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Cover Akira Kurosawa - Commentaires

Akira Kurosawa - Commentaires

Ce qui frappe le plus chez Kurosawa, c'est le magnifique humanisme qui transpire dans chacune de ses œuvres, un humanisme qui accuse sans détour les rouages sociétaux et la corruption du genre humain naturellement bon. Le mélange de genres, la diatribe d'un système de classes déshumanisant et les ...

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10 films

créee il y a environ 3 ans · modifiée il y a environ 2 ans

Chien enragé
7.6

Chien enragé (1949)

Nora inu

2 h 02 min. Sortie : 12 janvier 1961 (France). Policier, Drame, Thriller

Film de Akira Kurosawa

Émile Frève a mis 8/10.

Annotation :

Que doit-on faire lorsqu’un homme, honorable et empli de bonne volonté, se laisse submerger par un dégoût profond envers le monde l’entourant et qui finit par se métamorphoser en colère aveuglante? Lorsque la colère s’immisce, plus rien n’est possible, le chien a été mordu; il a la rage. La rage de la révolte.

Opposant la justice sévère et froide aux actes répréhensibles de faux criminels qui se sont inventés, l’espace d’une nuit, une profession nouvelle, Kurosawa élabore un puissant dilemme (qui reparaîtra à plusieurs occasions dans ses futures réalisations) où l’humanité se voit critiquée et jaugée. Entre le jeune policier, rongé par une culpabilité déraisonnable, et le voleur infatigable qui sème la mort derrière lui, il n’y a presque aucune différence. Ce sont des personnes similaires, en proie aux mêmes questionnements, mais qui n’ont pas emprunté le même chemin. « Il n’y a pas de mauvaises personnes, que de mauvaises situations. » En plus de poser un regard humaniste sur la question du crime, Kurosawa parvient à créer une intrigue brillante restituant parfaitement la vitesse décroissante d’une enquête criminelle où, moins les éléments avancent, plus l’obsession devient importante. Et lorsque la beauté (un champ de fleurs) engloutit le pauvre voleur, la culpabilité triomphe et l’être torturé se rend dans un dernier cri désespéré. Il lui fallut revoir un peu de beau pour pouvoir encore y croire. Ainsi, juxtaposée à la souffrance de l’homme, la beauté de la scène gagne une fantastique noblesse.

Rashōmon
7.9

Rashōmon (1950)

1 h 28 min. Sortie : 18 avril 1952 (France). Policier, Drame

Film de Akira Kurosawa

Émile Frève a mis 8/10.

Annotation :

Lorsque commence Rashômon, l’histoire principale du film a déjà pris fin. Un huis clos psychologique, imposé par la nature et ayant pour but de démêler une fois pour toutes la nature humaine, a confiné trois personnages. Ce ne sont non pas les protagonistes, mais plutôt des témoins de l’affaire principale. Sempiternelle, une barrière de pluie sépare les témoins du monde extérieur, les obligeant à ressasser les étranges évènements auxquels ils ont assisté. Enfin, une affaire particulière doit être réglée : le meurtre d’un homme honorable. Deux procès sont organisés : un premier cherchant à trouver le coupable (l’officiel) et un second cherchant à évaluer, sonder et juger l’être humain. Se trouvant être le plus crucial, le procès (officieux) qu’entreprennent les trois hommes semble être bien complexe. Dans un océan d’horreurs, il leur faut déterminer si oui ou non l’humanité est juste et bonne. Trois hommes jugeant l’humanité en se basant sur trois pauvres témoignages : audacieuse est la tâche. À l’aide d’effets scénaristiques ingénieux (on n’entend jamais le juge, on comprend plutôt les questions de celui-ci grâce aux réactions des témoins), Kurosawa élimine les éléments parasites et resserre l’attention du spectateur sur l’essence du récit. Peu flamboyant, simple comme le sont les trois protagonistes, Rashômon est un film humain, pas seulement dans ses thèmes, mais dans sa réalisation sobre et humble.

Vivre
8.1

Vivre (1952)

Ikiru

2 h 23 min. Sortie : 31 août 1966 (France). Drame

Film de Akira Kurosawa

Émile Frève a mis 9/10.

Annotation :

S‘inspirant fortement du célèbre conte Un chant de noël de Charles Dickens, Vivre nous introduit dans la vie de Kanji Watanabe, fonctionnaire blasé apprenant qu’il est atteint d’un cancer de l’estomac. 6 mois à vivre lui sont donnés. L’homme qui, depuis plus de 20 ans, vivait en dormance, abruti par la routine, se voit obligé de se reprendre en main. « On ne réalise la beauté de la vie que quand nous sommes confrontés à la mort. » Survient donc une volonté de vivre chez Watanabe qui se traduira par des tentatives de faire le bien autour de lui. Mais l’intérêt du film repose sur le fait qu’un chapitre du film se déroule après sa mort. On peut ainsi remarquer l’impact (finalement positif) qu’a pu avoir le malheureux sur son entourage avant que la maladie ne l’emporte. À une histoire déjà fort touchante, Kurosawa ajoute une sévère critique du système de travail, l’accusant de déshumaniser tous ceux qui s’aventurent en son sein. Toujours éminemment créatif, chaque plan que Kurosawa imagine est unique. En constante recherche d’effets stylistiques, le réalisateur filme avec une efficacité (aucun plan n’est superflu) dont il est le seul à avoir le secret. Empruntant des mimiques à l’expressionnisme allemand, les personnages sont extravagants, on pourrait même dire exagérés. Tel est l’étrange réalisme de Kurosawa : plus les personnages sont irréels, plus ils nous semblent humains. En outre, rares sont ceux pouvant se vanter d’avoir saisi le pouvoir d’un visage au cinéma, Kurosawa en fait partie. En effet, il exploite au maximum le faciès de Takashi Shimura (qui signe une performance bouleversante) avec maints gros plans à la fois humbles et d’une force indicible. Encore une fois, il signe un film sur ce sujet bien vaste qu’est l’être humain. Entre un humanisme intelligent et un propos sur la quête humaine et l’éternel recommencement, on se perd dans cette œuvre immense et magnifique. Mention spéciale à la scène « Gondola no uta »

Les Sept Samouraïs
8.5

Les Sept Samouraïs (1954)

Shichinin no samurai

3 h 27 min. Sortie : 30 novembre 1955 (France). Arts martiaux, Aventure, Drame

Film de Akira Kurosawa

Émile Frève a mis 9/10.

Annotation :

Sept samouraïs à la rescousse d’un village de fermiers. Existe-t-il chose plus héroïque? Pourtant, de ces sept samouraïs disparates, aucun ne correspond au modèle du brave et intrépide guerrier que l’imaginaire collectif a forgé. Aux caractères diamétralement opposés, le seul point qui semble les réunir, ce sont les craintes qu’ils partagent. Dans une certaine mesure, on pourrait même dire que leur héroïsme se définit par l’humilité dont ils sont dotés et non pas par leur fougue. Car, au fond, ce ne sont pas des êtres surnaturels, mais bien des humains, au même titre que les fermiers. Mêlant naturalisme et humanisme, Kurosawa construit un récit teinté de bonté où il place au centre de l’histoire l’être humain et ses sentiments. Créant des fresques sublimes mais empreintes de simplicité, il conjugue souffrance, peur, désespoir et gaieté. Toujours très précise, la composition des plans permet à Kurosawa d’appuyer son propos sur l’être humain en le mettant en valeur. Grandiose et modeste à la fois, Les Sept Samouraïs est doté d’une réalisation brillante, où la caméra, souvent en retrait, est utilisée à la manière d’un vecteur d’émotions, accompagnant les personnages dans leur aventure. Les Sept Samouraïs est une œuvre intemporelle en cela qu’elle raconte l’humanité, cette humanité qui toujours côtoie l’inéluctable mort.

Vivre dans la peur
7.2

Vivre dans la peur (1955)

Ikimono no kiroku

1 h 43 min. Sortie : 22 novembre 1955 (Japon). Drame

Film de Akira Kurosawa

Émile Frève a mis 7/10.

Annotation :

Se basant sur le traumatisme qu’a subi toute une nation lors des incidents d’Hiroshima et de Nagasaki, Kurosawa élabore une histoire où un riche père de famille, sensé et raisonnable, succombe à la peur de voir sa vie (et surtout celles de ses proches) se terminer abruptement pour cause de bombes atomiques. Transposant les peurs d’une génération à l’ère de la guerre nucléaire, il insuffle dans son personnage (symbolisant la crainte des Japonais à l’époque) une candeur et un dévouement sans pareils qui font de celui-ci une déchirante figure déboussolée. Tel le Père Goriot, trop bon à l’égard de sa famille, on se moque de lui, on l’accuse d’être fou et on va même jusqu’à souhaiter sa mort afin de toucher une part d’héritage. D’une famille défectueuse et aux problèmes de communication flagrants, le pauvre homme et sa femme, qui endure tout avec un stoïcisme teinté d’une immense tristesse dans le seul but que la famille survive, paraissent être les seuls êtres réellement pourvus d’humanité. Au final, d’un film humble, sans éclat ni style visuel épatant, qui parvient à traiter du climat anxiogène du Japon des années 1950 tout en tenant un propos fort sur la famille et en y joignant une réflexion sur la folie, concept trop souvent flou et pas assez compris, il en résulte une œuvre humaine, réussie et marquante.

Le Château de l'araignée
7.9

Le Château de l'araignée (1957)

Kumonosu-jô

1 h 50 min. Sortie : 27 avril 1966 (France). Drame

Film de Akira Kurosawa

Émile Frève a mis 8/10.

Annotation :

Kurosawa s’attaque ici à gros, le désir qui pousse tout être humain à sa perte, celui qui le rend esclave de son esprit et brouille terriblement sa vue : l’ambition. « Sans ambition, un homme n’est pas un homme. » Provoquée ici par l’apparition farfelue d’un esprit prédisant la gloire de deux amis (Washizu et Miki), puis par la manipulation psychologique que la femme de Washizu lui fait subir, aliénée elle aussi en raison de la promesse du pouvoir, l’ambition est d’abord crainte des protagonistes (« Vous avez peur de vos désirs. » leur dit-on), mais se métamorphose rapidement (chez Washizu) en une confiance et une arrogance absurdes corrompant sa pensée. Là où l’intérêt réside, outre la photographie d’une superbe ingéniosité qui permet, à travers la composition des plans, de restituer l’état émotionnel des protagonistes, c’est dans son traitement de l’obsession qui fait que tous les évènements ramènent Washizu à son ambition démesurée (les chants, les discussions, les présages). Parlant de présages, Kurosawa, tout au long du récit, sème des indices, sortes de prémonitions anodines et jamais prises au sérieux, mais qui, lorsqu’on les additionne, forment un message évident envoyé par le destin (dans ce cas-ci, Kurosawa s’arroge le droit de divinité) : l’ambition causera la ruine de tout homme. Errant de pièces vides en pièces vides, espaces permettant à ses peurs et à son ambition de proliférer, Washizu se cloître et devient l’auteur de sa propre solitude. Au final, la boucle est bouclée, la brume sur laquelle s’était entamé le film reparaît afin de le clore, la trahison du début revient terminer définitivement le récit et le silence se fait de nouveau sur la tombe de Washizu, seulement, cette fois-ci, pour être éternel.

Le Garde du corps
8

Le Garde du corps (1961)

Yojimbo

1 h 50 min. Sortie : 25 avril 1961 (Japon). Arts martiaux, Aventure, Drame

Film de Akira Kurosawa

Émile Frève a mis 8/10.

Annotation :

Le vent hurle et le silence est menaçant. Un effroyable grondement semble s’échapper de ce village aux allures fantomatiques. Arrive l’inconnu, l’homme sans nom, l’étranger, énigmatique personnage qui impose immédiatement le respect. Motivé par l’appât du gain, il se retrouve au beau milieu d’un conflit qui scinde en deux le village, mobilisant chaque résident, forçant chaque personne à prendre parti. Il n’y a que les épées capables de mettre fin au conflit désormais, nous dit-on. L’étranger devient alors la clé du combat étant donné son talent au maniement du sabre. Alléché par l’odeur de l’argent, il manipule et use des deux camps selon ses envies, envisageant plutôt cette guerre comme un divertissement que comme un véritable affrontement. Toutefois, un jour, comme tout être humain, il faillit à son crédo. La compassion s’immisce chez cet être supposément sans scrupules et lui fait perdre la face. Même dans les cœurs les plus froids peut poindre un soupçon de bonté : le Kurosawa humaniste vient de refaire apparition et insuffle un nouveau sens au récit. La lenteur des scènes d’affrontement permettant d’infuser la tension accompagnée d’une formidable musique excentrique (parfois versant trop dans le mélodrame) créent des scènes magiques retenant beaucoup du western, mais qui, grâce à l’esthétique de Kurosawa, parviennent à se libérer des codes préétablis et acquièrent une fabuleuse poésie. Huis clos étrange où l’hostilité se mue souvent en amitié, Le Garde du corps ne réinvente rien, mais reste cependant un agréable film éminemment bien réalisé qui traite du moment où l’humanité refait surface chez des personnages supposément dénués de sentiments.

Sanjuro
7.9

Sanjuro (1962)

Tsubaki Sanjûrô

1 h 36 min. Sortie : 1 janvier 1962 (Japon). Arts martiaux

Film de Akira Kurosawa

Émile Frève a mis 7/10.

Annotation :

Suite directe du Garde du corps, Sanjuro s’intéresse, contrairement au premier opus qui se focalisait sur l’unicité et l’indépendance du héros, à la collectivité, usant de plans d’ensemble remplis de personnages dans le but de capturer les émotions qui traversent les divers groupes. Toujours à part dans la composition de l’image, le protagoniste conserve toutefois sa singularité au sein de la masse. Parlant du protagoniste, celui qui autrefois fut Yojimbo le profiteur n’est plus, il est désormais Sanjuro le justicier. Son caractère ainsi moins mystérieux et plus étoffé s’oppose maintenant profondément au mal; l’arrivisme sans vergogne qui le constituait s’est métamorphosé en un altruisme solennel. Versant dans une forme de manichéisme assumée (même les méchants reconnaissent leur vilenie) et jouant en permanence sur les apparences (autant au niveau de la vraie nature des personnages que sur la géographie des lieux), Sanjuro excelle dans le mélange des genres et poursuit la prise de conscience entamée lors du Garde du corps. Après s’être rangé du côté du bien, Sanjuro, touché par la pureté et la simplicité des deux femmes qu’il a sauvées, prend conscience du prix d’une vie, qu’elle ait été noble ou non. Ainsi s’élève du protagoniste la morale du film (le plus habile des guerriers ne se servira jamais de son épée) qui condamne la violence outrancière de son propre récit, signe de la lucidité du réalisateur.

Entre le ciel et l'enfer
8.4

Entre le ciel et l'enfer (1963)

Tengoku to jigoku

2 h 23 min. Sortie : 9 juin 1976 (France). Drame, Thriller

Film de Akira Kurosawa

Émile Frève a mis 9/10.

Annotation :

Jonglant entre film à dilemmes, enquête policière, diatribe politique et film noir, Entre le ciel et l’enfer est, par son ingéniosité autant scénaristique que plastique, une œuvre d’une extrême lucidité lui conférant une grandeur sans pareil dans le cinéma japonais. Comme il nous l’avait déjà démontré dans Les sept samouraïs, Kurosawa est maître dans l’art du mélange de genres et, ce faisant, Entre le ciel et l’enfer est son ultime aboutissement, la preuve de sa supériorité. Rares sont les films qui parviennent à tenir le spectateur en haleine sans jamais s’essouffler : ici, la réussite est totale. La musique, passagère et même discrète, ponctue le récit et accroît la tension lors des moments cruciaux. De plus, la traque du criminel par les policiers est admirablement racontée; l’enquête, oscillant entre témoins, preuves et enregistrements se métamorphose rapidement en une immense orchestration où chacun tient un rôle majeur.

Entre le ciel et l’enfer. Le ciel, la villa du riche homme d’affaires qui surplombe la ville; l’enfer, la pauvre habitation du malheureux criminel. Les lois du capitalisme, impitoyables, ont oxydé le cœur du criminel et détruit la vie du riche homme d’affaires. D’un jeune homme que, pendant un certain temps, on percevait comme le mal incarné (même procédé dans M le maudit) s’élève une justification plus triste de ses crimes : l’écart des classes et l’injustice ont corrompu son âme. Le capitalisme a provoqué une déshumanisation collective, et ce, tant dans les hautes sphères que dans les basses. Une fois rattrapé vient la peine de mort. Ne réglant rien et étant plus barbare que tous les crimes imaginables. Ainsi se termine le brillantissime Entre le ciel et l’enfer, dans un regard plein d’humanité dirigé vers le pauvre jeune homme tremblant de peur à l’idée de mourir. Un chef-d’œuvre.

Kagemusha - L'Ombre du guerrier
8

Kagemusha - L'Ombre du guerrier (1980)

Kagemusha

3 h. Sortie : 1 octobre 1980 (France). Drame, Historique, Guerre

Film de Akira Kurosawa

Émile Frève a mis 8/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Il suffit d’observer les éclats de détresse qui défilent au creux du regard, sépulcral, abattu, de ce faux seigneur et vrai va-nu-pieds lorsque, désorienté, il est acculé aux dévastations d’un monde qu’il dirige servilement. Alors reparaît l’humanité qui occupa à tout instant les motifs thématiques de Kurosawa; le protagoniste offre une image parabolique de l’univers social qui le voit tour à tour consacré puis désavoué. Il est la plus pure et immaculée incarnation d’une humanité tailladée et morcelée par les turpitudes de la société. (Tiré de ma critique.)

Pour un avis plus étoffé, voir ma critique.

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