L'inconvénient du genre horrifique (du moins, dans sa version récente), c'est qu'à certaines exceptions près, ses ficelles restent très souvent les mêmes. Ce qui fait que quand on a visionné un certain nombre de films d'épouvante réalisés après les années 70, connus ou non, populaires ou non, on commence à connaître le chemin que presque à chaque fois, on nous fait emprunter; qu'il s'agisse de la psychologie des personnages, de la construction de l'intrigue, du rythme, de ce qu'on dévoile ou pas au spectateur...tout est régi selon des codes très figés, pour ne pas dire sclérosés.


Il existe heureusement, comme dit plus haut, de nombreuses exceptions, et même (c'est encore plus heureux) des films qui, s'ils se conforment aux règles de leur genre, n'en demeurent pas moins très bons dans l'utilisation de ces dernières; on peut citer des films comme La Dame en Noir ou Jusqu'en Enfer, tous deux très bons, le premier car il misait moins sur le sursaut que sur le malaise, en se concentrant sur son atmosphère glauque et poisseuse, et le second car son réalisateur avait su le marquer de son empreinte, faisant de lui une œuvre avec un style réel, et une manière personnelle de dérouler son intrigue.


The Descent n'est pas de celles-là. The Descent, malheureusement, est comme les autres en tous points, ou presque. Je ne compte plus les fois où j'ai deviné ce qui allait se passer à l'étape suivante, quelle allait être la péripétie suivante, l'erreur suivante, l'affrontement suivant, lesquelles des héroïnes allait mourir, et laquelle survivre, ou pas, suspense (fin grossière et débile, oui). Même les procédés de réalisation sont faciles, voire éculés, pour la plupart: tous ces gros plans sur des visages de plus en plus tordus de terreur, ces plans de détail sur des objets IM-POR-TANTS, sans parler des quelques jeux d'ombre et de lumière banals qui font à peine effet...j'ai déjà vu tout ça cent fois !


Il est vrai que tout n'est pas absolument à jeter dans ce film; certains passages sont réussis. Mais en se penchant sur la raison de leur réussite, on découvre -ô surprise !- qu'il s'agit de ceux où le réalisateur tente de s'écarter des sentiers battus. Ce sont surtout, par exemple, les moments qui font preuve d'un peu plus de finesse dans leur façon d’amener l'angoisse, en jouant sur la claustrophobie des personnages et du spectateur, via les boyaux et artères tortueuses du labyrinthe souterrain où nos jeunes imprudentes se sont enfoncées (les décors du film sont d’ailleurs très travaillés). Ou encore les jeux sur les couleurs, qui en plus de donner à The Descent un symbolisme un chouïa subtil, bien qu’évident (le rouge, couleur infernale, pour les profondeurs, et le bleu, couleur hostile, pour l'extérieur), lui confèrent une esthétique, un style un peu personnel.


Par ailleurs, une autre déception a pointé son nez au cours du visionnage; elle concerne les monstres. A mon sens, s'il s'était davantage axé sur ses créatures (leur nature, leur origine, les possibles légendes les concernant...) le film aurait gagné en puissance: pour moi, un métrage qui met en scène des créatures étranges n'est jamais aussi réussi que lorsqu'il se penche sur ces créatures, qu'il les étudie à la loupe; elles acquièrent alors une chair, une existence, qui les rend encore plus menaçantes et mémorables. Ici, on s'attarde à peine sur ce qu'elles sont; du coup, elles restent des monstres anonymes, interchangeables, grognant et gesticulant dans l'ombre. Et on soupire d'exaspération, parce qu'encore une fois, ce n'est PAS original !


Alors on pourra me rétorquer que les créatures ne sont en elles-mêmes pas importantes, qu'elles ne sont qu'un prétexte pour susciter l'angoisse. A quoi j'ai envie de répondre que si angoisse il y a, elle est facile: si on se contente de saupoudrer son film de vilains monstres sans les caractériser des tas d’autres qui parsèment le cinéma de genre, elle restera au niveau de "Bouh ! Fais-moi peur." Pour moi, plus un film décortique l'objet de sa peur, plus la puissance horrifique de ce dernier-et celle du film, par la même occasion- augmente. Tout le monde ne voit pas les choses ainsi, mais moi oui, et c'est, entre autres, ce qui me pousse à penser que "The Descent" est un film raté. Et décevant.


PS: et ne venez pas me dire que ce film est "original" quand il met en scène une jeune femme qui, sur la fin, arbore des yeux fous et un visage couvert de sang. Je crois me rappeler qu'un certain Brian de Palma l'avait déjà fait avant. Et en mieux.

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le 30 oct. 2018

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Dany Selwyn

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