Nathan et Nathan sont sur un bateau ...

C'est une série qui déstabilise. Qui nous met, nous les spectateurs, dans une situation en porte à faux. Pas sur le premier épisode qui sert de mode d'emploi pour les épisodes suivants mais à partir de la seconde expérience, le projet d'une femme célibataire de tester son comportement devant la situation inconnue pour elle de vivre l'éducation d'un enfant par tranches de 3 ans au sein d'un foyer fictif, avec de vrais enfants jouant les rôles de son inouïe progéniture.

Son premier acteur-mari, dépassé par les pleurs de son enfant (un nouveau-né mannequin) fuit le foyer-décor dès la première nuit, sans demander son reste. Le réalisateur décide alors de jouer le rôle du père dans sa propre fiction. A partir de là, nous sommes emportés dans une sorte de tornade des sentiments qui naviguent entre c'est joué ? ou c'est la réalité ?

Le principe de préparer une rencontre en tentant d'en maitriser toutes les possibilités est évidement une gageure impossible à remporter. A chaque nouvelle répétition, surgit un écueil nouveau qui fragilise le projet, qui fait dériver la réflexion vers des chemins ignorés jusque là. D'une manière simpliste, on pourrait estimer que la barre a du mal a être tenue, les tempêtes du hasard se pressent inmanquablement devant la caméra.

L'idée de la série est vraiment originale, et c'est une prouesse que de l'avoir ainsi menée à bout sans jamais savoir ce que les caméras vont capter. De ce côté, pas de problème. La hardiesse du projet mérite d'être notée. On franchit le quatrième mur, on enfonce le cinquième, et puis, on ne sait pas où tout cela va mener...

Mais d'un point de vue personnel, j'ai trouvé que quand le réalisateur joue devant la caméra, il avait l'empathie, la chaleur humaine d'un parpaing et c'est très gênant. Ses réactions dans son rôle de père, les accolades avec les enfants, en particulier avec un petit jeune de six ans (qui dans sa vraie vie avec sa mère célibataire, souffre manifestement de ne pas avoir de père) qui prend son rôle à coeur au point de ne plus vouloir quitter le plateau a quelque chose de poignant. Ce n'est pas amusant, même si dans l'épisode suivant, sa mère assure qu'il s'est bien remis du tournage. Comment un enfant de six ans peut-il être mêlé à ces jeux de faux-semblant et être abusé ainsi ? quels vertiges a-t-il subi dans cette spirale qui, un temps au moins, l'a manifestement dépassé ?

J'ai eu du mal a perçevoir un côté comique dans les situations rapportées sauf si on considère que les personnes d'origine sont aussi des acteurs. Il y a une ambiguité qui n'est pas toujours aisée à expliquer dans ce va et vient incessant entre le rôle des acteurs quand il reprennent une scène, une fois, deux fois, voire plus. Cela est bien relaté dans l'ultime séquence de la série, quand Nathan (le réal/acteur) joue le rôle de la mère de l'enfant (enfant-acteur qui rejoue une scène vécue) et qu'il lui dit à l'issue de sa discussion "peu importe ce que l'on a vécu car tu sais que je suis ton père". L'enfant le corrige et lui dit "Je croyais que tu étais ma mère !" Il serre l'enfant dans ses bras et le plan de fin s'arrête sur ses ongles vernis. C'est peut-être là que se situe le comique de cette série. Et c'est plutôt ténu.