Fargo
8.2
Fargo

Série FX (2014)

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Voilà une critique qui a commencé par la réponse à une appréciation négative de la série que je trouvais un peu légère... je vous laisse cherche. (un indice, c'est une critique qui fait l'habituel mélange cliché antiaméricain-injure provoc pour s'astreindre de poser des arguments, ce qui, on l'avouera est un exercice un peu exigeant et, finalement, fatiguant).

Donc, je reprends.

Fargo est une adaptation.

D'un film génial, que beaucoup auront vu, le FARGO des Frères Cohen. Pour ma part, je l'ai découvert très récemment, ce qui fait que ce chef d'œuvre était encore très frais dans ma mémoire. Du coup, quelque part, je craignais le pire et mon sens critique était aux aguets pour déchirer à belles dents cette adaptation d'un film aimé, dont on ne peut, en bon fan, qu'attendre une légitime trahison, par respect pour les auteurs originels.

Et en fait, non.

L'étonnante réussite de Fargo, la série, c'est d'avoir repris quasiment tous les éléments du film ( la policière de province enceinte, le loser qui tourne bad ass, le tueur fou et illuminé, les autorités idiotes et l'ambiance ouatée neigeuse omniprésente) sans faire un remake servile, sans perdre de la vigueur, sans avoir l'air d'être une copie amoindrie et même en conservant la surprise et la violence originelle et, bien entendu, l'humour.

Comme dans le film, la série commence sur un meurtre, enfin plutôt une mort étrange, due à un banal accident, qui va faire basculer une petite ville du Minesota dans le crime, puisque, dans les deux jours qui suivront, trois morts violentes s'enchaînent, dont le capitaine de Police de la ville.

Comme dans le modèle original, celui par qui la violence arrive est un tueur atypique, et là-aussi, ce qui fait basculer toute la ville dans la tourmente, c'est l'implication inatendue d'un pauvre type qui, confronté à un loup, se prendre des désirs de crocs et de griffes.

Le reste de l'intrigue suivra, entravée par l'incompétence des uns et la malice des autres, faisant la part belle à l'humour des situations, à quelques personnages hauts en couleur, quelques flashback qui enrichiront le background de la série et, tout de même, quelques petites incohérences, d'histoire laissée en suspens (est ce moi qui ai raté un morceau d'épisode ? Mais il me semble que toute une histoire de corbeau et de lettre de menace finit dans un gros jus de poisson sans que l'artisan de tout cela en tire autre chose qu'une révérence...)

La série fait le parti pris d'une cohérence de saison, l'hiver, en sautant allégrement les années, en avant ou en arrière, pour rester dans un Minesota blanc de blanc et froid de froid.

Le choix des personnages reprend les clichés du genre pour mieux en jouer : le butor à le Biff Tannen, le héros timide mais qui va se révéler (en mal), le frère winner de service dont on espère qu'il le paiera cher (là-encore, un laissé pour compte de l'histoire, on ignorera toujours son sort, pauvre frère), le brave capitaine remplaçant plus passionné de pèche à la mouche et de météo que de résolution de meurtre, le couple de tueurs aux dialogues Pulop Fictionnien mimés (l'un des deux est sourd) envoyés par la grande ville...

Du coup, on navigue entre référence connue et personnages originaux, l'un des meilleurs restant pour moi le policier père de famille veuf et nul dans son job de flic, lâche pour sa fille, mais assumant ses erreurs et le grand père ex-flic qui a raccroché et tiens un restaurant où il soutient sa fille qui a repris le flambeau du devoir...

Comme on est dans le Minesota, en pays Redneck, on échappe un peu aux clichés des minorités.

Certe, on a une asiatique baby-doll en step-wife finalement dévouée et discrète, jusque dans la mort, mais on évite le noir de service cool (pardon, le black) et l'homosexuel de rigueur, qui reste dans son placard dans cette série.

En fait de "minorités raciales de service" on voit apparaître finalement tard dans la série deux agents du FBI dans un duo comique presque sous-exploité, dans la mesure où les acteurs sont plutôt des pointures, puisqu'il s'agit pas moins de Key & Peel, soit les deux stars comiques de Comedy (des génies).

Je spoile leur meilleur ligne ?

Allez oui.

Quant nos deux agents, qui ont laissé un massacre se passer sous leurs yeux, tentent de se justifier près de leur chef en lui sortant le portrait robot du tueur : Middle Age Caucasian Guy.

(pour ceux qui ne sont pas habitué du cliché pointé ici, c'est exactement l'inverse racial habituel, deux flics blanc sortant le portrait robot de la moitié des présumés criminels américains, soit un noir dans la trentaine).

Le casting est absolument brillant, on aura surement déjà mentionné le jeu hypnotisant de Billy-Bob Thornton, la tendre authenticité pugnace de l'actrice principale et les fêlures des personnages secondaires riches, je suis moins fan toutefois du jeu de Martin Freeman, un acteur que j'apprécie peu en général, bon... Là, ça fait le job, mais il en rajoute un peu, là où il n'était nul besoin.

Il n'est pas inutile de louer aussi la photographie magnifique des paysages d'hier, le rythme lent et envoutant du montage et une bande-son qui maintient le spectateur dans une ambiance oppressante et pourtant légère, alternant la chaleur des interieurs du midwest et les bises sifflantes d'une nature hostile.

Si je devais trouver à critiquer, on voit que je me force, je parlerais, peut-être des gimmics inhérents à tous les personnages. Le fait que absolument TOUS les personnages aient une espèce de devinette-parabole à sortir à un moment où à un autre de la série est un peu gonflant.

Ça sent un peu trop son scénariste derrière, mais, vu que ça n'arrive qu'une fois par épisode, grand maximum, ça passe encore.

Et puis bien sûr, plein de petites side-story qui sont laissées en plan, esquissée et puis, pouf disparu, parce que ça n'arrange pas... C'est un peu dommage.

Mais vraiment, c'est pour se casser la nénette à trouver à critiquer.

Ceux qui n'aiment pas les séries qui prennent leur temps risque de décrocher vite, ceux qui ont besoin d'effets de manches et de rires enregistrés pour déclencher leurs zygomatiques risque de demander où se cache l'humour pourtant omniprésent.

Ceux qui aiment les histoires violentes ne seront pas déçus (je n'en fait pas partie).

Voilà, qu'attendez vous pour aller voir cette série ?
CapitaineNemo
10
Écrit par

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le 29 déc. 2014

Critique lue 663 fois

1 j'aime

CapitaineNemo

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