A Londres, Tony, un jeune aristocrate, vivant dans une luxueuse demeure, engage Hugo Barrett comme domestique. Ce dernier se révèle être un valet exemplaire. Pourtant, Susan, la fiancée de Tony, trouve le comportement de Barret inquiétant.


The servant est un film britannique de Joseph Losey de 1963.
Le film raconte comment un valet engagé chez un aristocrate qui vient d'emménager dans une maison londonienne le manipule, réussissant à inverser le rapport de force jusqu'à le détruire.


L'adaptation d'un roman de Maugham
The servant est la libre adaptation d'un roman de Robin Maugham. L'intrigue du roman était très différente de celle du film. L'intrigue se déroulait juste après la deuxième guerre mondiale.L'emprise du valet sur l'aristocrate était due au réseau du valet qui lui permettait d'alimenter son employeur, en alcool et en drogue, au marché noir en ces temps difficiles. Il s'agissait d'un roman conservateur dont la conclusion pro-aristocratique et très britannique montrait que si les gens situés plus bas dans l'échelle sociale prenaient le pouvoir, l'Aristocratie était menacée. Il fallait donc que chacun reste à sa place.


Etude psychologique comparée
Scénarisé par Harold Pinter, le film est amputé de son aspect social. Il montre d'entrée les deux personnages principaux dans un rapport de verticalité qui anticipe déjà l'inversion du rapport de force. Hugo Barret débarque avec son "air de ne pas y toucher" dans une maison déserte. Il trouve Tony affalé et somnolent sur une banquette. Celui ci l'engage après un entretien bâclé. L'étude de caractères de Losey montre un Hugo Barret manipulateur, retors et qui sait se rendre indispensable alors que Tony est un aristo fainéant, mythomane, vaniteux et faible. Le film va dérouler implacablement "la toile d'araignée" tissée par Barret dans laquelle Tony va peu à peu s'engluer, cédant aux avances de Véra, la "fausse soeur" de Barret, une jolie femme paraissant simplette mais très "disponible", avant de sombrer dans l'alcool et la drogue.


Le film aborde des thématiques comme l'inversion des rapports de classe ou l'homosexualité.


S'agissant de la thématique des rapports de classe, seule Susan, également issu d'un milieu privilégié, réagit de façon méprisante et hostile face à Barret, discernant chez lui, à raison, une menace qui mettra en péril son couple et Tony.
A la fin du film, le baiser qu'elle lui donne et la gifle qu'elle lui inflige dans la foulée sont les derniers signes d'impuissance d'une femme qui sait qu'elle a perdu. Ces 2 comportements déplacés dans une société britannique où on ne se touchait pas entre protagonistes de castes différentes ne sont que les aveux d'une extrême faiblesse.
L'homosexualité latente entre les 2 hommes est perceptible lors de leurs jeux de "cache cache" ou d'échanges de balle dans l'escalier. Dans ce rapport dominant dominé, James Fox compose avec brio un grand dadais nonchalant influençable commandé par un Dirk Bogarde machiavélique et pervers lancé à "tombeau ouvert" dans son entreprise de destruction.


Un film baroque
The servant est un film à la réalisation baroque. Les décors reconstitués en studio montrent des images se reflétant dans des miroirs convexes, des bibliothèques qui sont des portes d'accès à d'autres pièces, des images déformées par des focales et affublées d'une ou de plusieurs ombres renforçant leur caractère inquiétant.


Initialement, Losey envisageait de tourner ce film en 1956. Il souhaitait confier le rôle de l'Aristo à Dirk Bogarde, plus jeune à l'époque, mais le film ne s'est pas fait . Au vu du film réalisé en 1963, je crois qu'il a fort bien fait de lui confier le rôle "vénéneux" de Barret dans lequel l'acteur britannique excelle.


The servant est un drame psychologique montrant des personnages protéiformes aux personnalités multiples, pas si éloignés de ceux que nous sommes au quotidien. The servant s'appuie sur une réalisation ciselée, soignée jusque dans l'élocution de ses personnages principaux, marque de leur milieu social.
Le casting est impeccable: Hugo Barrett (Dirk Bogarde), Sarah Miles (Vera), Susan (Wendy Craig), et Tony (James Fox).


Ma note: 8/10

dagrey
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le 5 oct. 2018

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dagrey

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