Bon, bon, bon… Hearts of Stone est le premier DLC de The Witcher 3, rajoutant du nouveau contenu dans la région Nord-Est de Novigrad ainsi qu’une quête tournant autour de la figure de Gaunter de Meuré et de l’histoire des von Everec. Ce DLC est un peu un condensé de tous les défauts de The Witcher 3, sans les rares qualités, et franchement je n’ai pas envie de trop m’éterniser dessus.


Bon, parlons vite fait de la quête principale de ce DLC. Déjà, l’ancrage de la nouvelle histoire est vraiment maladroit, dû en partie à l’absence d’impact de nos décisions sur le monde de jeu : on entend régulièrement les soldats parler de Radovid, or j’ai tué celui-ci à la fin de ma quête principale dans le jeu de base, donc théoriquement ce DLC se situerait avant la fin du jeu de base. Or, un peu plus tard, au cours d’une discussion, Shani nous apprend que Radovid est bel et bien mort… De même, lorsque l’on discute avec la Comtesse Mignolle, on lui apprend la mort de Vesemir. Donc, l’histoire du DLC se passerait en parallèle des évènements de l’extrême fin du jeu de base, entre la bataille de Kaer Morhen et la bataille finale. Autant dire que ça passe difficilement et que c’est un peu absurde, car je vois mal comment justifier une telle digression. M’enfin, comme le DLC ne sait pas trop sur quel pied danser, j’ai préféré jouer en me disant que les évènements de Hearts of Stone sont non-canoniques, c’est préférable pour une question d’immersion et de jeu de rôle.


Au-delà de cette maladresse, l’histoire du DLC bénéficie d’une mise en scène travaillée et encore meilleure que dans le jeu de base. Comme d’habitude, CD Projekt Red a fait un bon boulot dans la forme… La nouvelle histoire, dans son ensemble, n’est qu’un prétexte pour nous faire accomplir des tâches inhabituelles comme larbin au service d’une espèce de Djinn, Gaunter. Cette histoire n’est vraiment pas extraordinaire et surtout, assez souvent grotesque et tirée par les cheveux… Comme d’habitude, le seul véritable intérêt de l’écriture du DLC réside dans ses personnages, notamment dans la personnalité intéressante de Gaunter de Meuré, personnage que j’ai bien apprécié, je dois le dire. Le DLC tourne également autour de la tragédie entre Iris et Olgierd von Everec, tragédie qui m’a laissé parfaitement indifférent, d’une part parce que j’étais blasé du gameplay répétitif du jeu, d’autre part parce que le coup du «méchant» qui était en réalité sous l’emprise d’un «esprit du mal» et qui redevient gentil une fois retrouvé son cœur normal, bon, c’est du classique.


Et bien sûr, le DLC nous fait retrouver Shani, que l’on n’a plus vue depuis le premier jeu. Et je crois que c’est le seul point vraiment intéressant de ce DLC, même si on nous ressort toujours les mêmes fadaises à propos de la relation entre Shani et Géralt, comme quoi ils ont deux modes de vie totalement différents et qu’ils ne peuvent donc construire une relation durable… Et donc à la fin du DLC, les deux continuent leur chemin, chacun de leur côté, et Shani part en coup de vent, ne laissant derrière elle qu’une rose sur la tombe de Vlodimir. Bon, The Witcher 2 usait des mêmes arguments en tout début de jeu pour justifier la relation forcée entre Géralt et Triss, donc ils se sont pas bien foulés pour l’écriture du DLC, et les retrouvailles avec Shani sont finalement trop peu développées et même un peu bâclées. Géralt et Shani ne disent par exemple pas un mot à propos d’Alvin, qui était pourtant très important pour eux deux ; c’est assez décevant.


Il y a bien quelques moments sympathiques, comme le passage dans l’hôtel des ventes de Borsody qui sort un peu de l’ordinaire, permet de développer un peu notre relation avec Vivaldi et surtout, donne un autre éclairage sur Vesemir à travers la Comtesse Mignolle, et ça c’est appréciable. La quête pendant laquelle on est possédé par Vlodimir, si elle est ridicule et grossière, a au moins le mérite de nous faire changer de rôle et donc jouer un peu différemment. Ils auraient par contre pu travailler un peu l’ambiance du mariage, puisqu’on entend les mêmes musiques qu’on entend habituellement à Novigrad… Créer une musique spécialement pour l’occasion aurait rendu la scène plus singulière. Enfin, le passage dans la toile monde est très intéressant visuellement, et j’ai beaucoup aimé l’ambiance de la maison des von Everec…


C’était la partie frivole de ma critique, il est maintenant temps de s’attaquer aux choses sérieuses : qu’a à proposer ce DLC dans le fond, dans ses mécaniques ? Est-ce que CD Projekt Red s’est amélioré pour proposer une expérience plus riche et plus intéressante ? Non. C’est toujours aussi mauvais, répétitif et peu inspiré. Les quêtes du DLC sont encore plus linéaires et dirigistes que celles du jeu principal, et le jeu vous donne en permanence l’illusion d’avoir le choix alors que toutes vos décisions n’ont absolument aucune conséquence sur le déroulement des quêtes. La quête Sésame ouvre-toi! aurait pourtant pu devenir très intéressante si le jeu nous laissait planifier le cambriolage par nous-même, mais comme d’habitude, CD Projekt Red dirige tout et nous prend par la main. Alors est-ce que cette linéarité est au moins justifiée par une écriture exceptionnelle ? Absolument pas, puisque comme vous l’avez compris, l’histoire du DLC est très banale et peu immersive.


‘Faut dire que le DLC partait plutôt mal. Comme à mon habitude, j’ai exploré la nouvelle région et fait tous les «nouveaux» points d’intérêt avant de me lancer dans la quête du DLC, et je peux vous dire que les gars chez CD Projekt Red ont été d’une fainéantise phénoménale. Premièrement, en ce qui concerne la forme, la nouvelle région au Nord-Est rajoute principalement des domaines de seigneurs, des vignobles et des villages, autrement dit rien de bien nouveau… Et surtout le contenu du DLC est boursouflé de remplissage, et la carte de Hearts of Stone est bourrée de points d’intérêt similaires et sans aucun intérêt. CD Projekt Red n’a absolument pas tiré une leçon des erreurs de The Witcher 3, c’est pitoyable. Les points d’intérêt rajoutés par le DLC, en plus d’être identiques aux dizaines d’autres qui pullulent sur les cartes du jeu principal, sont pour la majorité d’entre eux des camps de bandits ou des nids de monstres. Ils ont réussi l’exploit de rendre l’exploration de leur monde ouvert encore plus superficielle et systématique que dans le jeu de base, c’est fort tout de même !


Allez, je concède toutefois qu’ils ont bien fait un petit effort pour essayer de dissimuler la pauvreté de leurs points d’intérêt sans âme, en faisant en sorte que l’on trouve dans chaque lieu une petite histoire, souvent macabre, liée à l’endroit. Pareil, les camps de chevaliers déchus de la Rose Ardente possèdent tous des ordres ou des petites notes qui les lient entre eux et leur donnent une petite histoire. C’est un détail appréciable, mais encore une fois, à quoi sert de rajouter de tels détails dans la forme si, à côté, ces points d’intérêt sont tous identiques entre eux dans le fond ? Parce qu’en explorant le monde, on ne ressent absolument pas le côté sordide des histoires racontées dans les notes, tout simplement parce que ces points d’intérêt sont constitués des mêmes tâches à remplir que l’on a déjà faites des dizaines de fois auparavant et tuent toute immersion. Comme l’exploration du monde reste toujours trop balisée et convenue, on ne ressent pas en jeu l’atmosphère que le DLC voudrait créer. Je ne veux pas qu’on me raconte des histoires à travers des notes de journal, j’ai envie d’y ressentir en jeu, mais ça n’arrive jamais car le jeu est trop artificiel pour ça. Quand j’arrive dans un énième point d’intérêt, la seule chose qui en ressort ce sont ses objectifs sans intérêt, déjà vus, et identiques à tous les autres. Aucun point d’intérêt n’est suffisamment singulier pour devenir marquant. Par exemple, j’arrive dans un camp de bandit, identique à tous les autres camps de bandits, je tue les bandits, je pille le camp, je lis la note et : «tiens, ce lieu avait une histoire… D’accord, au suivant». Voilà la conception de l’exploration de CD Projekt Red…


Pour finir, le nouveau bestiaire est vraiment peu imaginatif : vous allez croiser des sangliers, des Arachnomorphes (araignées géantes) et un des Boss du DLC n’est autre qu’un Crapaud géant. Là ils n’avaient plus d’idées chez CDPR. Par contre, je dois avouer que ces nouvelles bestioles sont assez intéressantes en terme de gameplay car elles possèdent des comportements uniques en combat, ce qui nous pousse à nous adapter et à changer de technique pour en venir à bout. Les combats de Boss par contre sont vraiment barbants. Que ce soit le Crapaud, le Gardien ou la «Peur d’Iris», ils ne représentent aucun défi (alors même que je joue en Marche de la Mort, c’est dire...) mais sont justes longs et ennuyants à combattre, c’est insupportable.


Voilà, voilà, c’était Hearts of Stone… Le DLC a bien une durée de vie tout à fait raisonnable, puisqu’il m’a fallu une quinzaine d’heures pour l’achever à 100%, mais vu que ces quinze heures sont constituées soit de remplissage, soit de quêtes linéaires et sans intérêt, autant vous dire que c’est un peu de l’arnaque. D’ailleurs, heureusement que j’ai eu ce DLC avec l’édition «Game of the Year», sinon ça m’aurait bien énervé de payer 10 euros pour un DLC si dispensable et sans intérêt. A part les retrouvailles avec Shani et la scène dans l’hôtel des ventes, il n’y a pas grand-chose à sauver de ce Hearts of Stone… Encore une fois, on ressent en permanence que la trame du DLC est secondaire et sans importance. On ne se sent jamais impliqué dans l’histoire, et une fois le DLC fini, on a juste l’impression d’avoir fait une quête secondaire à rallonge qui n’en valait pas vraiment la peine. La linéarité renforcée dans les quêtes du DLC n’est justifiée ni par l’histoire (banale et grossière), ni par les mécaniques de jeu (pauvres et artificielles), et témoigne juste de la fainéantise de CD Projekt Red. Pour conclure, quand on joue à Hearts of Stone, on sait que tout ce que l’on fait n’aura aucun impact sur le monde de jeu, sur l’histoire, sur les liens avec les personnages… Autrement dit, on joue en vain.

Charlandreon
5
Écrit par

Créée

le 3 oct. 2020

Critique lue 2.8K fois

2 j'aime

Charlandreon

Écrit par

Critique lue 2.8K fois

2

D'autres avis sur The Witcher 3: Wild Hunt - Hearts of Stone

Du même critique

Syberia II
Charlandreon
9

La suite d’une grande Aventure

Après Syberia, j’étais très curieux de savoir si Benoît Sokal et l’équipe de Microïds allaient réussir à créer une suite avec le même niveau d’excellence que le premier opus, même si je me doutais...

le 7 nov. 2020

4 j'aime

Final Doom
Charlandreon
9

DOOM pour les vétérans

«Plutonia a toujours été destiné à ceux qui avaient fini DOOM II en Difficile et qui cherchaient un nouveau défi. Je jouais toujours aux niveaux que j’avais fait en Difficile, et si je pouvais les...

le 3 sept. 2020

3 j'aime

2