Mémoires des vaincus

Les oubliés nous raconte un morceau de l’histoire que ne connait pas ou alors très peu en France : le déminage post-45 des côtes danoises par des prisonniers de guerre allemands, souvent très jeunes. Martin Zandvliet dirige habilement son acteurs dans cette fable de la guerre, où les rôles des bourreaux et de victimes sont inversés, sans pour autant qu’on ne ressente la joie des vainqueurs, seulement leur haine et leur amertume.

Un film qui bouleverse par sa sensibilité, qui nous tient en haleine à chaque déminage, qui nous questionne sur les notions de justice et de vengeance. Les acteurs sont tous très justes et sincères dans leur interprétation, et offrent une palette d’émotions riche. Cette jeunesse sacrifiée, abandonnée par sa patrie et haïe par ses voisins, qui n’a pas eu le temps de mesurer ces actes, essaie encore de rêver à un futur, ou même à profiter de l’instant présent, éphémère. La mise en scène a simple, dénudée, réaliste ; et pourtant poétique et pudique.

Petit bémol, le réalisateur occulte grandement les origines de cet événement, le régime nazi et la guerre 39-45, et par la même la complexité des rapports d’après-guerre. Les oubliés dénonce un crime de guerre (ces jeunes soldats auraient dûs être protégés par la convention de Genève, dont on les a sciemment exclus), mais Zandvliet s'accroche trop au point de vue des vaincus. Il n’arrive pas à illustrer les sentiments danois dans leur pleine mesure. Les soldats sont alors des victimes trop innocentes, tandis que les danois, soldats et civils, deviennent des bourreaux sans cœur. Ce manque de finesse déçoit et il faut porter un regard éclairé et critique sur Les oubliés si on ne veut pas être trop naïf.