Boule à facettes

Malgré une communication hasardeuse de Sega, à base d'environnements grisâtres et de rails flottant dans le ciel sans raison apparente, j'avais bien envie de tenter l'aventure Sonic Frontiers. Pourtant je ne suis pas particulièrement friand de la série, même si j'ai touché quelques opus ça et là depuis l'époque MegaDrive. Et au final, si la mouture "open world" (on reviendra sur ces guillemets) n'est pas un triomphe, ce n'est pas non plus l'échec auquel je m'attendais craintivement.

Car oui, l'île montrée dans les trailers est effectivement assez laide: terrains quelconque dans une grisaille ambiante et ennemis génériques au possible. Mais les îles suivantes rajouteront un peu de couleur et de variété. Mais il ne faut pas non plus espérer des miracles, car si ce n'est pas laid graphiquement, les designs des adversaires sont aseptisés et il est rapidement compliqué de distinguer une créature d'une autre. Les plus beaux assets du jeu? Les poissons que l'on pêche dans une petite activité annexe, où les graphistes ont apporté un soin tout particulier à nos captures, c'était bluffant (et incompréhensible tant ça saute aux yeux par rapport au reste)

La technique, quant à elle, est au fraises : clipping, détourage flou, et autres bugs de textures sont à prévoir. Heureusement, le jeu n'a pas planté une seule fois dans ma run, donc les soucis techniques ne sont vraiment que de l'ordre de l'esthétique… mis à part la caméra, qui, comme dans tous les Sonics en 3D sur lesquels j'ai posé mes paluches, à du mal à faire la jonction entre les différents angles et vous fera souvent partir dans le décor. Ce qui brise le rythme, fondement même de la licence du hérisson bleu.

Continuons sur la forme avec la bande-son. Que ce ne soit pas à mon goût, cette musique rock japonaise d'anime, c'est une chose. Mais le fait est qu'au début de l'aventure, à part un fond sonore d'ambiance que l'on ne remarque vite plus, la seule autre manière d'écouter de nouveaux morceaux, c'est d'en récupérer d'autres dans nos pérégrinations. Du coup on se retrouve intialement avec 2-3 morceaux qui tournent en boucle, ce qui va vite vous taper sur le système.

Enfin, on évoquera rapidement le scénario, basique et enfantin, mais avec de véritables efforts de mise en scène dans les phases d'action (il y a un côté shonen à l'ensemble, avec de fortes réminiscence des combats de boss de la série Ultimate Ninja Storm).

Mais du coup, une fois établi que la forme, c'est pas ce que l'on recherche (ni ce qui est réussi) dans un Sonic, qu'en est-il du fond? Est-ce agréable manette en main? Eh bien ma foi, oui, malgré quelques freins. Notre héros est connu pour sa vitesse, et la formule open-world semblait donc toute indiquée pour traverser des terrains à toute berzingue. Et c'est bien là-dessus que notre hérisson tire son épingle, en exploitant les codes de sa licence dans un genre tout aussi codifié. Et si l'on n'échappera pas à la foultitude de collectables, aux tours permettant de dévoiler la carte (ici, plutôt des petits puzzles que des tours) et une légère approche RPG (comprendre augmentation de stats insignifiantes et mini-arbres de compétences), l'éventail de capacités de la mascotte Sega est assez plaisant, tant en combat qu'en exploration. Tout ce qu'il faudra pour traverser ce faux monde ouvert, en réalité composé de cinq grandes zones déconnectées les unes des autres. Le traversal est agréable donc, même si le fait de marcher sur un booster par accident peut vous lancer sur un parcours que vous ne pourrez pas quitter et qui vous entraînera bien loin de votre destination initiale (pourquoi?). Ajoutez à cela une agréable variété d'activité, allant de la pêche susmentionnée, à des séquences de shoot'em up, en passant par de la corde à sauter ou des combats à base de QTE. Rien de transcendant donc, mais de quoi briser tout sentiment de monotonie.

Enfin, cerise sur le quatre-quart tout à fait correct mais qui ne tient pas la chandelle à un moelleux au chocolat, on a le droit à une petite quarantaine de niveaux old-school, 2D ou 3D, rappelant tout de même que Sonic n'a pas oublié ses origines. La plupart sont funs à parcourir, avec des objectifs de vitesse, de pièces rouges à collecter, ou d'un nombre d'anneaux à avoir sur soi en fin de course, tandis que d'autres sont de véritables plaies. Il faudra dans tous les cas passer par ces stages "cyber-space" pour progresser dans l'histoire, mais ce n'est pas plus mal du fait de la variété qu'ils apportent.

Sonic Frontiers est donc un titre plutôt sympathique, qui sait utiliser les forces de la licence pour les apposer dans un nouvel environnement où il paraît de plus en plus compliqué d'innover. Et donc, quitte à faire comme les autres, autant mettre l'accent sur ce que l'on sait faire. Une petite recommandation donc, pour qui n'est pas réfractaire à un habillage assez laid.