D’habitude Dewaere ça va mais là, bonjour les dégâts !

Ah ça ! Le générique d’ouverture m’avait pourtant mis si bien !
Une voiture arrive au beau milieu d’une friche en bordure de Créteil. Cadre maitrisé. Photographie élégante. Dewaere qui sort de la caisse et qui cabotine déjà. Et surtout ces grands noms qui défilent au générique ; des noms qui se posent quand même là : Dewaere donc, mais aussi Alain Corneau à la réalisation, Bernard Blier, Myriam Boyer et Andreas Katsulas à l’interprétation…
Oh ça oui je me régalais déjà…
…Et pourtant la débandade fut rapide, longue et triste.


Rah mais à part la mise-en-image propre de Cornaud, tout le reste prend l’eau.
Les dialogues de Georges Perec pour commencer, assez plats et souvent surfaits, qui plus est surjoués par un Dewaere qui en fait des caisses…
…M’enfin je parle de dialogues, mais en fait je devrais plutôt parler de monologues tant le personnage de Franck Poupart passe son temps à parler de lui-même, pour lui-même et seul avec lui-même.
C’est insupportable.
Alors après moi je veux bien qu’on me dise que tout ça est fait pour souligner le côté égocentré, factice et un brin désaxé du personnage, mais dans les faits ça donne plutôt à à l’écran l’image d’un acteur « qui se la joue » et dont la prestation m’est apparue comme difficilement crédible.


Le pire c’est que ce n’est même pas clair cette écriture.
En tout cas, me concernant, j’avoue qu’il m’a fallu un petit moment avant de comprendre ce que faisait vraiment le personnage de Franck Poupart dans cette intrigue.
Détective ? Racketteur ? Démarcheur ? Un peu des trois ?
Quand j’ai fini par comprendre au bout de vingt minutes c’était déjà trop tard. J’en avais déjà marre.
Marre du personnage. Marre des situations. Et surtout marre que le film passe son temps à diffuser des tubes d’époque à la radio. Ç’en est à tel point qu’on en croirait presque un placement de produit permanent tellement c’est récurrent et tellement le générique de fin met ça en avant…


Mais ce qui est au final le plus désespérant avec ce film, c’est qu’il peine surtout à dérouler son intrigue.
Il dilue chaque situation en permanence, et cela juste pour que Dewaere puisse faire son show outrancier de la première à la dernière seconde.
Ça jacasse pour ne rien dire et surtout pour surligner en permanence le fait que le personnage de Poupart soit un gros connard.
Le pire c’est que – fait exprès ou pas – Poupart en plus d’être un connard est juste un gros benêt. Il ne fait que prendre des décisions absurdes ; des décisions qui n’ont aucun sens et qui ne semblent là que pour aider le scénario.
L’enchainement de péripéties est tellement grotesque que le retournement final apparaitrait presque comme une apothéose de la bêtise et de l’écriture par-dessus la jambe.


Quelqu’un peut-il seulement m’expliquer ce qui retient Franck de buter son patron quand celui-ci vient lui piquer son pognon chez lui ?
La lettre que le bon vieux Staplin aurait laissée à un ami, me répondrez-vous ? Non mais la bonne blague ! Franck vient à peine de refroidir sa compagne ! Il a déjà franchi la ligne rouge ! Il va déjà être contraint à la cavale et il le sait ! Alors un meurtre de plus un meurtre de moins qu’est-ce que ça change ?! Quitte à partir avec la jeunette et les flics au cul, autant le faire avec le grisbi en prime ! Non ?!


Finir d’ailleurs là-dessus – sur cette apothéose d’absurdité – c’est ce qui m’a personnellement achevé.
Déjà que ce film m’avait gonflé pendant presque deux heures – réussissant par-dessus le marché à me fâcher avec Dewaere – mais en plus de ça il a fallu que jusqu’au bout il montre son incapacité à dépasser le roman de gare dont il s’est voulu l’adaptation.


Alors du coup, je ne remercie clairement pas celles et ceux qui sur ce site ont parlé de « film majeur » du cinéma français. Moi pour ma part le seul majeur que j’ai vu, c’est celui que m’a dressé Georges Perec avec ses dialogues surfaits, voire celui qu’a dressé aussi Patrick Dewaere par son jeu tout en égocentrisme et en démonstration.


Pour ma part, des polars de Relay comme ceux-là je m’en préserverais bien.
Donc à l’avenir j’y regarderais à deux fois avant qu’on me conseille de m’y jeter.
Car comme quoi la renommée des vieux films c’est comme la renommée des vieux vins.
Ce n’est parce que l’étiquette est aguicheuse que la bouteille n’est pas bouchonnée…

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le 5 janv. 2022

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