The Offence
7.3
The Offence

Film de Sidney Lumet (1973)

Projecteurs sur le ça.
Une conscience mise en lumière.
Lentement. Avec éblouissement.
Une lumière aveuglante qui perturbe le souvenir.
La lenteur. 0 % des 100 % d'hier...


Puis un jour. Le jour triste et gris d'une sortie d'école. Une fillette en soquettes disparaît. Une silhouette noire entraperçue au loin est avec elle. Puis on la cherche de nuit, en uniforme, avec les chiens. Et quand l'Inspecteur Johnson trouve la proie atterrée, elle crie de terreur. Tous les hommes lui font peur désormais. Mais tous les hommes ne sont-ils pas terrifiants ? Elle n'est plus qu'un visage suppliant, une jupe bleue froissée et une chaussette longue manquante. Lui, il est policier, il est un protecteur, un bon, un juste. A 100 % ! Lui se croit encore un protecteur rassurant mais n'est déjà plus qu'une épave. La forteresse de l'âme est en ruines et est toute prête à s'écrouler.
Mais pas encore, pas encore. Malgré les apparences, le drame n'est pas joué et le meurtre se prépare.


On arrête un homme ivre sur la voie publique.
Ivre de vin ? Ivre d'un crime ? Titubant, vacillant comme la raison des hommes dans ce film dérangeant.
Il est au commissariat, on l'interroge. Il n'a rien à dire.
Est-il coupable ? Oui ? Peut-on mesurer le degré de culpabilité d'un homme ? On se borne à un pari sur fond de pourcentages. Coupable à 100 % pour notre inspecteur "tout est sûr, tout est clair" Johnson. A 100 %, il n'est rien d'inquiétant. Ou bien 100 % d'un bon ou 100 % d'un méchant. Pas d'erreur possible. On lit le criminel comme un mauvais polar truffé de lieux communs. On lit en lui comme en un livre ouvert. Mais le lecteur n'est-il pas en lisant le propre lecteur de lui-même ?
Et le spot éblouissant ! Et le rire démoniaque ! Et le coup. Rien qu'un petit coup. On mène l'homme à l'hôpital: il en ressortira. 100 % sûr.


Mais s'il n'en ressort pas ?
Après tout, ce n'est qu'un violeur ! 100 % sûr !
L'est-il ?
99 %. 98, 97,96, 95, toujours descendant...
La galerie des horreurs commence. Gros plans, métonymies, sur un bras geignard, une paire de fesses et de jambes, des fleurs, une pendue,un train à vive allure et encore,et encore, et encore, et encore ...
50 % ... peut-être moins déjà.
La pluie et les réverbères brouillent la route sur le pare-brise. Les images obsédantes et l'alcool brouillent les frontières entre réel et fantasmé... 25 %...


Dieu, ce que sa femme est laide ! Dieu, que l'absence de lucidité rend lucide ! Mais non extra-lucide...
Des cris, des pleurs, des mains ... des mouvements incontrôlés suivis par une caméra à l'affût. Des chaises volent.
Et puis, le souvenir. Le souvenir exact à 100 %. Sûr à 100 % que rien n'est sûr à 100 %. Fous, nous sommes tous fous ! Ou bien est-ce moi ? Qui est coupable ? Qui ne l'est pas ? Peu importe ! Seule importe cette idée que nous ne sommes qu'images dont on ne peut s'extraire, passé qui nous poursuit sans relâche. 0 %.


Oh, mon dieu ! Oh, mon dieu ! Aidez-moi ! Aidez-moi !
Nulle aide, nulle panacée.
Le doute, l'humanité, l'effroi mental.
A 100 %




Un excellent thriller psychologique qui permet de découvrir Sean Connery (James Bond) sous un angle qui était passé jusqu'ici inaperçu.
Il est accompagné dans cette tâche par deux autres vedettes tout aussi surprenantes, jamais vues sous un angle totalement identiques, et dont on fait peu de cas tant l'histoire s'attache à Johnson: Peter Bowles, célèbre figure de méchant type bondien du petit écran qu'on a pu voir dans Chapeau Melon et Bottes de Cuir et Trevor Howard, connu la même année pour son incroyable réincarnation de Richard Wagner dans Ludwig, le Crépuscule des Dieux.
Un film choc qui fait se changer la conception de la morale de son protagoniste et notre conception d'approche de tout un personnel de films plus oniriques.

Créée

le 19 déc. 2018

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Frenhofer

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