Casino. Intérieur nuit. Les visages sont blafards et concentrés. Les machines à sous ronronnent, et les jetons s'entrechoquent. L'ambiance est lourde, au propre comme au figuré avec une musique qui pose très vite une ambiance électrique et dérangeante.


Austère et dépouillé, The Card Counter porte un regard sombre sur une Amérique qui cache ses fautes et ses traumatismes sous l’artificialité des néons. Le film est traversé d'une sourde violence morale avec un anti-héros qui cherche autant qu'il fuit une rédemption impossible. Souhaitant s'anesthésier de son passé William Tell s’adonne sans plaisir à une activité répétitive qui a le grand avantage de le maintenir dans un relatif isolement social. Le casino est pour lui comme la prison : le temps y est aboli, les limites claires, les actes normalisés.


Flashbacks cauchemardesques et récits glaçants nous éclairerons sur ce personnage torturé — typique de Schrader — il ne sortira que de son apathie volontaire par une rencontre forcée qui le confrontera à son passé. Le film pose ainsi la question de la rédemption au sens large : comment interagir avec une personne aux actes aussi injustifiables ?


Si la mise en scène d’un personnage aussi ambigu et la maitrise visuelle et technique du film sont assez fascinantes, le film m’a en revanche laissée un peu perplexe. J’ai trouvé le jeu minimalisme d’Oscar Isaacs parfois excessif, avec quelques expressions dignes d’un poisson sur un étal de marché en fin de journée. Même si ce type de film se concentre plus sur l’ambiance que sur la narration, le fait de tout voir venir de loin avec cette fin assez évidente lui nuit tout de même. Au-delà de l’ambiance, on se demande s’il y avait vraiment matière à un film.

AlicePerron1
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le 28 janv. 2022

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Alice Perron

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