Le Paradis
6.2
Le Paradis

Documentaire de Alain Cavalier (2014)

Réalisateur singulier au style unique, Alain Cavalier nous revient avec le très spécial « Le Paradis », signe qu’à 83 ans, il pose toujours la question de l’éphémère dans l’art et dans la vie. Dernièrement ovationné pour l’excellent « Pater », sorte d’ovni cinématographique sur fond de docu/fiction maitrisé à l’extrême, il se relance dans l’expérimental sous forme d’essai méditatif. Mais Alain Cavalier joue avec les codes comme personne d’autres, il sait être drôle comme profond, juste comme intense. Et d’une voix de grand conteur, « Le Paradis » raconte l’errance, l’infime et l’éphémère à taille humaine.



En guise de synopsis, je me permettrai de citer uniquement quelques lignes d’Alain Cavalier, disponibles un peu partout :



« Depuis l’enfance, j’ai eu la chance de traverser deux mini dépressions de bonheur et j’attends, tout à fait serein, la troisième. Ça me suffit pour croire en une certaine beauté de la vie et avoir le plaisir de tenter de la filmer sous toutes ses formes : arbres, animaux, dieux, humains… et cela à l’heure où l’amour est vif. L’innocence, le cinéaste en a perdu une partie. C’est si délicat à repérer autour de soi, si difficile à ne pas perdre au tournage. Ma reconnaissance va à ceux que vous regarderez à l’écran.
Pour tenir tête au temps, j’ai une parade qui est de fouiller dans mon stock d’émotions et d’images anciennes. Non pour retrouver ce qui ne reviendra pas mais pour deviner dans l’hiver les signes du printemps. Cela permet de recommencer encore une journée d’un pas aisé. »

Alain Cavalier



Le film débute sur un oiseau. Un oiseau se meurt au pied d’un arbre. Il y reste un bon moment, plusieurs heures. Quant Cavalier revient, l’oiseau a disparut. On suppose qu’il est peut-être mort. Cavalier a donc l’idée de construire une sorte de cercueil, un temple, une présence matérielle de l’oiseau. Il enferme un silex entre trois clous, et vient retrouver l’arbre, puis ce qu’il en reste, au fil des saisons. Il fige l’oiseau dans une spirale éternelle. Tel est le but de cet essai qui narre par les récits religieux, mystiques, les hommes, les objets les plus anodins, le passage d’une vie, l’infime particule que compose un être humain. Alain Cavalier n’est pas de ceux qui se testent à l’expérimental par le biais de naufrages vaseux soporifiques. Il joue avec le spectateur, le questionne. Qu’est qui fait que je me trouve la à ce moment ? Tu vois cet arbre juste là, écoute, je vais te montrer autre chose en lui. Il nous apporte une vision autre de l’immobile et de l’insignifiant. Racontant ses mythes d’enfance, son voyage d’Ulysse et certains passages de sa vie, il met en scène un robot et une oie en plastique, leur procurant une humanité extraordinaire, un monde complexe et immobile. Dans ce tourbillon de justesse, il développe des récits épiques ou grandioses à l’aide d’un petit robot et de courges, et parle d’une voix simple de sentiments costauds.



La suite de la critique sur le cinéma du ghetto :

https://lecinemadughetto.wordpress.com/2014/10/17/le-paradis-2014/
Charlouille
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le 17 oct. 2014

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