Sujet délicat s'il en est le rapprochement de deux êtres que tout sépare, surtout l'éducation et la classe sociale. Comment ne pas sombrer dans le cliché ? Comment, à force de naïveté et de tendresse pour ses personnages, ne pas couvrir soi-même son oeuvre de manichéisme, voire de condescendance ? Eric-Emmanuel Schmitt avait relevé haut la main ce défi avec son pétillant Odette Toutlemonde via le côté très fantaisiste de son héroïne.


Avec Pas son genre, Lucas Belvaux rate la marche. Au départ plutôt plaisant, son film tourne en rond dans son propos. Qu'existe-il de plus insupportable dans une histoire d'amour que de ne pas comprendre la motivation des personnages et de ne pas, ne serait-ce que deviner leurs sentiments ? Leur bluette est tellement invraisemblable qu'on en arrive à attendre un quiproquo théâtral, un twist, une trahison, mais rien n'arrive. C'est vraiment l'histoire banale d'un prof de philo un peu snob qui s'entiche d'une coiffeuse guillerette et l'élève spirituellement en lui faisant lire du Kant.


Ah.


On pourrait croire que le final en pirouette est lourd de sens. Que nenni, il s'agit juste d'une manière de clore le film de façon différente qu'un long baiser sur un quai de gare. Une façon peu élégante de brouiller les pistes et de nous sortir du chapeau une sortie de secours face à l'incendie qui menace la baraque. En plus, c'est tout bonnement insensé.


Il y a cependant une chose absolument géniale dans ce film. C'est Emilie Dequenne. Elle est solaire de bout en bout, merveilleusement filmée par Belvaux, à la fois insupportablement enjouée, délicieusement philosophe sans le savoir et extrêmement jolie. Malgré un personnage, pas si mal écrit que cela, mais un peu classique, elle parvient à offrir une de ses plus belles performances (non mais vraiment) et en arrive à éclipser totalement le film par sa présence (solaire, éclipse toussa). Éclipser est malheureusement le mot car elle fonce comme une locomotive que le film lui-même ne parvient jamais à rattraper, jusqu'à la fin donc,


où le film reste alors qu'elle est déjà partie.


C'est donc un 5 timide que j'attribue à ce très bancal Pas son genre qui ne rayonne qu'au travers l'aura de son actrice principale mais peine à se décoller d'un sujet éculé et au final très casse-gueule.

Before-Sunrise
5
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le 29 juin 2015

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Before-Sunrise

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