J'aime les péplums, j'aime Cecil B De Mille, j'aime les histoires bibliques et je ne déteste pas les films muets.

J'ai pourtant été surprise d'apprécier autant cette première tentative du maître du péplum sur le livre de l'Exode. Surprise et déstabilisée aussi. Je ne m'attendais pas à ce que le film soit coupé en 2, à ce que la partie biblique soit si courte et si succincte, surtout comparée à la version de 1956 qui plonge vraiment dans l'étude des personnes et de leur motivation.

Ici, le livre de l'Exode est raconté, tel quel, chaque carton de dialogue, ou presque, étant un verset de la Bible, pas de vision du narrateur, pas d'analyse, pas de sous texte. Moise est déjà un vieil homme, archétype du patriarche prophète, plutôt dur et assez antipathique au final. Pharaon est aussi un personnage d'épinal, l'opposant, mais plutôt sympathique. La Reine Nefertiri est quasi inexistante et les épisodes clefs se succèdent pour aboutir à l'incident du Veau d'Or.

Et pouf, nous voici à l'époque moderne (les années 20) pour une fable sur l'importance toujours pertinente des 10 Commandements dans le monde moderne.

Il était déjà presque 1h du matin à ce moment là et j'ai failli aller me coucher et pourtant, malgré un message un passé à la truelle, mais pas dénué de finesse (paradoxalement), je suis restée scotchée à mon écran pour voir le destin de 2 frères, élevés par une mère ultra religieuse. L'un rejette les enseignements de la Bible et l'autre les applique. Et le jour où tous deux vont rencontrer Mary une petite mendiante (potentiellement prostituée et définitivement voleuse), leur destin va se mettre en marche.

La petite parabole passe au crible chaque commandement, son application, la tentation de le contourner, pour finir par brosser un tableau plus nuancé de la religion qu'on ne pouvait le craindre.

La mère trop stricte et intégriste est tout aussi mise face à elle même que le fils résolu à briser toutes les lois. Celui qui suit les enseignements et montre plus de mesure que la mère est lui aussi tenté et mis face à son péché.

C'est très basique et à la fois complexe car pas si manichéen que ça (à part le personnage de tentatrice vénéneuse en robe transparente franco-chinoise! le stéréotype tourne à plein régime).

Dans la partie biblique, De Mille fait la preuve de son talent indéniable pour filmer les fresques et les scènes épiques. Certaines d'entre elles sont reprises littéralement dans la version de 56 et ne sont beaucoup plus impressionnantes. J'irai même jusqu'à dire que la scène du feu divin sur les bords de la Mer Rouge est meilleure que dans la version couleur grâce à un effet spécial qui a particulièrement bien vieilli.

Il y a aussi quelques scènes de bravoure dans la partie moderne avec la construction de la cathédrale et son effondrement.

Le casting m'est inconnu mais il est solide et il faut se faire au jeu du cinéma muet qui tient plus de la pantomime que du jeu d'acteur tel qu'on l'entend aujourd'hui. Les expressions sont outrancières, les réactions au delà de théâtrales, les gestes pleins de sens mais j'aime bien, c'est un mode de communication différent et on comprend tout ...

J'ai particulièrement remarqué Charles de Rochefort dans le rôle de Ramsès : beaucoup de charisme et de présence (il a très clairement servi de base au personnage animé du Prince d'Egypte bien plus que Yul Brynner étonnamment). J'ai moins aimé Theodore Roberts en Moise qui me l'a rendu antipathique.

J'ai également beaucoup apprécié Leatrice Joy qui interprète Mary. Malgré les stéréotypes de jeu de l'époque pour les femmes, elle a des moment de vrai finesse et ses yeux sont très expressifs.

Le bon fils face au mauvais fils, l'artisan charpentier (évidemment) et le promoteur qui ne travaille pas de ses mains, celui qui respecter les lois et celui qui ne les respecte pas : tout cela peut sembler facile mais les personnages féminins apportent de la nuance et plus de sens.

Une bonne surprise différente de ce à quoi je m'attendais donc encore mieux.

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le 19 avr. 2023

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Anilegna

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