Je mourrai dans des souffrances atroces. Après ma mort, mon corps n'aura point de repos. Puis tu perdras ta couronne. Toi et ton fils vous serez massacrés ainsi que toute la famille. Après, le déluge terrible passera sur la Russie. Et elle tombera entre les mains du Diable.



Grigori Raspoutine est sans conteste l’un de mes personnages historiques favoris avec Aleister Crowley, des monuments de l’occulte qui se prêtes parfaitement au genre fantastique (Del Toro l’a prouvé dans son Hellboy) et en voyant la bande-annonce du nouveau Kingsman qui décide de faire du moine fou son méchant je me suis rendu compte que je n’avais vu que très peu de films mettant en scène le bonhomme. Alors en tombant sur ce film de Klimov j’ai pensé que ce serait probablement le film le plus complet sur le personnage et je dois avouer être assez déçu.


Je trouve que toute l’intensité du film est plombée par des images d’archives et un narrateur qui raconte comme un manuel d’histoire l’état de la Russie de l’époque.
Le rythme du film est totalement insupportable, si bien qu’on a plus l’impression de voir un documentaire sur la Russie de 1916 avec des scènettes artificielles au milieu.


Je m’attendais à une plongée dantesque dans l’esprit du prêtre manipulateur, une descente aux enfers vertigineuse dans les tréfonds de l’âme humaine sans pour autant condamner bêtement l’homme en le résumant à tout ce qu’il a de plus sombre.
Et étant donné que c’est un russe qui réalise, je pensais qu’il n’allait pas tomber dans ce piège évident lorsque l’on parle du sibérien.


Mais en fait il tombe en plein dedans, le réalisateur n’a gardé que ce que les gens imaginent de Raspoutine, à savoir un homme complètement fou ne vivant que de débauche et d’excès.


Certes il était cet être orgiaque et excessif, mais je ne pense pas qu’il était fou et je pense qu’il savait qu’il ne l’était pas; mais c’était tout sauf le Diable décrit ici.
En tout cas ce qui est sûr c’est qu’il est une personnalité extrêmement complexe et passionnante, il est un pur reflet du mal être de la Russie de l’époque et est une raison à lui tout seul de la chute de la dynastie des Romanov.
Enfin sérieux comment tu peux ne rien avoir à raconter sur ça.


En fait j’avais vraiment l’impression d’être devant un film des années 30 où il était de bon ton de diabolisé le personnage (qui d’ailleurs a une image bien plus nuancée en Russie depuis quelques années).


Cependant le film n’est pas dénué de qualités, déjà la performance stellaire de l’acteur vaut le coup d’oeil et certains passages sont vraiment bien fichus (la scène de danse absolument splendide avec ces murs peints comme si c’était un paysage ensoleillé, on a vraiment l’impression d’être dans la crèche des fous) malheureusement dès qu’une scène commence a happer le spectateur et gagner en puissance, elle est aussitôt coupée par un passage de secrets d’histoire…
Oui je pense que c’était nécessaire d’apporter un peu de contexte, mais si par contexte tu envisages une lecture d’une page wikipedia alors ça ne va pas, je pense que Klimov voulait trop en faire et ne se concentre pas assez sur son sujet, malgré encore une fois des scènes qui font mouche.


Je retiens surtout la scène de l’assassinat, tourné d’une manière assez cynique, on voit les assassins galérer contre un vieux barbu drogué et affamé et on ressent l’horreur lorsque Grigori est chassé comme un gibier, c’est la scène la plus nuancée et la plus réussie du film.


Au final Elem Klimov filme Raspoutine comme ses détracteurs et les ignorants le voit, d’une frilosité puritaine et d’un manichéisme éhonté; et c’est bien dommage.

SubwaySam
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le 4 janv. 2022

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