Après avoir planté son bivouac dans l'immensité de l'Extrême-Orient, l'ami Tesson est littéralement tombé sur la tête. L'abus de petite eau ne faisant pas le moine, pirouette-cacahuète, c'est la caboche à peine réparée que notre russophile s'embarque dans le plus rocailleux des périples.


L'itinéraire semble moins spectaculaire qu'à l'accoutumée : l'objectif est de parcourir la France selon une diagonale allant du Sud-Est (départ : le Mercantour) au Nord-Ouest (arrivée : le Cotentin). Pas de side-car, ni de virées sur des lacs gelés. Exit la hype, place à l'ombre et aux bosquets cachés. La sobriété est élégamment affichée, l'espace plus confiné. "La diagonale du vide."


Ce livre, d'emblée moins percutant qu'un carnet de voyage en Sibérie, est plus profond dans le questionnement. Tesson ne se contente plus d'observer et d'étaler joyeusement sa science. Sur les chemins noirs, il préfère ruminer et puiser au plus profond de sa pensée.
Arachnéen, il cherche l'ombre pour étouffer un rythme de vie toujours plus rapide et plus bruyant. Tissant ainsi plus lentement ses pensées. Reptilien, il parcourt les cartes IGN à l'affût du moindre sentier délaissé. Telles les lézardes d'un paysage remodelé par l'Homme-machine, les sentiers délaissés sont de paisibles refuges pour une âme qui cherche un îlot de répit.


L'ouvrage est au final bien plus un essai qu'un récit de voyage. La géographie se mêle sans cesse à la philosophie.


Le choix de la marche marque un retour choisi à la simplicité et à la proximité ; un retour à la terre. Marcher d'abord pour se reconstruire, retrouver cet équilibre et cette élasticité mécanique. Marcher ensuite pour poser de nouvelles limites à son existence. Nouvelle donne : envisager des parcelles à taille humaine et non des steppes immenses. Marcher, découvrir notre environnement proche et s'y cloisonner pour mieux appréhender une réalité qui va trop vite et trop loin.


La sobriété retrouvée dans ce petit corps cabossé.

Miss_Cobblestone
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le 22 oct. 2016

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