Certains paysages américains sont devenus des décors incontournables du cinéma. On pourrait citer les étendues désertiques du Texas et du Nouveau-Mexique ou les bayous infranchissables de la Louisiane. Dans Wind River, ce sont les grands espaces montagneux, glacials et reclus du Wyoming qui servent de toile de fond au récit. Après avoir signé les scénarios pêchus de Sicario et Comancheria, le texan Taylor Sheridan réalise avec Wind River son premier long-métrage. Un pari réussi grâce à une alchimie immersive regroupant la mise en scène, la musique et le jeu d'acteur.


Dans la réserve indienne de Wind River, Cory Lambert est en charge de la chasse des prédateurs qui attaquent les troupeaux de la région. Lors de l'une de ses expéditions, il tombe sur le cadavre d'une jeune adolescente, Natalie. Jane Banner, agent du FBI, est dépêchée sur place pour mener l'enquête. En raison de sa bonne connaissance du terrain, Cory y participe également. Cette macabre découverte ravive chez notre héros la triste disparition de sa fille Emily quelques années auparavant. Il se jettera corps et âme sur la piste des responsables de la mort de Natalie, amie d'Emily et fille de son ami Martin, rêvant secrètement de trouver une réponse à sa propre histoire.


Taylor Sheridan continue dans ce film à explorer l'Amérique vivant en marge de la société. Il s'agit ici des habitants d'une réserve indienne, décimés par la pauvreté, la drogue et le crime. Continuant dans le registre du polar, le réalisateur décortique cette marginalité où la violence s'est établie en règle. Cette triste fatalité touche tous les habitants de la réserve, qu'ils soient Amérindiens ou blancs. L’hostilité de la nature est montrée du doigt comme le catalyseur de toute cette violence. La nature humaine faisant le reste.


A l'affiche de ce Western enneigé, deux acteurs se disputent la vedette. Jeremy Renner y campe le rôle de Cory dans une retenue d'apparence glaciale, mais dont la carapace va se fendre au fil de l'enquête pour y laisser entrevoir le père meurtri, déchiré par la perte de sa fille. Elizabeth Olsen interprète l'agent Banner, jeune recrue candide d'apparence fragile dont la beauté est sublimée par ces paysages polaires. Les rôles secondaires ne sont pas en reste avec notamment Gil Birmingham en père endeuillé et le passage fulgurant de Jon Bernthal dans le rôle de Matt.


Ce polar social est une nouvelle exploration des frontières de son pays menée pistolet à la ceinture et fusil à l'épaule par un Sheridan qui semble avoir trouvé son terrain de chasse hollywoodien. Malgré l'absence de cet humour noir qui était une des forces de Comancheria, le fond et la forme de Wind River collent parfaitement au cinéma humaniste et sobre de son réalisateur.

Vincent-Ruozzi
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Mon Top 110 des années 2010

Créée

le 9 déc. 2017

Critique lue 3K fois

54 j'aime

6 commentaires

Vincent Ruozzi

Écrit par

Critique lue 3K fois

54
6

D'autres avis sur Wind River

Wind River
guyness
8

Sortir de sa réserve

Le film s'approchant de son terme, la petite angoisse. Pourvu que que son dénouement ne trahisse pas ce que ce faux polar était jusque là, avec un suspens inutile ou un final en face-à-face convenu...

le 3 sept. 2017

100 j'aime

8

Wind River
Sergent_Pepper
5

Le talion noir

C’est peu de dire que Taylor Sheridan était attendu pour son premier passage derrière la caméra. Devenu scénariste star suite aux cartons de Sicario et Comancheria, il était évident qu’il finirait...

le 30 août 2017

73 j'aime

11

Wind River
Vincent-Ruozzi
8

Taches rouges sur fond blanc

Certains paysages américains sont devenus des décors incontournables du cinéma. On pourrait citer les étendues désertiques du Texas et du Nouveau-Mexique ou les bayous infranchissables de la...

le 9 déc. 2017

54 j'aime

6

Du même critique

Whiplash
Vincent-Ruozzi
10

«Je vous promets du sang, de la sueur et des larmes»

Whiplash est un grand film. Il est, selon moi, le meilleur de l’année 2014. Une excellente histoire alliant le cinéma et la musique. Celle-ci ne se résume pas à une bande son, mais prend ici la place...

le 20 janv. 2015

190 j'aime

11

Mad Max - Fury Road
Vincent-Ruozzi
9

Sur les routes de Valhalla

Je viens de vivre un grand moment. Je ne sais pas si c’est un grand moment de cinéma, mais ce fût intense. Mad Max: Fury Road m’en a mis plein la gueule. Deux heures d’explosions, de fusillades et de...

le 16 mai 2015

182 j'aime

21

The Irishman
Vincent-Ruozzi
8

Le crépuscule des Dieux

Lèvres pincées, cheveux gominés, yeux plissés et rieurs, main plongée dans sa veste et crispée sur la crosse d'un revolver, Robert De Niro est dans mon salon, prêt à en découdre une nouvelle fois. Il...

le 29 nov. 2019

152 j'aime

10