Ce film, je l'attendais et je le craignais en même temps.


Je l'attendais parce que bordel...depuis combien de temps on avait pas eu un film Marvel ou DC sur une super héroïne? Sans doute depuis "Catwoman" et "Elektra" qui ont été, à juste titre, oubliés.
Il faut quand même savoir que Spider-Man, le petit nouveau des Avengers, va avoir son film solo en juillet alors que Black-Widow, l'une des figures les plus mystérieuses et charismatiques du groupe, présente depuis le début, eh ben toujours pas.
Au delà de ça, je le craignais du fait de l'histoire d'amour gnangnan que nous dévoilait la bande-annonce. Sérieusement, on parle de Wonder-Woman, une héroïne ultra-faiblement développée au cinéma, une amazone, une déesse...et on lui fout un love-interest dans les pattes dès la fin de l'intro du film. Bref.


Au vu de ma note, vous pouvez-vous dire que mes craintes se sont révélées être fondées...mais si seulement il n'y avait que ça.
Je donne d'abord la parole à la défense: La première partie sur l'île des amazones est plutôt stylée. La société matriarcale dépeinte par Patty Jenkins est crédible, les paysages sont beaux, les scènes d'entrainement sont badass et bien filmées. L'immersion est plutôt réussie. Mention spéciale aux histoires racontées à Diana par sa mère qui s'incarnent dans des scènes d'animation du plus bel effet.
Et le coup d'éclat du film signe aussi le début de sa lente chute vers la médiocrité.


[SPOIL]


Un pilote britannique pris en chasse par l'armée allemande de la Première Guerre Mondiale s'écrase dans la mer, près de l'île. Diana plonge (le plongeon est filmé de manière assez incroyable, il faut le reconnaître) pour le sauver. Mais les allemands le poursuivent, accostent sur l'île, et une bataille s'ouvre entre les soldats et les amazones. Cette scène est très réussie. Le combat a un réel souffle, les grands angles permettent à l'action d'être lisible, de respirer. On notera quand même un abus un peu sauvage sur les ralentis (n'est pas Snyder qui veut...). Enfin, juste pour le délire de voir des femmes en armures répliquer à des tirs de fusils par une volée de flèches enflammées, ça vaut le détour.
Du coup, les amazones apprennent que le Monde est en proie à la destruction et Diana décide de se rendre dans le monde des Hommes avec le pilote pour tuer Arès, le Dieu de la Guerre autrefois vaincu par Zeus (son père, au passage), qu'elle pense responsable de la corruption des humains.


Si les premières confrontations entre l'amazone naïve et le Londres du début du XXème siècle sont assez savoureuses, le caractère ultra-répétitif des situations ("Ah mais pourquoi vous portez des robes?", "Ah mais pourquoi y a des voitures?", "Ah mais...") nous donnent plus le sentiment de regarder "Un indien dans la ville" qu'un film DC. On reconnaîtra cependant volontiers qu'il est assez jouissif de voir notre héroïne défier ouvertement et de manière si candide la société patriarcale et machiste de l'Angleterre du début du siècle. Mais au bout d'un moment, on a juste envie de crier "ça va, on a compris !", à chaque fois que Diana ouvre son clapet.


On entre maintenant dans la partie idéologique du film et mon Dieu...
On commence par les personnages secondaires donc: Les sidekicks racistes.
Entre l'indien doué pour pister (et qui communique avec des signaux de fumée, forcément...), le turc rigolo qui sert les bières aux amoureux, l'écossais poivrot (et moche) avec son kilt... Juste non.
Comment peut-on présenter "Wonder Woman" comme un film féministe alors que TOUS les clichés détestables de n'importe quel blockbuster y sont réunis?
Autre chose: Le film se passe pendant la Première Guerre Mondiale et les allemands sont représentés...comme des nazis. Entre l'officier "qui est tellement méchant qu'il met une balle dans la tête à un de ses soldats pour le fun", la chimiste à tendance génocidaire, les soldats qui "réduisent en esclavage" des civils (euh...what?), on est assez loin des réalités historiques de l'époque. La Première Guerre Mondiale était une guerre de politiciens, de géopolitique, pas d'idéologie. C'était pas "le monde libre" contre l'Allemagne.
Du coup, voir Wonder Woman trancher du troufion allemand "esclavagiste" sur un bon gros riff de guitare (que j'adore)...moyen.
On pourrait me répondre : "ouais mais regarde, les officiers allemands ils sont prêts à signer l'armistice, ils sont pas si méchants" ou "mais en fait, à la fin, elle comprend que ce ne sont pas que les allemands qui sont mauvais mais l'humanité en général".
D'accord. Mais alors pourquoi héroïser à ce point les british ? Parce que les civils qui crèvent la dalle depuis des mois et qui, pour les remercier de les avoir libérés, leur offrent de la bouffe, des vêtements, etc.. C'est quand même limite.
On l'aura compris, on est à peu près au "niveau Michael Bay" du blockbuster idéologique.
(on note quand même la réplique assez sympa de l'indien concernant le fait que le peuple de Chris Pine ait exterminé le sien)


Du coup, on échappe pas à la romance niaise mais ça, à la limite... Ben c'est niais quoi. L'alchimie entre les deux acteurs est assez moyenne sans être non plus atroce. On est sur du très banal.


Les scènes d'action sont dans la continuité de la première grande bataille avec les amazones: bien filmées mais un peu gâchées par les ralentis, pas très judicieusement utilisés.
Le combat final...ben c'est un combat de Dieux, et donc ça pète de tous les côtés.
Si le choix de David Thewlis en grand méchant était vraiment bon, j'aurais tellement préféré le voir garder son petit costume de tweed anglais plutôt que d'enfiler sa grosse armure à la Warcraft (histoire qu'on comprenne bien que Arès, c'est lui)... Ca aurait justement pu apporter un peu de renouveau concernant la représentation des figures mythiques dans les grosses productions ("Le choc des titans", "Percy Jackson"...).


[FIN DE SPOIL]


Pour conclure, "Wonder Woman" se présente comme un gâchis tant la première partie du film était prometteuse, et tant les réflexions sur l'humanité auraient pu être mieux traitées.
Là, on se contentera d'un blockbuster, certes bien réalisé (on a clairement pas affaire à un énième "faiseur" en la personne de Patty Jenkins), mais bouffi, tellement lourd et idéologiquement douteux que tout ce qui aurait pu faire son charme est relégué au second plan.


Malgré tout ça, j'espère que le succès du film rappellera aux producteurs que les super-héroïnes ont tout autant leur place à l'écran que leurs homologues masculins.

Mr_Step

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