Après Senses et Asako I & II, il était tentant de voir ce que Ryusuke Hamaguchi avait tourné auparavant, alors qu'il n'avait que 30 ans. Passion, son deuxième film, peut donc se lire comme un essai de son oeuvre à venir, quelque chose comme un brouillon, avec des qualités, comme ce goût de l'exploration des sentiments et du romanesque mais aussi pas mal de défauts, notamment une mise en scène pas très assurée, qui entre finalement en résonance avec les affections de ses protagonistes, un peu hésitantes. Dans ce qui s'annonce comme une sorte de jeu de la vérité, cruel et libérateur, les hommes de Passion, au seuil de la trentaine, n'en sortent pas grandis, face à des femmes qui semblent plus mûres et honnêtes, au même âge. Il y a un côté marivaudage dans le film, pas désagréable, mais tout de même trop bavard, qui rappelle non pas Rohmer mais plutôt le grand cinéaste Yasuzo Masumura, mais en moins cynique et sensuel. Passion est évidemment aussi narrativement bien plus faible que Senses et ce n'est pas qu'une question de longueur. Les personnages sont moins aboutis du point de vue psychologique, ce sont même des lacs d'inconstance, et il manque surtout de l'émotion à ces péripéties sentimentales. Maintenant, si les distributeurs s'intéressaient à nouveau à Hamaguchi pourquoi ne pas aller voir du côté de son tout premier film, le remake fort intrigant du Solaris de Tarkovski ?

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le 16 mai 2019

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