Scott Derrickson, L’Exorcisme d’Emily Rose, Délivre-nous du mal ou Doctor Strange, corrects, sans plus. Le film se retrouve rapidement confronté aux limites de l’adaptation d’une nouvelle, en ne parvenant pas à sortir du carcan de son intrigue, tel Finney dans le sous-sol.


A ce jour, Sinister reste son seul film efficace dont il semble s’en inspirer avec la présence d’Ethan Hawke et James Ransone dans des rôles différents pour tenter de susciter à nouveau la peur et l’angoisse aux seins des spectateurs.trices. Une tentative presque réussie, à l’image d’un des jump-scare des plus efficaces de l’année.

easy2fly
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le 2 juil. 2022

Critique lue 30 fois

Laurent Doe

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