Ah, là là, la vie en rose ... le rose qu'on nous propose !

WonderWoman est de retour et hante à présent les années 80 !
Que vaut cette suite des aventures de la plus belles des Amazones ?



1984



Pourquoi les années 80 ?
On ne saurait le dire, puisque pour l'intéressé - Steve Trevor - l'an 1969 eût tout à fait suffit ...
À moins que ce ne soit pour faire revenir WonderWoman pile l'année où apparaissait Supergirl au cinéma ? Mais aucune allusion à la chose ...
Ou parce que les années 80 triomphent en chansons diverses dans les blockbusters actuels ... pas une trace non plus ...
Est-ce en rapport avec le roman d'Orwell ? Ah, déjà plus ! Puisqu'il est question ici de vérité et de mensonges, de quête de pouvoir et même d'un satellite en état d'observer et d'être vu par tout le monde: is Big Brother watching you ? No, asking you ...
Mais alors, pourquoi diable les années 80 ?
Sans doute pour le début du recul devant la société de consommation que condamnent déjà certaines fictions plus populaires que Les Choses de Georges Pérec. Car qu'est-ce que le méchant de ce film - campé par un Pedro Pascal comme sous ecstasy pour s'éloigner au plus de son rôle calme et taiseux de Mandalorien - sinon la caricature du politicien, beau parleur sans consistance, qui promet la lune et n'offre que du vent ou de beaux mensonges ? Caricature pertinente et réussie ... mais était-il besoin des années 80, et plus particulièrement de la très polysémique et connotée année 1984, pour cela ?



Les Souhaits ridicules



Partant de cette volonté de caricature, le métrage dénoncera de façon très intéressante et prenante le paraître, les illusions, l'ambition, opposera la vertu et la vérité à au vice et au mensonge.
WonderWoman elle-même n'est pas exempte, qui tombe dans un piège de carte de visite de Marabout (faire revenir l'être aimé dans les 24h).
C'est là le point fort et culminant du film: les souhaits et leurs conséquences. Conséquences ici folles qui menace l'intégrité de la Terre toute entière. Le méchant suit le modèle du souhaiteur rusé qui demande à pouvoir faire autant de souhaits qu'il le souhaite mais connaît un revers que ce type de personnage ne connaît généralement pas. Car la morale, ici, rejoint celles du conte Les Souhaits ridicules de Charles Perrault ou de la fable Les Souhaits de La Fontaine:



Bien est donc vrai qu'aux hommes misérables,
Aveugles, imprudents, inquiets, variables,
Pas n'appartient de faire des souhaits,
Et que peu d'entre eux sont capables
De bien user des dons que le Ciel leur a faits.



et



Au bout de deux souhaits étant aussi chanceux
Qu'ils étaient, et que sont tous ceux
Qui souhaitent toujours et perdent en chimères
Le temps qu'ils feraient mieux de mettre à leurs affaires.
(...)
Ils demandèrent la sagesse ;
C'est un trésor qui n'embarrasse point.



Sur ce point, le film est admirable et le final, qui ne punit pas mortellement ses antagonistes mais leur enseigne l'humilité car à son héroïne, sait retourner les craintes et aspirations des personnages pour les leur montrer dans tout leur ridicule.


Pourtant, même ce point peut être perçu comme un défaut: on notera en effet que, pour le même message, avec peut-être plus d'efficacité, les auteurs ci-avant cités ont usé de 152 petits vers voire 62 quand le métrage demande pas moins de deux bonnes heures et demie d'attention ...


Pour citer Perrault dans ses Souhaits ridicules, en morale pour ce film (et bien d'autres de ce genre d'ailleurs):



Mais vous qui mieux qu'âme qui vive
Savez charmer en racontant,
Et dont l'expression est toujours si naïve,
Que l'on croit voir ce qu'on entend ;
Qui savez que c'est la manière
Dont quelque chose est inventé,
Qui beaucoup plus que la matière
De tout Récit fait la beauté,
Vous aimerez ma fable et sa moralité (...)



Ce n'est pas là ce qui ennuie le plus votre serviteur: à bien comparer WonderWoman dans ce 1984 et le Supergirl de 1984, force est d'observer qu'elle se fait la défense du renoncement quand la cousine de Superman appelait à ne jamais renoncer ...
Mais, cela, c'est une question de point de vue individuel de spectateur et de spectatrice.



Le Féminisme qui se veut poli



Pas trop parasite mais tout de même présent: le problème du féminisme maladroit.
Il n'est pas question ici de renâcler à accepter la figure des Amazones.
Il est question de ces rues et de ces soirées mondaines si normales dans le reste des métrages du DCU où l'on retrouve Diana Prince qui se trouvent soudainement envahies de clochards et d'hommes en costard libidineux dont la seule préoccupation existentielle est de poursuivre les femmes de leurs assiduités voire même de les agresser sexuellement.
Si cela crée un décalage incompréhensible avec le reste du DCU, cela s'avère surtout gênant voire incohérent dans certains passages.
Encore une fois, il n'est pas question de souligner la première intervention de WonderWoman qui botte les fesses de cambrioleurs on ne peut plus masculins, se donnant en spectacle dans une complicité manifeste avec une petite fille noire, spectatrice interne qui doit envisager la belle Amazone comme un modèle. Voulu ou fantasmé par susceptibilité masculine, nous ne nous y attarderons pas.
Non, cela devient gênant lorsque Diana se rend à une soirée où elle refusait de se rendre, de sa propre initiative, dans une robe à faire tomber, pour fuir poliment tous les hommes qui lui souhaitent la bonne soirée en ponctuant de gentils "non merci", avant de rejeter un dragueur impénitent qu'elle finit par accepter, comprenant que, quelque part, il s'agit de l'homme qu'elle a perdu depuis bien longtemps. Comprenez, Messieurs, que pour ne pas paraître lourds, il faut être la réincarnation d'un amour de jeunesse perdu. Sans quoi, vous harcelez.
Cela devient incohérent, lorsque Barbara - future Cheetah et campée par une Kristen Wiig (Moi, moche et méchant) détonante ! - qui vient de se faire agresser par un homme très attirée par elle, fait le souhait de ne plus être transparente et de ressembler à Diana. À Diana, qui, on l'aura compris, attire malgré elle attire tous les hommes à elle sans même le vouloir. Étrange ...
Néanmoins peu présent, partant peu gênant, cet aspect ne pèse que peu sur le film.



Hommage à la série, belle caution du film



Contre plusieurs critiques assez négatives, WonderWoman 1984 porte donc tout de même un beau message quoique de façon inefficace car sur une durée trop allongée. Le spectacle est au rendez-vous et Gal Gadot toujours aussi plaisante dans son rôle de super-héroïne au lasso de vérité.
L'échafaudage narratif dispose même d'étais puissants: plusieurs beaux hommages à la série originelle et aux comics, au nombre desquels: le retour d'une méchante emblématique, d'un héros emblématique que l'on avait perdu trop tôt (si belle ait pu être sa vie) et la réapparition du fameux jet invisible de WonderWoman, très présent dans la série, jusque dans le générique, et que l'on espère revoir en action dans les prochaines suites avec ou sans Steve Trevor.
Et, plus que tout cela, les deux apparitions inter-génériques et post-générique de Lynda Carter, la WonderWoman de la série des années 70, qui semble n'avoir pas pris une ride, qui conserve son regard unique et à laquelle il est fait référence à travers une figure d'Amazone légendaire, fierté du peuple de Diana. Cette apothéose de la première Diana Prince se double d'une interprétation calquée sur le jeu de Gal Gadot: un émouvant et beau passage de flambeau à saluer.



Conclusion: Attirées par les étoiles, les voiles, que des choses pas commerciales



Moins puissant que le premier opus, portant mal son beau message à se vouloir grandiloquant, à ne justifier que peu l'année-titre et, parfois à donner dans un féminisme poli mais maladroit, WW1984 - puisque c'est ainsi abrégé que le titre apparaît dans le métrage - n'est pas mauvais, il passe simplement un peu à côté de son sujet et des attentes qu'une année comme 1984, riche en sens, peut générer chez un spectateur averti.

Frenhofer
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le 14 avr. 2021

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Frenhofer

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