La vengeance de l'épouvantail

Décidément, l'âge d'or du cinéma d'épouvante-horreur (milieu des années 1970 - fin des années 1980) recèle de perles méconnues . Les Fleurs de sang, aussi connu sous le nom de La nuit de l'épouvantail, en est un très bon exemple. Sorti en 1981, ce film mérite largement le détour, et ce pour plusieurs raisons.

Déjà, on se rend compte assez vite que l'histoire est originale. Elle débute dans une campagne lambda américaine, où un type simple d'esprit surnommé Bubba fait figure d'anormalité. Rejeté de la communauté, haï par certains individus, il n'a que deux personnes sur qui il peut compter : sa mère, et Marylee, une enfant interprétée par la jolie Tonya Crowe (à 10 ans, ce sera son dernier rôle). Malheureusement, les choses ne vont pas bien se passer pour le pauvre Bubba, puisqu'il va être accusé du meurtre de Marylee. Poursuivi par une bande de quatre hommes, il se cache dans un épouvantail, mais est reconnu et criblé de balles. Juste après, on apprend que la fillette n'est pas morte et que son présumé meurtrier l'a en fait sauvée...

Avant d'être une histoire de vengeance, ce film dénonce le comportement de l'Américain moyen, qui voit dans l'anormalité d'autrui une menace, qu'il ne faut pas hésiter à éliminer lorsque l'occasion se présente. Je trouve que cette thématique résonne bien avec notre époque : 35 ans après, c'est toujours la même chose. Celui qui est perçu comme différend est rapidement montré comme anormal, et donc comme un danger potentiel.

Le passage du procès en est une autre illustration : les coupables sont acquittés par le juge, qui fait preuve d'une grande complaisance à leur égard, ne souhaitant pas condamner quatre hommes qui participent à la vie de la ville, alors que Bubba, ce type bizarre et asocial, de toute façon ça se serait forcément mal fini pour lui. Après tout, il n'y aura que sa mère pour le pleurer.

Ceci étant, on entre dans la deuxième partie du film, la plus longue, celle de la vengeance de Bubba. Contrairement à un slasher, les victimes ne sont pas innocentes puisqu'il s'agit des quatre hommes qui ont tiré sur l'ami de Marylee. Là-dessus, le film est assez prévisible, et on se doute qu'ils y passeront tous, et surtout quand.

Le plus intéressant, c'est que le film choisi de se focaliser sur ces quatre hommes, et en particulier sur Otis : interprété par un très bon Charles Durning, c'est lui qui mène la bande, qui a voulu le premier la mort de Bubba, et qui fera tout ce qu'il peut pour essayer de résoudre les problèmes qui leur tombe dessus après le procès.

Ce qui est intéressant, c'est que pendant longtemps l'explication rationnelle est privilégiée : celui qui leur en veut, ça ne peut être que l'avocat de la mère de Bubba, ou alors c'est carrément une vengeance de celle-ci. Peu à peu, les acolytes d'Otis vont paniquer, et seul lui va garder la tête froide (souvent pour le pire). Comme on s'y attend, Otis est le dernier sur la liste, et la scène finale permet de comprendre de quoi il s'agit exactement, même si on s'en doutait fortement.

On perçoit l'influence du slasher sur Les Fleurs de sang durant certains passages. Cependant, ce film n'est pas un slasher. Bubba n'est pas un psychopathe, et il veut se venger de ceux qui l'ont assassiné. De plus, dans un slasher, le tueur ne sympathise pas avec quelqu'un (ou alors c'est bref et c'est pour servir ses intérêts).

Pour finir cette critique, je tiens à saluer la performance de l'ensemble des acteurs, la bonne réalisation, et une bande-son tout à fait correcte.
À savoir que La nuit de l'épouvantail est le premier film d'horreur avec un épouvantail, et sans doute le seul qui vaille le coup, vu la réputation épouvantaillement mauvaise des autres films du même genre tournés plus tard...