Angst essen Seele auf : la peur dévore l’âme. Un titre magnifique qui a malheureusement bénéficié d’une traduction foireuse des distributeurs français (une fois n’est pas coutume) mais qui illustre à merveille ce que veut véhiculer le film.
Il s’agissait là de mon premier Fassbinder et certainement pas du dernier vu la qualité de cette œuvre. Cette histoire d’amour interdit entre une allemande d’une soixantaine d’années et d’un immigré marocain qui pourrait avoir l’âge de ses enfants m’a plutôt touché. Fassbinder signe une œuvre intimiste et tout en pudeur où l’amour ne naît pas de l’apparence mais du plus profond de l’âme. Les deux protagonistes se sentent bien ensemble mais la peur des personnes les entourant constituera un lot d’obstacles.

Le film a le mérite de posséder une bonne écriture au niveau des personnages et du scenario mais si il règne des imperfections que j’aborderais après. Tout d’abord le film s’éloigne des clichés manichéens, ce qui n’est pas pour me déplaire. Les personnages sont un bon point, en fin de compte il n’y a ni bon, ni méchant, de quelque côté que ce soit. Là où ça coince pour ma part c’est la démonstration un peu trop caricaturale. Comme je l’ai sous-entendu avant on évite le « l’arabe il est gentil, le boche il est méchant » mais par contre à un moment du film tout change, cet « élément déclencheur » manque d’authenticité à mon sens alors que l’œuvre reste ancrée dans une logique de réalisme social. Tout le monde retourne sa veste, pas innocemment certes, mais ça me paraît un peu gros. Bon si on omet ceci le film reste intelligent et pertinent dans sa manière d’aborder son sujet et se révèle même touchant par instants et certaines scènes sont d’une grande beauté. Je pense à ces travellings dans le bar, la scène où Ali va chez la blonde, l’immigrée tchèque cachée derrière les barreaux de rampe d’escalier… Globalement c’est vraiment très bien mis en scène et jamais gratuit, il y a un vrai travail derrière et Fassbinder se permet d’y introduire des scènes symboliques qui évitent toute lourdeur. Une bonne surprise, vu le titre VF je ne m’attendais franchement pas à grand-chose mais ce film se révèle juste beau et émouvant. Une œuvre sincère.
Moorhuhn
7
Écrit par

Créée

le 10 sept. 2012

Critique lue 434 fois

2 j'aime

Moorhuhn

Écrit par

Critique lue 434 fois

2

D'autres avis sur Tous les autres s'appellent Ali

Tous les autres s'appellent Ali
Vivienn
9

The Other Side of Love

Un bar allemand, un soir au hasard – la scène semble figée, la confrontation évitée. Déjà, on aborde une question de contraste : une vieille femme, un immigré marocain. Deux personnages, déjà un...

le 8 févr. 2021

22 j'aime

1

Tous les autres s'appellent Ali
blazcowicz
8

Critique de Tous les autres s'appellent Ali par blazcowicz

J'ai totalement adoré ce film, mais je préfère mettre quelque chose au clair directement : non, pour moi ce film n'a pas la prétention d'être réaliste. J'ai trouvé qu'au contraire l'hostilité que...

le 25 août 2012

11 j'aime

Tous les autres s'appellent Ali
Morrinson
7

La peur dévore l'âme

Lee sentiment est chez moi tenace et persistant avec Fassbinder : j'ai une sorte de revanche à prendre suite à quelques déconvenues (des films qui m'ont laissé un goût de bâclage amer, Roulette...

le 5 juil. 2022

5 j'aime

Du même critique

Monuments Men
Moorhuhn
3

George Clooney and Matt Damon are inside !

Ma curiosité naturelle, mêlée à un choix de films restreint sur un créneau horaire pas évident et dans un ciné qui ne propose que 10% de sa programmation en VO m'a poussé à voir ce Monuments Men en...

le 12 mars 2014

60 j'aime

7

Eyjafjallajökull
Moorhuhn
1

Eyenakidevraiharetédefairedéfilmnull

J'imagine la réunion entre les scénaristes du film avant sa réalisation. "Hé Michel t'as vu le volcan qui paralyse l'Europe, il a un nom rigolo hein ouais?", ce à quoi son collègue Jean-Jacques a...

le 23 oct. 2013

59 j'aime

6

Koyaanisqatsi
Moorhuhn
10

La prophétie

Coup d'oeil aujourd'hui sur le film Koyaanisqatsi réalisé en 1982 par Godfrey Reggio. Point de fiction ici, il s'agit d'un film documentaire expérimental sans voix-off ni interventions, bref un film...

le 1 mars 2013

56 j'aime

9