Copenhagen Cowboy
6.3
Copenhagen Cowboy

Série Netflix (2023)

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Salmigondis boulimique d'esthétique et de symbolique.

Oui, il y a des -iques. Je dirais même qu'il y a beaucoup de hics.

On plonge de suite dans un univers très particulier, très contemplatif, sombre et coloré à la fois. Mais on déchante extrêmement vite.

D'abord, j'ai du mal avec toute cette violence gratuite qui se place presque d'un point de vue voyeuriste, sans que l'effet de dénonciation ne soit suffisamment prononcé pour que ca puisse être regardé plus sereinement.

Puis pour une femme qui est censée se « venger » de tout le mal qu'on lui a fait, je ne trouve pas que sa défense est à la hauteur. Myu reste muette et limite catatonique pendant toute la durée de la série. On aurait pu penser qu'alors elle accomplirait sa vengeance par d'autres moyens, à l'instar de la torture psychologique, mais non, elle reste dans une posture stoïque interloquante. Tu parles d'une vengeance ! Elle ne se défends que lorsque c'est nécessaire.

Il y a un côté très noir que je peux apprécier, le fait de réussir à capturer autant de désespoir et de souffrance et de trouver une touche d'humour cynique dans l'affreux, c'est quand même difficile. Il n'y a aucun espoir, on l'a compris.

Mais je ne pense pas qu'on puisse pour autant qualifier cette œuvre de misanthrope : dans la misanthropie, il y a une notion de considération du monde qui se construit petit à petit dans la tête de quelqu'un. La haine ou l'apathie.

Sauf qu'ici, on a que très peu d'informations sur l'intériorité de ces personnages, on effleure que vaguement leurs émotions profondes et leurs affects. Quand il n'y a aucun espoir, oui, ceux-ci peuvent être émoussés : mais une série se doit de nous faire un peu rentrer dans le cerveau des personnages, d'être un minimum psychologique. Sinon ca ne marche pas.

Au lieu de ca, on voit une Myu je-m'en-foutiste qui n'agit presque pas sur sa propre condition, et qui se laisse porter où le vent la mène. Ce qui aurait pu aussi être une idée, mais elle n'est pas assez exploitée pour pouvoir être considérée comme impactante. Ici encore, la série échoue à son devoir de faire rentrer le spectateur dans la peau de ses personnages. L'atmosphère est glaciale, trop glaciale. Et c'est bien son problème.

La nature humaine, c'est jamais de se contenter de ce qu'elle a déjà, mais de toujours en vouloir plus. Mise à part ce « fond » qui tente tant bien que mal de montrer cette sorte de cupidité insatiable de l'être humain, on sent qu'hormis ca...ben hormis ca il n'y a pas grand chose à creuser. Oui, la symbolique, la symbolique...elle pique ma curiosité, mais elle est si peu franche qu'on se demande si elle est si importante que ça dans la compréhension de l'histoire.

Il aurait fallu faire un choix entre l'afficher franchement quitte à pousser le cynisme à fond, ou la rendre plus discrète mais plus lourde de sens, qu'on comprenne qu'elle ait quelque chose à faire là.

Certaines œuvres cultivent le détail, et jouent à un jeu avec le spectateur qui ne peut pas s'empêcher de chercher des indices, des failles pour nourrir sa réflexion. Mais ici, la symbolique semble s'amalgamer avec « l'esthétique » de sorte à combler un espèce de vide, qui aurait peut-être été moins attiré l'attention si « le symbolisme » n'avait pas été si prononcé. C'est comme se faire un piercing sur le nez alors qu'on n'aime pas son nez. Il faut avoir sacrément confiance en soi pour le faire. Peut-être que le réalisateur était dans le même cas avec son symbolisme, qui n'a fait qu'attirer l'attention vers...du vide. Et encore, il y a le vide qui tourmente, qui nous happe, nous questionne. Mais celui-ci s'assimile à un vide « grumeleux ». On s'enfonce ainsi dans le pathos.

Des images léchées et des plans à rallonge ne feront jamais tout. Au fur et à mesure qu'on avance, la série perds de sa saveur. La musique est bien, c'est souvent la seule chose qui se démarque ne serait-ce qu'un petit peu de ce genre d'oeuvres. Elle, au moins, est dynamique.

Ca restera une expérience intéressante de le regarder pour moi qui n'ait pas l'habitude de ce genre de cinéma. Mais ca ne me parle pas, ca ne me saisis pas...Il y avait pourtant de l'idée, au tout départ. C'est dommage, Copenhagen Cowboy a manqué son potentiel initial.

p0mkanel
4
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Créée

le 18 juil. 2023

Critique lue 302 fois

1 j'aime

p0mkanel

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