GOLDEN MOUSTACHE

Mine de rien, Mission Impossible s'est imposée comme une des sagas les plus solides de l'histoire du cinéma et peut-être même comme la meilleure dans le domaine de l'action. Une seule raison à cela : Tom Cruise et son flair de producteur qui lui a permis de s'acoquiner avec des metteurs en scène de talent qui ont su conférer une identité forte à chaque film de la série. A ce titre, fort du succès du dernier opus en date (l'excellent Rogue Nation), Cruise a choisi pour la première fois de rempiler avec le même réal, son compère Christopher McQuarrie (ces deux là ne se quittent plus depuis Jack Reacher).

D’entrée de jeu, ce choix se révèle être payant en termes de divertissement pur car Fallout n’a absolument rien à envier à ses aînés sur le plan du spectacle et enterre tranquillement 90% des blockbusters actuels.
En effet, le métrage renoue avec l’approche très organique de l’action de Rogue Nation et propose son lot de morceaux de bravoures dantesques transcendés par de nombreuses cascades à l’ancienne. Personnellement, je retiendrai une des scènes de chute libre les plus impressionnantes jamais filmées, un ballet motorisé en plein Paris (un peu parasité par l’approche douteuse de la géographie parisienne des Américains mais bon…), un mano a mano ultra-violent dans les chiottes du grand Palais qui renvoie à leurs chères études les chorégraphies de la saga Bourne et of course, l’incroyable course poursuite en hélico mise en avant par la promo du film.

Monté comme une course-poursuite éreintante et sans temps morts de 2h30, Fallout est donc un rollercoaster très recommandable qui a en plus le bon goût de multiplier les clins d’œil au reste de la série sans jamais donner l’impression de se répéter (les masques, les poursuites à moto, l’atmosphère très film noir empruntée à De Palma au début du film…). Ce récit mené tambour battant propose également quelques choix narratifs intéressants mais aussi d’autres plus discutables….

Ainsi, alors qu’il laissait de la place à ses petits camarades dans les deux derniers volets, Ethan Hunt redevient le centre du récit et ses dilemmes moraux constituent le principal ressort de l’intrigue. Cela permet d’offrir au film quelques moments forts comme ces séquences de rêve, un flash-forward inattendu ou un climax final aux enjeux intimistes.
Malheureusement, ce choix se révèle à double tranchant et il ne reste plus que des miettes aux personnages secondaires. C’est d’autant plus frustrant pour ceux qui sont issus de Rogue Nation et dont on aurait pu attendre qu’ils soient plus développés : La troublante Ilsa Faust, véritable alter-ego de Hunt, devient ici un simple sidekick et la némésis Solomon Lane voit son charisme menaçant dilué dans une intrigue inutilement alambiquée qui prolonge artificiellement celle de l’opus précédent.
Les nouveaux venus ne sont guère mieux lotis : Henry Cavill fait ce qu’il peut mais sa jolie moustache (la fameuse !) et une certaine présence physique ne suffisent pas à donner de l’épaisseur à August Walker. Quant à Vanessa Kirby, elle est peu convaincante en femme fatale et son personnage n’apporte strictement rien à l’intrigue.

Ces défauts empêchent selon moi Fallout d’atteindre les sommets de Rogue Nation et de Ghost Protocol. Toutefois, malgré cette déception, il reste un sacré moment de cinéma qui en donne pour son argent au spectateur venu chercher des sensations fortes. Par ailleurs, les blockbusters avec un tel degré d’exigence dans leur fabrication sont devenus une denrée trop rare pour faire la fine bouche….