Radu Jude est un réalisateur assez atypique dans le paysage cinématographique roumain. Engagé politiquement, passionné par l'histoire troublé de son pays, documentariste, metteur en scène de théâtre, également (Scènes de la vie conjugale de Bergman). Bouillonnant et cahoteux, Peu m'importe si l'histoire nous considère comme des barbares revient sur un fait peu ou prou oublié : le massacre de 20 000 juifs par l'armée roumaine en 1941, à travers les préparatifs d'un spectacle vivant. Drôle de film, pédagogique et parfois moraliste, qui dresse aussi un portrait peu amène de la Roumanie d'aujourd'hui, désireuse d'oublier cet épisode peu flatteur de son passé. Il y a à la fois de la subtilité dans son architecture narrative et un côté offensif très marqué qui n'épargne pas la volonté d'amnésie généralisée du pays, proche du négationnisme. En même temps, Radu Jude use de l'humour noir dans ce tableau souvent outré où le peuple est montré comme manipulé et pas loin d'être affreux, sale et méchant. Il y à boire et à manger dans ce film hirsute et peu conventionnel, poil à gratter d'une société qui a accepté l'histoire officielle et qui préférerait que l'on s'attaque aux exactions de la période communiste. La posture de victime est plus confortable que celle de bourreau rappelle en substance le cinéaste dans ce film qui aurait gagné cependant à mettre un peu d'ordre dans le grand foutoir qu'il apparait être parfois et dans lequel se meut avec aisance l'excellente et impétueuse actrice Ioana Jacob.

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le 24 févr. 2019

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