The Doors
8.3
The Doors

Album de The Doors (1967)

Les Doors sont un mythe, un mythe intact 50 ans après la disparition de Jim Morrison.
Il faut dire qu’en l’espace de quelques années, le groupe a sorti plusieurs albums cultissimes dont deux chefs-d’œuvre (celui-ci, le premier, l’autre étant L.A woman paru en 1971).
Une musique qu’on peut immédiatement définir comme un mélange entre pop/rock 60's assez classique , rock psychédélique (leur nom est d'ailleurs un hommage à l’ouvrage « Les portes de la perception » d’Aldous Huxley ») et rock planant, avec parfois des touches nettement blues (et d’autres influences plus discrètes) mais qui en fait est largement plus complexe qu’il n’y paraît de prime abord et se place de fait au delà de ces catégories simplistes.
En effet ce premier album est un disque d’un éclectisme assez révélateur, où plusieurs facettes musicales se dévoilent et se côtoient mais sans jamais nuire à la cohérence et l'alchimie de l’ensemble.
Une guitare discrète mais efficace et un clavier stratosphérique, l’âme musicale du groupe, mais sans jamais tomber dans le pompeux ou le grandiloquent (même sur le classique "Light my fire" où il est omniprésent).
Et surtout bien sûr Jim Morrison, une gueule, un look, une attitude, une prestance, un charisme fou et bien sûr un décès prématuré et trouble à Paris qui va accroître la légende ; sans oublier ses textes poétiques voire mystiques qui restent des références en matière de paroles de chansons.
En 1967 ce premier album fait figure d'une véritable bombe qui malgré des points communs avec le psychédélisme de l’époque se démarque nettement du mouvement hippie par une sorte de mystère, une attitude et une image presque impénétrable, un côté sombre que les Doors entretiennent, et qui tranche avec l’utopie des Grateful Dead ou Jefferson Airplane par exemple des années 67-68 et qui, à l’instar d’un "Astronomy domine" de Pink Floyd, sorti à la même époque, place les Doors dans une autre dimension, dans un univers à part.
Le groupe sait aussi cultiver à la fois son côté sérieux et son côté provocateur, notamment sur scène où les frasques de son chanteur ne se comptent plus !
Quelques grands classiques qui ont traversé les années et les générations et qu’on écoute avec plaisir en 2021 sont présents sur ce premier album :
"Break on through" qui d’emblée montre que le groupe est à part, novateur et qu’il a quelque chose de différent de la pop habituelle des sixties. Un morceau qui nous tombe dessus par surprise avec son rythme vaguement "latino".
C’est rapide, nerveux et ça tranche avec les standards de la pop habituelle.
"Light my fire" et son long et magnifique passage/solo au clavier (mais celui de guitare n'est pas mal non plus) et qui montre que le rock "planant" peut sonner rock !
Un des titres incontournables qui ont écrit la légende du groupe.
"The end" le plus mystérieux, le plus psychanalytique des morceaux, celui qui explore des univers et contrées jusque-là inconnus, qui fouille notre âme, notre for intérieur, ici on touche presque au mysticisme...Le titre qui, de fait, classe les Doors dans le rock psychédélique car il ouvre des portes que beaucoup auront du mal à franchir...
On note également deux belles reprises, notamment "Back Door Man" de Willie Dixon, où les Doors montrent leurs influences blues qu’on retrouve sur d’autres morceaux, mais aussi "Alabama Song" de Kurt Weill, grand classique de l'opéra "populaire" de la première moitié du XXeme siècle, dans un esprit très "cabaret" qui convient parfaitement au style Morrison, ainsi que les très bons "Take it as it comes" (qui sonne davantage comme un tube pop sixties) et "Soul kitchen", titre où tout le style et toute la magie du groupe sont présents, résumés en 3 minutes 30.
Citons également "Crystal ship", une bien belle ballade, mais personnellement je trouve que ce n’est pas là où la formation excelle le plus, et le très rock "Twentieth Century Fox". La voix de Morrison, suave, grave et chaude tantôt énervée, rageuse, tantôt crooner (l’influence de Sinatra sans doute) fait le reste.
Quand on parle du premier Doors, il est indispensable d'insister sur l'époque où il est enregistré.
Cet album sort en effet en1967. Nous sommes alors à une période charnière, de transition, à la croisée des chemins, période où le pop-rock classique du milieu des années 60, avec l’âge d’or des Who, Stones, Beatles, Kinks, côtoie la montée en puissance du rock psychédélique naissant (Pink Floyd, Jefferson Airplane, Grateful Dead, Seeds…) à partir de 67/68.
Et les Doors parmi les groupes de l’époque sont parmi ceux qui s’en sortent le mieux, parmi ceux qui sentent le mieux l’évolution que connaît le rock vers de nouveaux horizons car ils apportent quelque chose de neuf, de nouveau en mêlant les deux aspects du rock (pop classique et psychédélisme novateur).
Ce mélange des plus réussi, ce sont des compositions créatrices mais aussi un son original (peut-être dû à l'absence de basse compensé par un clavier mis en avant), une ambiance et une atmosphère nouvelles, cool et électrique à la fois, allant de la folie psychédélique de "The end" qui voisine des ambiances pop rock et blues.
Il se dégage une sorte de magie de ce disque, quelque chose de quasi mystique qui vous envoûte littéralement.
Trois classiques, plusieurs autres bons morceaux qui font du premier Doors à jamais un album marquant et incontournable du Rock.
Un groupe définitivement à part et qui rentre dès 1967 à jamais dans la légende, mais réduire les Doors à l'icône Jim Morrison serait injuste et réducteur.


Article initialement paru sur le site Rock In Progress, webzine où vous pourrez retrouver des chroniques d'albums rock, folk, blues, metal, punk, rock progressif, garage, jazz, rock psychédélique, pop, blues rock...mais aussi des rubriques films, livres
https://rock-in-progress.blogspot.com/

Créée

le 30 août 2021

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nico94

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