Rosalie
6.1
Rosalie

Film de Stéphanie Di Giusto (2023)

Bien que non dénué de qualités formelles et d’ambitions, ce portrait de femme singulière du XIXe siècle s’avère être un poil trop retenu pour devenir le manifeste féministe qu'il aspire à être.

Après un long voyage, Rosalie (Nadia Tereszkiewicz) est présentée à Abel (Benoît Magimel), un vétéran de guerre renfrogné. Bien qu’ils ne se connaissent pas, ils vont se marier. Abel est surtout intéressé par la dote qui lui permettra de rembourser ses dettes, tandis que Rosalie espère ardemment qu’il ne la rejette pas, car elle cache un mystérieux secret. Une fois mis à nu, ce secret deviendra source d’émancipation, mais surtout de problèmes.

Rosalie réussit des belles choses, notamment dans son exposition particulièrement aboutie. Teresa Tereszkiewicz campe admirablement ce personnage à la fois pur et tourmenté par la malédiction qu’elle doit porter depuis sa naissance. Benoît Magimel quant à lui est toujours aussi bon lorsqu’il s’agit de jouer les bourrus au cœur plus grand qu’il n’y parait. L’esthétique du film, très picturale, véhicule une symbolique forte, comme lors d’une scène de chasse annonciatrice du tragique destin de Rosalie ou les fleurs bleues arborées par Rosalie, signifiant sa quête de nouveaux horizons.

Bien que Rosalie soit particulièrement douée en broderie, le film est bien maladroit lorsqu’il tente de tisser une histoire et de développer des enjeux dramatiques. Cette chronique hésite entre un récit inspiré de la vie Clémentine Delait, figure historique ayant inspiré le personnage de Rosalie, et une allégorie sur l’émancipation féministe. Rosalie incarnerait cette émancipation, à l’instar de ce que le poilu Esaü représente pour la civilisation occidentale patriarcale. Ainsi, la chronique historique corsète les velléités plus audacieuses et oniriques de ce drame, et affaiblit leur impact. Il est dommage que le film se perde dans lieux communs telle la nature sauvage, seul refuge face aux carcans d’une civilisation dans laquelle « il n’est jamais simple d’être une femme ». Les antagonistes ressemblent davantage à un brouillon de caricature bourgeoise patriarco-capitaliste aux desseins nébuleux, plutôt qu’à de véritables personnages mus par des intentions sincères et humaines. Ces bémols ne gâchent pas les intentions louables du film, ni ses qualités formelles, et ne le relèguent pas pour autant dans la catégorie des films barbants.


el_blasio
6
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le 14 mars 2024

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el_blasio

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