Belle histoire mais mauvais film

Je n'ai pas l'habitude de ce réalisateur mais on m'assure que ses films ont souvent cette "patte" que, personnellement, j'ai trouvée atroce.

A propos de la réalisation :
Toute l'exposition est à base de personnage écoutant la radio ou regardant la TV, c'est plat et sans originalité. Et ça dure un paquet de temps, ce remplissage d'info, non pas avec du jeu d'acteur ou une quelconque syntaxe de l'image, non, tout est donné tel quel sous la forme de reportages au JT qui nous font gober le B.A.BA de l'histoire.
Certains plans affichent clairement un manque (de moyens ou d'ambition ou de technique, je ne sais pas) mais toute l'exposition initiale est incroyablement fade et inintéressante. Le "choc" de la rencontre n'est illustré que par un plan beaucoup trop long sur un garde avec marqué en gros "SECURITY" dans le dos (genre "regardez les choses vont mal, on fait venir des gardes !") et 2 voitures qui se percutent à 3 km/h sur un parking. Wouhou ! Quelle maitrise de l'image ! (ironie)

A propos du son :
Dans ces moments où le personnage regarde la TV, on n'entend qu'un petit filet de voix péniblement craché par un mauvais haut-parleur très loin du micro. Et soudainement, gros plan sur les pales d'un hélico avec le bruit qui va bien amplifié au max (oreilles : décédées, voisins : en train appeler la police pour tapage).
Je reproche surtout l'alternance de scènes inaudibles voire totalement silencieuses et de sons tonitruants chelous, à mi-chemin entre une poutre d'acier qu'on déchire et un synthé martelé aléatoirement, branché sur le plus gros ampli de la Terre. Une piste audio agressive, sans harmonique, de la violence gratuite. Pour être gentil, je dirais que l'agression est tellement intense, l'audio tellement éloigné de ce qu'il doit être pour être efficace dans un film, que le réalisateur l'a forcément fait exprès. Probablement pour introduire je ne sais quelle forme d'art, au mépris total des recettes qui fonctionnent auprès du public.

A propos de l'image :
Les 3 premiers quarts du film ont une apparence de grisaille, de flou, on ne voit rien, on n'entend rien, rien n'est fait pour mettre le spectateur à l'aise ou en capacité d'analyser ce que le film donne à voir. Vous verrez une nana triste, habillée en gris, dans une maison grise, dehors il pleut et le ciel est gris (l'histoire se déroule sur plusieurs mois mais on ne verra jamais que du ciel gris et triste). Encore une fois, c'est tellement éloigné de ce qui fonctionne habituellement que c'est forcément fait exprès, on ne se trompe pas à ce point-là par erreur. Encore de la vision artistique dégénérée.
Par opposition au final où on a l'impression que Villeneuve a filé sa caméra à un confrère : clarté, chaleur, conversations entre humains au milieu de beaux décors, pleins de couleur.

A propos du scénario :
C'est là que j'ai trouvé un énorme intérêt au film. J'adhère plutôt à la théorie qui y est développée (dans la limite du raisonnable bien sûr) et l'enjeu d'un langage universel est tellement puissant !
"Premier contact" ne se contente pas de montrer comment l'équipe de choc va gérer le problème extra-terrestre mais nous montre aussi les réaction du bon peuple, explore cette facette de l'humanité face à la crise (un peu comme Deep Impact, par opposition à Armageddon).

En fait, je crois que ce projet est issu d'une personne talentueuse pour l'écriture. Quelqu'un qui, un peu comme un Damasio, sait manipuler les mots pour décliner tout une panoplie d'effet autour d'un thème : le langage.
J'ai en revanche l'impression que ce script de génie a été confié à un margoulin de la caméra qui fait passer ses délires personnels avant la mission sacrée : transmettre des idées au public par l'intermédiaire d'une vidéo (une image + un son).