Comme j’ai du mal à bien faire deux choses à la fois —déjà qu’une seule, ce n’est pas évident— je ne suis pas vraiment friand des films en froufrou qui poussent la chansonnette. J’ai toujours l’impression de me retrouver devant les pénibles efforts d’un metteur en scène à allier les langages du cinéma avec ceux de la musique live. Je n’ai d’ailleurs que rarement été convaincu et même quand j’apprécie (The Wall, Tommy ou Phantom of the paradise), j’ai bien l’impression que c’est davantage pour l’énergie déployée, ou pour le côté entraînant de la bande originale que pour l’ensemble de la proposition en tant que film.


The Rocky Horror Picture show confirme... C’est un chouette moment, truffé d’idées, d’acteurs/chanteurs aux gestuelles impressionnantes qui se donnent, mais qui, considéré dans son ensemble, ne parvient pas à me convaincre plus que ça.
Par moment —Eddie qui déboule à moto, la petite Suzanne qui fait joujou avec Mr Muscles—, mes yeux s’écarquillent, j’ai la banane et je consens à me laisser porter, à d’autres — les petites danses longuettes de présentation, le remake de la Cène, les clins d’œil appuyés au cinoche histoire de se donner une quelconque légitimité…—, je soupire devant cette grandiloquence qui me rappelle pourquoi je n’apprécie que très peu les agités du bulbe qui, perchés sur leurs talons pailletés, donnent de la voix sur grand écran.
L’intention y est, sans aucun doute possible. Le message véhiculé par Tim Curry est fédérateur et, placé dans son contexte, particulièrement audacieux. Nul doute que de voir débouler en salle un tel film en 1975 (d’ailleurs je pense fermement que si c’était aujourd’hui, on en entendrait également beaucoup parler) a du faire couler pas mal d’encre. Enfin, ce genre de bobine quelque peu subversive, en tout cas bousculeuse de mentalité, est tout à fait nécessaire.


Mais voilà, en tant qu’objet cinématographique, The Rocky Horror Picture Show ne m’a qu’à moitié convaincu. La faute à un équilibre des forces bancal, mis à mal notamment par les longues interventions d’un narrateur extérieur à l’histoire. De là à les considérer comme l’aveu d’impuissance d’un réalisateur qui ne sait pas comment lier les différentes scénettes de son ouvrage, il n’y a qu’un pas, tant son choix de les entrecouper par une voix monotone brise le rythme frénétique de ses séquences chantées. Pourquoi diluer la folie du film par ces pauses impromptues quasi documentaires ? La question reste posée.


Parce que la bande son, elle, dessine sans forcer les sourires. Quand les monstres Rock donnent de la corde vocale alors le balbutiement narratif s’estompe et la récréation reprend ses droits. A aucun moment The Rocky horror picture Show n’est déplaisant à suivre, c’est même tout l’inverse et finalement en fin de séance, ses petits airs ridicules, ses balbutiements d’écriture se font dévorer par la bonne humeur permanente qui irradie la bobine quand elle s’associe à l’insolence admirable transpirant de chaque moment de provocation orchestré par des esprits libres bien décidés à bousculer tout un tas d’idées préconçues.


Rien que pour cela, le film de Jim Sharman m’inspire un profond respect, pourtant je suis quasi certain de ne jamais le remettre dans le lecteur … et ce, malgré toute l’envie que j’ai de revoir Susan Sarandon jouer les saintes nitouches en petite tenue (après Les prédateurs et Thelma et Louise, je crois que je commence à avoir un petit faible pour elle ^^).

oso
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le 27 nov. 2016

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oso

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